L'assassin de lady Beltham (Убийца леди Бельтам)
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— Mme lady Beltham, s’il vous pla^it ?
— Je ne connais pas, ma brave femme, vous devez vous tromper.
Rose Coutureau demeura interdite devant la concierge du 214 de l’avenue Niel `a qui elle avait pos'e cette question et qui venait de lui faire cette r'eponse.
Apr`es avoir m^urement r'efl'echi jusqu’`a l’aube sur tout ce qui venait de se passer, Rose Coutureau s’'etait enfin endormie puis, lorsqu’elle s’'etait r'eveill'ee, sa r'esolution 'etait prise. D’une part, elle suivrait les conseils de Fant^omas et ne sortirait de chez son p`ere que d'eguis'ee en vieille femme, de l’autre, elle ne laisserait pas se commettre un crime et pr'eviendrait la future victime du bandit du danger qu’elle courait. Car il n’y avait pas de doute, la menace de Fant^omas 'etait `a l’adresse d’une personne habitant avenue Niel, au 214. Elle concernait cette lady Beltham.
Aussi Rose Coutureau fut-elle toute surprise lorsque la concierge `a laquelle elle s’adressait lui eut r'epondu :
— Nous n’avons pas de lady Beltham et vous devez faire erreur.
Dans son inconscience, Rose se f'elicita de la tournure que prenaient les 'ev'enements et, elle se rassura.
— Du moment qu’elle n’habite pas ici, pensait-elle, Fant^omas a d^u confondre l’adresse et, de la sorte, il ne pourra pas la tuer.
Rose Coutureau toutefois, ne quitta pas l’immeuble. Elle avait m'edit'e d’y faire une autre visite et cela pour tenir sa promesse faite lorsqu’elle 'etait au D'ep^ot, `a la grande Berthe qui, si gentiment, avait pris sa place.
N’avait-elle pas promis `a la pierreuse d’aller supplier la comtesse de Blangy de retirer sa plainte, ou, tout au moins de ne pas venir `a l’audience pour ne pas charger la coupable ?
— Puisque vous n’avez pas lady Beltham ici, demanda-t-elle `a la concierge, je suppose que, tout au moins, vous connaissez la comtesse de Blangy ?
— Pour ca, oui ! La comtesse de Blangy, c’est au rez-de-chauss'ee, `a droite, le service se fait par la cour.
Rose Coutureau ne voulait pas avoir l’air d’un fournisseur, et, avec beaucoup d’audace, apparente tout au moins, la jeune fille s’en fut sonner `a la grande entr'ee.
Un domestique lui ouvrit :
— Que d'esirez-vous ?
Rose Coutureau semblait avoir perdu toute son assurance en apercevant par la porte entreb^aill'ee l’int'erieur d’un appartement luxueux. Elle s’enhardit cependant et d'eclara au serviteur :
— Je d'esirerais parler `a Mme la Comtesse de Blangy. Voulez-vous lui dire que c’est de la part de la m`ere de la petite Rose Coutureau.
On laissa la jeune fille dans l’antichambre, mais, quelques instants apr`es, la domestique revint et l’invita `a passer dans un petit salon.
Soudain, la fille de l’habilleur se trouva en pr'esence de l’'el'egante personne qu’elle avait vol'ee quelques jours auparavant et elle eut une peur atroce, en voyant que la grande dame la regardait attentivement, d’^etre d'emasqu'ee et reconnue sous son d'eguisement. Mais heureusement le jour dans la pi`ece 'etait tamis'e par d’'epais rideaux et il y r'egnait une p'enombre propice au maquillage de Rose.
— Veuillez vous asseoir, d'eclara la comtesse de Blangy, et me dire ce dont il s’agit ?
La gorge serr'ee par l’'emotion et vivant dans une perp'etuelle anxi'et'e, Rose Coutureau 'eprouvait toutes les peines du monde `a s’exprimer. Elle balbutia :
— Je suis la m`ere de la petite Rose.
Enfin, elle finit par s’enhardir et parlant tout d’un trait, rapidement, comme si elle r'ecitait une lecon apprise, elle sollicita de la comtesse de Blangy la gr^ace de celle qu’elle pr'etendait ^etre son enfant.
— Je vous en supplie, madame la comtesse, retirez votre plainte, ne la laissez pas condamner.
La comtesse de Blangy ne r'epondit rien, mais elle alla `a un petit secr'etaire et r'edigea une lettre. Au bout de quelques instants, elle la donna `a la visiteuse qu’'evidemment elle prenait pour une vieille femme.
— Vos paroles, madame, dit-elle, m’ont touch'ee. Je suis heureuse de pouvoir vous donner satisfaction : voici la lettre adress'ee au Procureur de la R'epublique, par laquelle je me d'esiste de ma plainte. Vous pouvez la faire parvenir `a ce magistrat. Soyez d’ailleurs assur'ee qu’en aucun cas je ne serais all'ee `a l’audience du Tribunal.
— Ah merci, merci ! dit Rose Coutureau. Merci, madame la comtesse !
La jeune fille ne voulait plus parler car elle sentait ses larmes pr^etes `a jaillir et redoutait par-dessus tout de les voir couler, ce qui aurait pu compromettre son habile maquillage.
En m^eme temps elle 'eprouvait une grande honte `a l’id'ee qu’elle mentait `a cette femme si bonne en somme et qu’elle lui faisait croire qu’elle 'etait la m`ere de Rose Coutureau, alors que Rose Coutureau, c’'etait elle-m^eme, la voleuse. Elle se sentait alors un besoin extr^eme de se d'evouer, d’avoir un geste g'en'ereux, de faire quelque chose de bien pour se r'ehabiliter `a ses propres yeux vis-`a-vis de cette femme. Soudain, une pens'ee lui vint `a l’esprit et, au lieu de se retirer comme elle avait commenc'e `a le faire, elle revint sur ses pas, entra dans le petit salon, ferma la porte derri`ere elle.
— Madame, commenca-t-elle, excusez-moi de vous retenir, mais je voudrais encore vous parler, puis-je le faire ?
— Je vous 'ecoute.
Rose Coutureau poursuivit :
— Voil`a, madame, je connais un secret, mais je n’h'esite pas `a vous le confier, car, peut-^etre, votre influence parviendra-t-elle `a emp^echer un malheur.
— De quoi s’agit-il ?
— Eh bien voil`a, j’ai appris… Oh, je ne peux pas vous dire comment… Peu importe d’ailleurs. C’est par une indiscr'etion, c’est en lisant `a travers une feuille de papier buvard, qu’une femme qui habite votre maison et que, cependant, votre concierge ne conna^it pas… On disait comme cela, dans la menace, qu’elle serait tu'ee le sept de ce mois, c’est-`a-dire apr`es-demain.
La comtesse de Blangy p^alit.
— Le nom de cette femme ? demanda-t-elle, le connaissez-vous ?
— Oui, r'epliqua Rose Coutureau, j’ai lu sur l’adresse qu’il s’agissait de lady Beltham, 214, avenue Niel.
La comtesse de Blangy devint livide, malgr'e les efforts qu’elle faisait pour faire bonne contenance. Elle se laissa choir sur un canap'e. Ses dents claquaient. Elle prononcait des paroles inintelligibles, incompr'ehensibles tout au moins pour son interlocutrice.
Celle-ci, toute troubl'ee, elle aussi, retint pourtant que la comtesse de Blangy, en r'ep'etant le nom de
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Quelques minutes plus tard, Rose Coutureau qui, par le m'etro rentrait chez elle, r'efl'echissait encore aux 'ev'enements qui venaient de se produire. Elle 'etait perplexe depuis que, dans un bon sentiment, elle avait r'ev'el'e `a la comtesse de Blangy la d'ecouverte faite au sujet de cette myst'erieuse lady Beltham et, en se rem'emorant l’attitude aussi troubl'ee qu’inqui`ete de son interlocutrice, elle pensait :
— Ai-je eu raison ou non de lui avouer ce que je savais ? Comment se fait-il qu’elle ait d’elle-m^eme, prononc'e le nom de Fant^omas ? N’ai-je pas commis une maladresse effroyable en parlant du sinistre projet ?