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ЖАНРЫ

L'assassin de lady Beltham (Убийца леди Бельтам)
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Il lui demandait s’il avait 'et'e faire un tour, alors que tout juste, il venait d’^etre rendu `a la libert'e ?

— Je n’ai pas 'et'e faire un tour, r'epondait T^ete-de-Lard avec un soupir, puisque vous m’aviez boucl'e.

Mais, `a ce mot, Juve donnait des signes de stup'efaction :

— Boucl'e, mon vieux ? Qu’est-ce que vous voulez dire ?

— J’'etais enferm'e dans le cabinet noir, monsieur Juve.

— Enferm'e ? Qu’est-ce que vous me chantez, T^ete-de-Lard ?

— Dame ! monsieur Juve, protestait-il encore, quand j’ai voulu me lever, ce matin, je me suis apercu que la porte 'etait verrouill'ee.

Or, `a cet instant, Juve 'eclata de rire :

— C’est pourtant vrai. Je me rappelle que ce matin, quand je suis sorti, j’ai machinalement tir'e le verrou oubliant que vous 'etiez l`a. C’est rigolo. Mais vous ne m’en voulez pas hein, T^ete-de-Lard ? Bougre, vous avez d^u croire que je vous avais flanqu'e en taule. Mais, ca ne fait rien. Mettez votre main dans la mienne, T^ete-de-Lard. Entre copains comme nous, il n’y a pas de rancune qui tienne. Nous allons nous caler les joues d’une mani`ere un peu soign'ee, et, si vous m’en croyez, devant une bonne bouteille de vin.

Juve secouait avec une grande amiti'e la main molle et moite que lui abandonnait T^ete-de-Lard. Il poussa l’apache dans la direction de la salle `a manger d’une petite tape amicale sur l’'epaule.

— Venez bouffer, T^ete-de-Lard. Venez, mon vieux !

T^ete-de-Lard commencait `a se rass'er'ener. La cordialit'e de Juve 'etait si parfaite, qu’il e^ut fallu `a T^ete-de-Lard beaucoup plus d’intelligence qu’il n’en avait r'eellement pour comprendre que le policier se moquait de lui.

D’ailleurs, T^ete-de-Lard 'etait gourmand ; ce gros homme qui avait pass'e dix ans de sa vie `a respirer l’odeur fade et chaude du boudin et de la saucisse, appr'eciait les bons soupers, les copieux gueuletons qui entretenaient son embonpoint. Or, Juve le conduisait dans sa salle `a manger o`u un p^at'e croustillant flanqu'e d’un poulet entour'e d’un r'egiment de bouteilles meublait de la plus agr'eable facon la table servie. Comment ^etre morose ou inquiet en pr'esence d’un pareil festin ?

— `A table, r'ep'eta Juve, et d’abord un bon coup pour se creuser l’estomac.

Un vin d’Anjou p'etillant moussa dans les verres. T^ete-de-Lard fut joyeux en une seconde.

— `A table, monsieur Juve.

Et, comme il avait des usages, T^ete-de-Lard reprit :

— C’est bien de l’honneur pour moi tout de m^eme et je vous remercie.

Une demi-heure plus tard, Juve et T^ete-de-Lard 'etaient les meilleurs amis du monde.

T^ete-de-Lard mangeait avec une surprenante voracit'e et vidait sans discontinuer le grand verre que Juve emplissait avec une r'egularit'e d’horloge. On avait d'ej`a parl'e de toutes sortes de sujets, de la qualit'e des andouilles de Vire, des m'erites du camembert bien fait, du vin de Suresnes, de l’aramon que l’on boit aux Halles [9] et m^eme on avait fait une incursion dans le domaine de la politique. T^ete-de-Lard s’'etait 'ecri'e, sinc`ere et franc :

— Le gouvernement qui me pla^it le mieux `a moi, c’est celui qui donne le plus de banquets.

Que voulait donc Juve ?

Pourquoi se montrait-il si affable, si hospitalier `a l’'egard de T^ete-de-Lard ? Pourquoi 'evitait-il avec un soin extr^eme d’aborder les 'ev'enements de la veille ?

— T^ete-de-Lard, mon vieux, `a votre sant'e !

— `A la v^otre, monsieur Juve !

Et les verres succ'edaient aux verres, le vin blanc au vin rouge, avec une telle rapidit'e, que bient^ot Juve se mit `a chantonner :

— La vie, disait le policier, la vie a vraiment du bon quand on se verse sur la pente du gosier du vin qui a go^ut de pierre `a fusil.

T^ete-de-Lard, lui, apr`es ^etre devenu loquace, 'etait subitement pass'e `a un mutisme parfait. Il ne s’occupait plus gu`ere de Juve. Il ne r'epondait que par grognements, mais en revanche, il buvait comme une 'eponge.

Et c’'etait `a cet instant psychologique, o`u l’ivresse commencait `a bercer les r^eves de T^ete-de-Lard, que Juve soudain jeta son verre sur le parquet o`u il se brisa, tapa un coup de poing formidable sur la table, tout en s’'ecriant :

— Et puis, en voil`a assez ! T^ete-de-Lard, tu n’es qu’un cochon !

T^ete-de-Lard 'etait naturellement si loin de s’attendre `a une pareille exclamation, qu’il s’arr^eta net d’enfourner les victuailles dans sa gargantuesque bouche.

— Je suis un cochon, demanda-t-il, et pourquoi ?

— Oui, tu es un cochon, r'ep'etait Juve, parce que tu es un faux fr`ere.

— Un faux fr`ere ? b'egaya l’apache.

— Parfaitement, et tu t’es foutu de moi depuis hier soir.

T^ete-de-Lard d’abord ne r'epondit rien. Machinalement, cependant, il avait pris sur la table une bouteille de vin et, dans l’exc`es de son 'emotion, oubliant de se servir d’un verre, il avait renvers'e la t^ete en arri`ere et il buvait `a m^eme le goulot.

— Oui, tu t’es foutu de moi, continuait Juve, tu ne m’avais pas dit que tu 'etais avec Fant^omas dans l’autobus, or, maintenant je le sais !

— Mais nom de Dieu, non, monsieur Juve !

D’une voix emp^at'ee et essayant de se lever p'eniblement, l’apache t^achait de se d'efendre :

— Vous ne savez rien, monsieur Juve, dit-il, vous vous trompez.

— Ah je me trompe, vraiment ? Et qu’est-ce qui me prouve que tu n’'etais pas avec Fant^omas, hein, T^ete-de-Lard ?

Devant l’apache, Juve 'etait maintenant debout, croisant les bras, l’air furieux :

— Qu’est-ce qui me prouve que je me trompe ? r'ep'eta-t-il.

— Si j’avais 'et'e avec Fant^omas, si j’'etais un des poteaux qui ont fait le coup de l’autobus, bien s^ur monsieur Juve, que je ne serais pas venu de moi-m^eme vous rendre visite.

— Mais, bougre d’imb'ecile, tu ne sais donc pas que lorsque les agents plongeurs t’ont eu r'echauff'e au poste et qu’ils t’ont remis en libert'e, deux agents de la S^uret'e, pr'evenus par moi, t’ont fil'e ? Ah, mon salaud !

T^ete-de-Lard but encore un grand coup de vin. Il 'etait maintenant parfaitement ivre, et pourtant une lucidit'e particuli`ere s’'eveillait dans son esprit. C’'etait vrai. Il se rappelait que depuis sa sortie du poste, jusqu’`a sa venue `a la rue Tardieu, il avait 'et'e suivi, ou il avait cru ^etre suivi par deux messieurs `a la d'emarche bizarre. Mais alors, il 'etait tomb'e dans un pi`ege ?

Juve interrompit ses r'eflexions.

— Et puis, en voil`a assez, d'eclara-t-il, en voil`a de trop. Ah, tu 'etais avec Fant^omas comme tu viens de me le dire !

— Mais je n’ai rien dit.

— Si, tu viens de l’avouer.

T^ete-de-Lard crut presque ce que disait le policier.

— Tu viens de l’avouer, continuait Juve, et maintenant voil`a que tu refuses de me dire o`u est cette canaille et de te mettre `a table. Eh bien, ton compte est bon.

Juve fit mine de boire `a la bouteille, la reposa devant T^ete-de-Lard qui, d’un geste automatique la saisit `a son tour et la vida d’un seul trait.

— Oui, j’en ai assez ! continuait Juve. D’ailleurs, je sais ce qu’il pr'epare, Fant^omas, et son compte est bon `a lui aussi. Il sera fait ce soir. Parfaitement, on me l’a donn'e, Fant^omas, c’est tant pis pour toi. Cr'etin, va ! Tiens, veux-tu savoir ? Eh bien Fant^omas, il a organis'e le vol d’une clef, cette clef-l`a que j’ai dans ma poche. Oui, mais j’ai 'et'e pr'evenu. Ah, il peut la chercher, la clef, Fant^omas ! Vingt mille andouilles ! Je le jure bien qu’il ne l’aura pas ! Fant^omas, tiens, il donnerait je ne sais quoi pour l’avoir cette clef, mais je t’en fiche, c’est moi, Juve, qui la garde et il n’est pas pr`es de me la voler.

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