Le Cadavre G?ant (Гигантский кадавр)
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Juve, en effet, apprenait des choses v'eritablement sensationnelles.
Le cadavre qu’il avait trouv'e 'etait le cadavre d’un certain Daniel. Ce Daniel habitait Grenoble, et il 'etait clerc d’un notaire… Quel 'etait ce notaire ? Oh ! Juve n’avait point besoin de r'efl'echir beaucoup pour le deviner. Les noms entre lesquels h'esitait le chemisier le renseignaient merveilleusement. N’avait-il pas lu tout r'ecemment dans un journal que Th'eodore Gauvin, fils du regrett'e M e Gauvin, avait r'ecemment achet'e une charge `a Grenoble ?
N’'etait-il pas 'evident, d`es lors, que c’'etait de lui qu’il s’agissait ? Ne fallait-il pas m^eme imaginer quelque lien myst'erieux, tragique surtout, entre la nouvelle affaire et les anciens incidents qui, jadis, avaient boulevers'e la vie du pauvre Th'eodore Gauvin, alors qu’il 'etait amoureux de la jeune M me Ricard, morte depuis, victime, elle aussi, de Fant^omas ?
Juve quitta le chemisier, satisfait mais pr'eoccup'e.
— D'ecid'ement, murmurait-il, je commence `a me douter de bien des choses. Ou je me trompe fort, ou j’aurai bient^ot des certitudes…
Dix minutes plus tard, Juve 'etait `a la S^uret'e, et, en vertu de combinaisons machiav'eliques, r'eussissait `a se faire donner la communication t'el'ephonique avec l’'etude de M e Gauvin `a Grenoble.
L’enqu^ete avancait `a pas de g'eant. Th'eodore Gauvin, qui r'epondait `a Juve, reconnaissait parfaitement la voix du policier, et se mettait naturellement `a son service. Il 'etait bien le patron d’un certain Daniel, employ'e chez lui en qualit'e de ma^itre-clerc, et dont il disait le plus grand bien.
Juve, `a ce moment, haletait litt'eralement :
— Et ce Daniel, grondait-il, hurlant dans le t'el'ephone, o`u est-il en ce moment ? Que fait-il ?
Le jeune Th'eodore Gauvin qui, jadis, 'etait un peu niais, avait 'evidemment fait de r'eels progr`es depuis la mort de son pauvre p`ere. Il r'epondait, en effet, `a Juve avec une certaine dignit'e :
— Impossible de vous le dire, secret professionnel !
Mais invoquer le secret professionnel en face d’un policier aussi habile que Juve 'etait 'evidemment des plus risqu'e.
Un quart d’heure plus tard, en effet, Juve avait convaincu Th'eodore Gauvin qu’il 'etait de la plus haute importance qu’il v^int imm'ediatement `a Paris. Un train partait de Grenoble vers neuf heures du soir, il fallait que le notaire le pr^it, Juve l’attendait…
Juve, 'evidemment, devait insister quelque peu pour convaincre son correspondant. Toutefois, il finissait par arriver `a ses fins.
— Soit, acceptait Th'eodore Gauvin, je serai demain `a Paris.
Le lendemain, en effet, Juve allait cueillir au d'ebarqu'e du train le jeune notaire. M e Gauvin, d`es lors, n’opposait plus une bien grande r'esistance aux questions exasp'er'ees dont l’accablait le policier. En quelques instants, Juve le confessait en entier. Il apprenait que Th'eodore Gauvin connaissait parfaitement Daniel, que Daniel 'etait parti remplir une mission secr`ete `a Amsterdam, et cela pour le compte d’une vieille M me Verdon qui habitait les environs de Grenoble et 'etait une cliente de l’'etude.
Th'eodore Gauvin, par exemple, cette confession faite, jurait sur l’honneur qu’il n’en savait pas davantage.
Juve eut beau insister, il ne tirait rien d’autre du jeune notaire. Toutefois, les renseignements qu’il avait appris 'etaient vraiment int'eressants et Juve s’en d'eclarait satisfait.
— Soit, concluait le policier, nous repartirons ensemble pour Grenoble !
Juve, `a l’instant o`u il causait ainsi `a Th'eodore Gauvin, 'etait certainement fort loin de se douter que les services de la S^uret'e t'el'egraphiaient de tous c^ot'es `a son domicile, qu’une d'ep^eche de J'er^ome Fandor 'etait arriv'ee, d'ep^eche annoncant que Fant^omas devait d'ebarquer incessamment `a Paris.
Si Juve avait su cela, certainement il aurait abandonn'e M e Gauvin et se serait pr'ecipit'e `a la gare. Mais il ne le savait pas, et l’ignorance o`u il 'etait devait amener rapidement de terribles catastrophes !
Chapitre XIII
Trois-et-Deux
Si Fandor pouvait ^etre `a bon droit l'eg`erement ahuri par les formidables racl'ees qu’il recevait `a la gare du Nord, `a l’instant pr'ecis o`u il se pr'ecipitait sur Fant^omas, bien certain d’ailleurs que les agents mass'es dans la gare allaient lui pr^eter main forte, Fant^omas tout au contraire ne manifestait aucun 'etonnement, aucune 'emotion m^eme, en se voyant soudain au centre d’une bagarre formidable, en comprenant que la police tentait un nouvel effort pour s’emparer de sa personne.
Fant^omas ne manifestait aucune surprise, et `a cela il y avait une bonne raison, une raison infiniment simple, qui 'etait tout simplement qu’il s’attendait `a la chose depuis Bruxelles.
Le Ma^itre de l’'epouvante, en effet, n’'etait point de ces hommes qui ne laissent rien au hasard, et que la destin'ee peut prendre au d'epourvu. Il calculait tout, au contraire, savait ^etre toujours sur le qui-vive, et, en cons'equence, se trouvait toujours pr^et `a toutes les 'eventualit'es.
Que s’'etait-il donc pass'e et comment Fant^omas pouvait-il s’attendre `a ce que Fandor pr'eparait contre lui ?
Lorsque le terrible bandit avait au passage `a niveau 'echapp'e `a Fandor qui crevait, d’un coup de revolver, le r'eservoir de sa voiture, Fant^omas 'etait litt'eralement furieux.
— Maudit journaliste ! jurait-il. Je n’arriverai donc jamais `a le tuer…
Et il passait sa rage sur sa voiture, la conduisant de main de ma^itre, mais avec une r'eelle brutalit'e.
Fandor, assur'ement, menait mieux que lui, et la voiture, bient^ot, en m'ecanique intelligente, car les automobiles ne sont point des machines stupides, r'epondait aux brutalit'es dont elle 'etait victime en s’arr^etant net !
Fant^omas, `a cet instant, r'eellement fou de col`ere, sautait du si`ege, arrachait les courroies qui retenaient le capot, se penchait sur le m'ecanisme…
Certes, l’instant 'etait grave, les minutes avaient leur valeur, la panne choisissait bien son moment pour immobiliser Fant^omas…
Le bandit, toutefois, avec son audace tranquille et son accoutum'e sang-froid, ne s’effarait pas outre mesure.
Il avait bien fait cinq ou six kilom`etres ; Fandor, 'eclop'e comme il l’'etait, ne lui donnerait pas la chasse de sit^ot, Fant^omas pouvait donc encore disposer, croyait-il, d’une grande heure en toute tranquillit'e.
— Que va tenter Fandor ? se demandait en effet le G'enie du crime. Tout au plus il peut pr'evenir la gendarmerie, mobiliser la police par t'el'egraphe, donner le signalement de ma voiture… Le tout est donc de ne pas ^etre immobilis'e longtemps, et de pouvoir gagner de vitesse sur les instructions qui vont ^etre donn'ees.
Fant^omas, tranquillement, se mit `a chercher sa panne. Il ne la trouvait pas toutefois avec facilit'e. Force lui 'etait donc d’emprunter `a son coffre, et cela afin de ne point trop se salir, de vieux v^etements pour se glisser sous le ch^assis et aller tripoter dans la boue du m'ecanisme.