Чтение онлайн

ЖАНРЫ

L'assassin de lady Beltham (Убийца леди Бельтам)
Шрифт:

« Comme ca, tu comprends, insistait la pierreuse, tu seras libre ce soir, tu peux y compter, je connais le tarif. Pendant ce temps-l`a, moi, je trinquerai `a ta place. Inutile de me raconter comment tu as fait ton coup, ton homme m’a mis au courant. »

Cette fois, Rose Coutureau comprit, et son coeur se gonfla d’une immense gratitude `a l’'egard de cette excellente femme qui consentait b'en'evolement `a prendre sa place, `a se faire condamner, alors qu’elle n’avait rien fait, `a subir enfin la peine qu’elle m'eritait, elle, Rose Coutureau.

Qui donc avait pu avoir l’id'ee de cette substitution ? La fille de l’habilleur n’osait croire que c’'etait son amant, si bourru cependant, que c’'etait Beaum^ome qui avait imagin'e cette merveilleuse combinaison.

D’autre part, pour quelle raison la pierreuse agissait-elle ainsi ? Rose Coutureau 'etait na"ive, mais pas au point de croire qu’une inconnue avait consenti `a se substituer `a elle pour le simple plaisir de lui rendre service.

Mais la grande Berthe r'epondit `a la question implicite que se posait la jeune fille.

— T’as pas besoin d’avoir de scrupules, dit-elle. Si je fais la combine, c’est parce que le truc me va. Tu as de la veine d’avoir un amant qui est plein aux as, il m’a gav'ee de p`eze, et au fond, moi, tu sais, plut^ot que de trimer sur la rade par tous les temps, et de ne rien ramasser que des rebuffades, j’aime encore mieux passer quelques semaines en t^ole, `a me la couler douce, bien nourrie, bien log'ee. Qu’est-ce que tu veux, moi j’ai pas de chance. Pour faire le truc, faut ^etre gentille ! Ca allait bien il y a dix ans, mais maintenant que je suis moche, autant changer de m'etier.

Une voix, soudain, surmonta le murmure confus de la grande salle du D'ep^ot. Un gardien criait, appelait des femmes :

— Alice Binet ! Jeanne Dubourg ! Rose Coutureau !

— Pr'esente ! r'epondit la grande Berthe d’une voix forte.

En h^ate, elle prenait cong'e de la jeune fille.

— Ca y est, fit-elle, ca commence, `a bient^ot. On se reverra. Tu remercieras ton homme, qui a 'et'e g'en'ereux pour moi.

Elle ajouta :

— Para^it qu’il y a une plainte d'epos'ee contre toi. Si tu pouvais obtenir que la gonzesse que t’as vol'ee veuille bien la retirer, ou tout au moins ne vienne pas `a l’audience et qu’elle 'ecrive au pr'esident, ca vaudrait mieux. Adieu.

La pierreuse partit, puis revint encore sur ses pas :

— N’oublie pas de r'epondre quand on appellera la grande Berthe. Et quand tu seras dans le tourniquet, fais l’imb'ecile, reconnais que tu t’es r'ebellionn'ee contre les agents, mais ajoute que t’'etais so^ule et que tu regrettes.

***

Les choses se pass`erent comme l’avait dit la myst'erieuse pierreuse, et Rose Coutureau, sans comprendre exactement pourquoi cette substitution avait lieu, sans deviner surtout quel pouvait bien ^etre l’homme assez g'en'ereux, assez intelligent pour s’occuper d’elle ainsi, avait n'eanmoins accept'e la situation.

Apr`es le d'epart de la grande Berthe, qu’on emmenait `a l’instruction sous le nom de Rose Coutureau, la fille de l’habilleur 'etait rest'ee encore quelque temps au D'ep^ot, puis on avait appel'e vers midi

« la grande Berthe ». Et elle s’'etait pr'esent'ee.

La jeune fille alors, toujours sous le nom de Berthe, avait 'et'e conduite `a l’audience des flagrants d'elits. Heureusement pour elle, les agents qui, la veille au soir, avaient arr^et'e la pierreuse n’'etaient pas cit'es comme t'emoins, l’inculp'ee ayant d'eclar'e dans son interrogatoire au commissariat de police, reconna^itre les faits qui lui 'etaient reproch'es. Comme dans un r^eve, Rose Coutureau s’entendit gourmander, traiter de fille perdue, qualifier de femme apache, puis, un vieux monsieur assist'e de deux autres plus jeunes, v^etus de noir, de derri`ere un grand bureau, l’admonesta paternellement :

— Il ne faut plus vous enivrer, ma petite, ni ^etre ainsi en r'ebellion. Voyons, vous ^etes jeune et gentille, t^achez d’^etre raisonnable !

Les deux gardes municipaux qui avaient amen'e Rose la reconduisirent au D'ep^ot.

La jeune fille, qui n’avait rien compris `a ce qui s’'etait pass'e, se retrouva dans la grande salle obscure et froide, dont le personnel se renouvelait sans cesse.

Et peu `a peu, au fur et `a mesure que les heures passaient, Rose Coutureau s’inqui'etait. Qu’allait-il advenir d’elle ? Elle avait peur que la supercherie ne f^ut d'ecouverte et que la substitution ne cr'e^at d’ennuyeuses complications. Une voix forte, vers six heures du soir, appela pourtant :

— La grande Berthe !

Ce fut le seul nom prononc'e. Rose Coutureau sentit que son coeur s’arr^etait de battre. On appelait seulement la grande Berthe. Qu’est-ce que cela signifiait ?

D une voix d'efaillante, elle r'epondit :

— Pr'esente.

Le gardien la regarda sous le nez.

— C’est toi, la grande Berthe ? fit-il.

— Oui, balbutia Rose Coutureau.

— Eh bien, poursuivait l’homme, ton heure est arriv'ee.

Il consulta une feuille de papier :

— Oui, c’est bien cela, grogna-t-il, vingt-quatre heures de prison, ca y est, elles sont tir'ees, t’es libre, ma fille, passe au greffe donner une signature et d'ebine-toi ensuite.

— Silence, vous autres ! grogna le gardien, car le murmure des bavardages dans la salle du D'ep^ot commencait `a s’accro^itre de facon intempestive.

15 –

« LE 7 DE CE MOIS »

— Qu’est-ce que je vais prendre, non mais qu’est-ce que je vais prendre ?

Rose Coutureau qui venait de passer trois jours de cauchemar dans les locaux de la Conciergerie, qui avait 'et'e condamn'ee `a un jour de prison aux lieu et place de la grande Berthe, et qui s’'etait fait reprocher son ivrognerie par un vieux magistrat, ignorant son identit'e, 'etait, au sortir du D'ep^ot, instinctivement rentr'ee chez elle.

Au pr'ealable, toutefois, Rose Coutureau, avant de revenir rue Ramey chez son p`ere, 'etait all'ee au domicile de son amant, l’apache Beaum^ome. Elle voulait le remercier de ce qu’il avait fait pour elle, car la jeune fille naturellement croyait que c’'etait `a lui qu’elle devait sa miraculeuse 'evasion.

Beaum^ome, toutefois, n’'etait pas chez lui. Rose Coutureau se dit :

— 'Evidemment, je suis b^ete. Il est d'ej`a neuf heures du soir, Beaum^ome doit ^etre `a son travail.

En effet, le travail actuel de Beaum^ome consistait dans la manoeuvre du rideau au Th'e^atre Ornano, et la fille de l’habilleur eut un instant l’id'ee de retourner au th'e^atre, dont elle faisait d’ailleurs partie, mais elle eut peur de s’y rendre, craignant les repr'esailles et les reproches de ses camarades. N’'etait-elle pas une voleuse, et n’allait-elle pas ^etre indignement chass'ee du nombre des artistes appartenant `a la troupe ?

Lorsqu’elle r'efl'echissait `a l’acte odieux qu’elle avait commis, Rose Coutureau demeurait atterr'ee. Elle ne comprenait pas comment elle avait eu l’audace et l’astuce de faire un semblable vol. Rien dans son 'education n’avait pu l’orienter du c^ot'e de cet affreux vice et c’'etait spontan'ement, malgr'e elle, pour ainsi dire, qu’avec l’habilet'e d’une professionnelle consomm'ee elle avait fouill'e dans le r'eticule de cette fameuse grande dame, qu’on appelait la comtesse de Blangy, et qu’elle lui avait d'erob'e son porte-monnaie.

Поделиться с друзьями: