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ЖАНРЫ

Le Cadavre G?ant (Гигантский кадавр)
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Fandor jugeait inutile de faire le r'ecit de ses aventures au notaire Gauvin. Il 'etait bien plus int'eress'e par les propos que lui tenait ce dernier.

Gauvin en effet, s’il taisait scrupuleusement `a Fandor son intention de fuir avec l’argent de ses clients, narrait en d'etail l’aventure extraordinaire et myst'erieuse dont il venait d’^etre la victime.

— Je venais de rentrer dans mon cabinet, monsieur Fandor, et comme je suis un homme d’ordre – il en faut beaucoup dans ma profession – je venais d’ouvrir un des tiroirs de mon bureau dans lequel j’avais d'epos'e une grande enveloppe contenant les titres de rente de ma cliente M me Verdon. Or, non seulement, je m’apercevais alors que cette enveloppe 'etait d'echir'ee, que son contenu avait disparu, mais encore j’entendais dans mon cabinet des bruits suspects, qui me faisaient comprendre que le voleur n’'etait certainement pas loin…

— Alors ? interrogea Fandor. Qu’avez-vous fait ? Je suppose que vous avez cherch'e partout, fouill'e vos tentures, fouill'e vos armoires afin de mettre la main sur le coupable…

Gauvin baissa les yeux, rougi jusqu’aux oreilles.

— Ma foi non, monsieur Fandor, je n’ai pas os'e… Je me suis enfui…

— Eh bien ! ne put s’emp^echer de constater Fandor, vous n’^etes pas la moiti'e d’un capon vous ! Enfin, ca vous regarde… Il y a combien de temps que cette histoire-l`a s’est pass'ee ?

Gauvin consulta sa montre :

— Une demi-heure `a peu pr`es, trente-cinq minutes au plus…

— Alors, articula Fandor, je suppose que votre voleur doit ^etre loin d'esormais !

— Je ne le crois pas, r'etorqua Gauvin. En m’en allant, j’ai ferm'e la porte `a clef.

— Mais il restait la fen^etre ! fit Fandor.

Cette observation parut stup'efier Gauvin. Il 'ecarta les bras d’un air de r'esignation d'esesp'er'ee.

— Ca, c’est vrai, fit-il, je n’y avais pas pens'e !

Le journaliste le regardait du coin de l’oeil.

— Dr^ole de mentalit'e ! se dit-il. Voil`a un gaillard qui, non seulement se sauve lorsqu’il entend du bruit chez lui, mais qui ne pense m^eme pas `a surveiller les abords de son domicile, alors qu’il sait que le voleur dont il vient d’^etre victime ne doit pas encore en ^etre sorti ! On dirait qu’il est satisfait d’avoir 'et'e vol'e !…

Fandor ne croyait pas raisonner si juste.

En r'ealit'e, Gauvin aurait mieux aim'e faire le vol lui-m^eme, mais du moment qu’il n’avait pas pu le r'eussir, il se consolait avec le vieux proverbe :

« `A quelque chose, malheur est bon ».

Gauvin se disait en effet que, du moment qu’il 'etait vol'e, il allait pouvoir tirer parti de cette f^acheuse aventure pour s’innocenter aux yeux de ses clients de la mauvaise facon, `a la fois maladroite et frauduleuse, dont il d'efendait leurs int'er^ets.

De m^eme que les incendies sont parfois une bonne solution pour les gens qui font de mauvaises affaires, de m^eme ce vol venait `a point nomm'e pour permettre `a Gauvin une liquidation des op'erations de son 'etude, lesquelles 'etaient aussi compliqu'ees qu’irr'eguli`eres.

Fandor cependant reprenait :

— Plus le temps passe, et moins vous avez de chance de rattraper votre voleur. Puisque Juve n’est pas l`a, voulez-vous que nous allions jusqu’`a votre domicile ?

— Ma foi, r'epliqua le notaire, je ne demande pas mieux, monsieur Fandor ; j’avais peur tout seul, certainement, mais avec vous, je ne crains rien…

Le journaliste, d`es lors, sans souci du costume qu’il portait, se levait, quittait la chambre, s’engageait sur le palier.

Gauvin le suivait `a quelques pas. Alors qu’ils s’approchaient du haut de l’escalier et allaient descendre, les deux hommes entendirent Sulpice qui s’entretenait `a l’'etage inf'erieur avec deux autres personnages.

Fandor se pencha sur la rampe de l’escalier, et vit que le trio se composait d’une part, de Sulpice, de l’autre, de deux sergents de ville.

Or, le domestique disait aux gardiens de la paix :

— Vous comprenez bien, messieurs, que je ne suis pas si b^ete que j’en ai l’air. En causant avec cet individu, je me suis rendu compte que j’avais affaire `a un bandit… Tout d’abord, ce pr^etre qui voulait s’habiller en civil, ca ne me disait rien. Ensuite, il m’a fait cadeau de cinquante francs, ce qui est encore moins naturel… Il m’a menac'e de m’assassiner, et d`es lors, j’ai vu clair. Il a pr'etendu s’appeler J'er^ome Fandor ; j’ai fait semblant de le croire afin de pouvoir m’'eclipser et aller chercher Juve qu’il avait l’audace de me demander… Nous voil`a maintenant dans la maison, le gaillard occupe la chambre 134, faites votre devoir !

L’un des deux sergents de ville articula, s’adressant `a son compagnon :

— Je crois que notre devoir est tout indiqu'e, et que nous sommes sur la bonne piste. Ce matin, monsieur le commissaire, au rapport, nous a lu une d'ep^eche de Paris, prescrivant l’arrestation d’un individu qui porte une robe de pr^etre, sous laquelle il n’a que son calecon et sa chemise. Cet homme est un voleur qui s’est empar'e de ce v^etement dans lequel se trouvait un porte-monnaie contenant cent cinquante francs. Ordre de l’autorit'e parisienne : proc'eder `a son arrestation !

Fandor, pench'e par-dessus la rampe de l’escalier, entendait ces propos.

Il 'eclata de rire.

— Elle est bien bonne ! fit-il. Voil`a maintenant que j’ai tous les roussins de France `a mes trousses. Bah ! peu importe, on s’expliquera quand on aura le temps !

Le journaliste faisait volte-face, il se buta contre Gauvin. Leurs deux fronts se heurt`erent.

— D'ecid'ement, grogna Fandor, nous sommes faits pour nous rencontrer dans la vie, mais franchement nous y mettons un peu trop de brutalit'e l’un et l’autre ! Enfin, ca n’a pas d’importance, les bosses au front, ca se gu'erit tout seul…

Le journaliste entra^inait Gauvin vers l’extr'emit'e du couloir.

— Nous ne descendons donc pas ? interrogea le notaire.

— Si ! Comment donc ! d'eclara Fandor.

— Mais nous tournons le dos `a l’escalier, observa Gauvin.

Fandor, qui d'esormais se trouvait avec son compagnon `a l’extr'emit'e du couloir, pr`es d’une fen^etre ouverte, donnant sur une cour obscure de l’int'erieur de l’h^otel, mit un doigt sur ses l`evres et lui dit :

— Ah ! voil`a ! vous savez, mon cher Gauvin, les choses les plus simples ne sont pas toujours les meilleures… Tel que je vous connais, vous seriez descendu par l’escalier !

— Naturellement, fit le notaire abasourdi.

Fandor feignait de s’indigner.

— C’est ca, comme un bourgeois ! Les escaliers, mais c’est trop facile ! Moi je vous pr'eviens d’une chose, c’est que je viens de prendre un long repos involontaire ; oui, mon cher, j’'etais figurant `a la morgue, mais je vous expliquerai cela plus tard. Alors, j’estime que j’ai besoin de prendre du mouvement, de faire des exercices physiques, et puis, en m^eme temps, je suis tr`es peureux. Supposez qu’il y ait le feu `a l’h^otel et que le coeur de la fournaise soit dans la cage de l’escalier ; nous sommes ici au quatri`eme, comment descendrions-nous ?

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