Le mariage de Fant?mas (Свадьба Фантомаса)
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— Pas vrai, p`ere Machin-Chose ?
Malheureusement, Fandor jouait de malheur. Le chiffonnier dont il sollicitait le t'emoignage, 'etait connu de tous les habitu'es du bouge. On savait commun'ement son nom : D'etritus. On savait aussi que depuis plus de vingt ans il n’avait pas quitt'e le quartier. C’'etait un isol'e qui faisait au petit matin les bo^ites devant les restaurants et le chifftire juste assez pour trouver de quoi manger. Il ne pouvait pas conna^itre un gars de la Villette, on l’aurait su.
B'eb'e fut alors p'eremptoire :
— Eh bien, c’est moi, commenca-t-il, qui vais le r'ep'eter que t’es de l’arnac. Et si ca ne te pla^it pas, tu n’as qu’`a le dire. Sors voir ton lingue.
Que r'epondre ? Il lui 'etait impossible de
— Ferme ca ! commenca Fandor, j’en suis pas apr`es tes poux. Laisse les miens tranquilles.
Au moment m^eme o`u B'eb'e, avec un d'ehanchement caract'eristique, s’avancait vers lui, l’arme `a la main, la porte du caveau s’ouvrit avec une folle violence. Une voix apeur'ee se fit entendre :
— La paix, nom de Dieu ! Soufflez la camoufle [8], chahutez pas, ah bonsoir, j’ai plus de vingt mecs sur mes chausses. J’vas ^etre fait.
L’arrivant avait recommand'e le silence, une clameur lui r'epondit :
— C’est toi, Beaum^ome ?
— C’est moi.
L’apache venait de refermer la porte, il la verrouilla, s’avanca vers ses amis.
Beaum^ome qui, jadis, avait 'et'e condamn'e `a trente ans de hard labour en Angleterre, alors que Fant^omas 'etait emprisonn'e `a Londres sous le nom de guerre de Tom Bob, avait r'eussi `a s’enfuir et, naturellement, s’'etait empress'e de regagner Paris. Depuis lors, il vivait dans une crainte perp'etuelle. Il savait que la police anglaise, beaucoup mieux faite que la police francaise, le recherchait inlassablement. Il n’avait nulle envie de retourner faire l’'ecureuil sous les brumes de Londres.
Mais ce soir-l`a, pr'ecis'ement, Beaum^ome revenait d’un cambriolage tent'e avec l’assentiment des camarades.
— Allez, fermez, ordonnait le jeune apache, cependant que Fandor, profitant du tumulte caus'e par cette apparition, cherchait `a s’'eloigner, `a se dissimuler dans l’ombre. 'Ecoutez voir, les poteaux, c’est pas le moment de blaguer, figurez-vous que, juste au moment o`u je faisais sauter la porte de la taule, histoire d’arriver jusqu’aupr`es du tiroir-caisse, y a deux flics qui m’ont rappliqu'e dessus. L’affaire avait 'et'e donn'ee probablement et j’'etais fait d’avance. Ah, l`a l`a, et comment que je me suis tir'e des pattes ! Seulement, c’est pas fini ! Ah comment que je vais me tirer de l`a ? Je suis bien s^ur que les flics se sont embusqu'es `a la porte. Tout `a l’heure, ils vont me faire sortir et je serai frit.
— C’est probable, constata simplement B'eb'e, qui n’aimait pas beaucoup Beaum^ome.
La sinistre brute, cependant, qu’avait toujours 'et'e OEil-de-Boeuf, lui qui savait comme pas un noyer en douceur les chats et les chiens histoire de faire rire les camarades, 'eprouvait une certaine sympathie pour Beaum^ome. Et OEil-de-Boeuf voulait le sauver.
— Fermez-la tous ! cria-t-il pour obtenir le silence. Qui c’est qui a sp'ecialement crainte des flics, en ce moment ? Qui c’est qu’est recherch'e ?
Par hasard, il n’y avait personne. Tous les apaches qui se trouvaient r'eunis dans le bouge avaient `a coup s^ur bien des m'efaits sur la conscience, mais c’'etaient des m'efaits inconnus. Nul, sauf Beaum^ome, n’'etait
« sp'ecialement » recherch'e, cette nuit-l`a.— Alors, constata OEil-de-Boeuf, mon pot’, faut pas te d'esesp'erer, on va encore ^etre l`a pour un coup, et te tirer d’affaire.
OEil-de-Boeuf grommela quelque chose `a l’oreille de B'eb'e et B'eb'e approuva :
— Les femmes, cria alors OEil-de-Boeuf, fichez-vous toutes au fond de la boutique. Coup-de-B^aton, va monter la garde devant la lourde. Si d’aventure on frappait, tu n’ouvrirais pas tout de suite, hein ?
Comme on s’empressait d’ex'ecuter ces ordres, `a l’improviste, OEil-de-Boeuf sauta sur Fandor, lui fit un croc-en-jambe qui l’'etala brusquement sur le sol.
— `A l’aide, les aminches, on va lui choper ses frusques, au roussin. Beaum^ome va les prendre et nous, nous le cr`everons.
Fandor n’eut pas m^eme le temps de r'esister. L’attaque avait 'et'e men'ee si rapidement qu’il 'etait d'epouill'e de son pantalon et de sa veste avant d’avoir pu se reconna^itre.
— Allez, cavale, Beaum^ome.
Beaum^ome, de son c^ot'e, n’avait pas perdu son temps.
Au fur et `a mesure qu’on les lui passait, il avait rev^etu les v^etements du malheureux J'er^ome Fandor.
— Cavale, recommandait B'eb'e, en te voyant sous d’autres frusques, les roussins ne te reconna^itront pas. Vas-y, d'ebine !
Coup-de-B^aton entreb^aillant la porte, la referma derri`ere Beaum^ome.
— Et maintenant, reprit B'eb'e, faisant signe pour qu’on l^ache Fandor, on va zigouiller monsieur, histoire de lui apprendre que s’il est connu sur le boulevard de la Villette, il ferait bien de pas venir tra^iner `a Grenelle.
`A ce moment, Fandor pensa soudain qu’il 'etait peut-^etre n'ecessaire de faire son acte de contrition.
— Fichu, se dit-il `a lui-m^eme, en voyant les couteaux briller au-dessus de sa t^ete. Je ne peux m^eme pas me d'efendre.
En calecon et en chemise, Fandor 'etait, en effet, incapable d’opposer la moindre r'esistance `a ses agresseurs. Il se croisa les bras et attendit.
— Venez donc, l^aches, murmura-t-il en crachant `a ses pieds. Pour traiter les autres de bourriques, faut-il que vous soyez vaches, tout de m^eme. Et encore vous vous mettez `a dix contre un.
Mais ces paroles se perdirent dans le tumulte. On ne l’'ecoutait pas. On allait le tuer pour en finir, lorsqu’un individu, qui jusqu’alors avait dormi sur le haut d’une futaille sauta au-devant des agresseurs de Fandor.