Чтение онлайн

ЖАНРЫ

Le mariage de Fant?mas (Свадьба Фантомаса)
Шрифт:

— L`a, l`a, d'esignait la vieille femme. Le vois-tu encore ?

— Je le vois, r'epliqua Barnab'e que la vision extraordinaire d'egrisait peu `a peu.

Le fossoyeur et sa compagne pouvaient ^etre surpris, 'etonn'es, abasourdis.

Dans le myst`ere du cimeti`ere, soudain ils avaient vu surgir une forme vague, impr'ecise d’abord, qui, peu `a peu, se silhouettait plus nettement. Une t^ete leur 'etait apparue, une t^ete humaine, blafarde et glabre, dont la moiti'e 'etait toute noire, alors que l’autre moiti'e apparaissait blanche. Puis, un corps s’'etait dessin'e, un corps v^etu d’habits vraisemblablement ; sur la poitrine c’'etait encore une tache blanche, affectant la forme d’un plastron de chemise, cependant que des membres humains constituant le reste du corps semblaient 'egalement dissimul'es sous des v^etements noirs. Aux extr'emit'es des bras pendaient deux mains toutes blanches et immobiles. Cette apparition se d'eplacait, sans para^itre marcher, avec des mouvements doux, ind'efinissables ; tant^ot la vision 'eclair'ee par le reflet des becs de gaz, s’affirmait nettement, tant^ot au contraire elle devenait invisible. On la croyait partie, elle r'eapparaissait quelques secondes apr`es, surgissant derri`ere un caveau, se dressant au-dessus d’une tombe, glissant entre deux monuments, passant sous le feuillage 'epais d’un arbre.

— Cr'e nom de nom ! r'ep'etait Barnab'e qui sentait une sueur froide couler le long de ses joues, c’est un revenant, un fant^ome, cr'e nom, j’ai jamais eu le trac dans ma vie, et ce coup-ci, je commence `a avoir les foies !

Il voulait fuir ce spectacle extraordinaire. Impossible. Sa compagne, en proie `a l’'emotion que l’on devine, poussait des hurlements, appelait au secours.

Quelques passants s’'etaient approch'es, cherchaient `a comprendre ce qui motivait l’agitation de ces deux personnages, puis quelqu’un d’abord, deux ou trois personnes ensuite, comme Barnab'e et la vieille femme apercurent l’'etrange apparition en train d’'evoluer dans le cimeti`ere.

Rapidement, la foule grossissait. Quelle 'emotion sur le pont Caulaincourt ! On s’attroupait. Les voitures avaient peine `a passer. Des cochers temp^etaient, cependant que les conducteurs d’automobiles, impatients de poursuivre leur course folle `a travers Paris, faisaient ronfler leurs moteurs et retentir leur corne d’appel.

La police – enfin intrigu'ee – arriva sur les lieux, s’efforca de r'etablir la circulation. En vain. Les agents ne comprenaient pas les explications qu’on leur fournissait dans l’assistance :

— Il y a des voleurs dans le cimeti`ere, disaient certains, cependant que d’autres, plus troubl'es, plus 'emotionnables aussi sans doute, affirmaient :

— Non, ce sont des revenants, ce sont les morts qui reviennent.

Les agents ind'ecis ne savaient que faire. Ils se contentaient de pousser, avec une patiente 'energie, ceux qui s’obstinaient `a stationner.

Mais on leur ob'eissait avec peine. Puis une femme tomba par terre, eut une crise de nerfs, on s’empressa autour d’elle, on faillit l’'etouffer en voulant lui prodiguer des secours. Quelques personnes se d'evouant la descendirent vers le boulevard pour la conduire dans une pharmacie. Elle avait certainement vu, celle-l`a, vu le fant^ome. D’ailleurs plus nombreuse devenait la foule, plus on acqu'erait la certitude que les deux premiers t'emoins de ce spectacle inadmissible, n’avaient pas 'et'e l’objet d’une hallucination. `A un moment donn'e, une clameur angoiss'ee retentit et la foule, se bousculant, recula de la balustrade, courut au c^ot'e oppos'e. Tout le monde venait de voir le spectre se rapprocher, venir au pied du pont puis dispara^itre dessous. Quelques jeunes gens plus audacieux que les autres d'egringolaient rapidement le petit escalier qui, du pont Caulaincourt, conduit `a l’avenue Rachel. Suivis par d’autres, ils se rapprochaient de l’entr'ee du cimeti`ere. La grosse porte de fer 'etait close depuis longtemps, cependant on y carillonnait. Le tintement clair de la sonnette r'esonna dans un silence impressionnant.

— Il faut faire une perquisition tout de suite, avertir la police, avait sugg'er'e quelqu’un.

En attendant on r'eveillait le gardien. Au bout de quelques instants une petite porte sur le c^ot'e s’entreb^aillait, un homme `a demi v^etu, les yeux encore bouffis de sommeil, apparaissait. Il recula 'epouvant'e `a la vue de la foule mass'ee dans l’avenue Rachel.

— Qu’est-ce que c’est ? qu’est-ce qu’il y a ? interrogea-t-il.

En vain lui aussi s’efforcait-il de comprendre les explications qu’on lui donnait, il r'ep'eta, machinalement, les paroles en apparence incoh'erentes qui retentissaient `a ses oreilles :

— Des voleurs ? des spectres ? des revenants ? qu’est-ce que vous me chantez l`a ?

L’homme poussa un cri, agita les bras, protesta :

— Non, non, on n’entre pas, c’est d'efendu.

Mais en vain, cherchait-il `a s’interposer. La foule envahit le cimeti`ere et par la porte ouverte les gens s’introduisirent en masse dans la n'ecropole.

Il y avait l`a des 'el'egants, des f^etards en habit coiff'es de hauts-de-forme et qui ricanaient, serrant de pr`es des femmes aux toilettes tapageuses avec lesquelles ils venaient de boire dans les 'etablissements de nuit de Montmartre.

Au milieu d’eux grouillait une troupe mis'ereuse de pauvres gens mal v^etus, de vieilles d'eguenill'ees, d’hommes `a face patibulaire. Et tout ce monde-l`a fraternisait, se rapprochait, semblait d’accord pour atteindre un m^eme but : on voulait `a toute force visiter le cimeti`ere, savoir, avoir la cl'e de l’'enigme qui pr'eoccupait tout le monde depuis d'ej`a plus de trois quarts d’heure.

Les agents, impuissants `a mater la foule, s’'etaient r'esign'es `a la suivre et les deux sergents de ville qui avaient 'et'e attir'es par l’attroupement du pont Caulaincourt, p'en'etr`erent, eux aussi, dans le cimeti`ere. Barnab'e, moins ivre qu’une heure auparavant, semblait diriger la marche des gens qui, d'esormais troubl'es par le silence impressionnant des tombes et quelque peu g^en'es par le voisinage des caveaux mortuaires, semblaient de moins en moins d'esireux d’aller plus avant au fur et `a mesure qu’on avancait. Une petite femme, qui n’avait pas l^ach'e le bras de son ami, apr`es avoir 'et'e des plus acharn'ees `a p'en'etrer dans le cimeti`ere, se roidit contre l’'emotion et supplia, tremblante :

— Allons-nous-en.

Son compagnon ne demandait pas mieux que de la satisfaire ; il regrettait aussi de s’^etre ainsi avanc'e, il fit volte-face avec sa compagne. Ce mouvement semblait ^etre un signal, et bon nombre de ceux qui s’enfoncaient dans l’obscurit'e froide du champ de repos les imitaient, reculaient, s’en allaient, regagnaient avec satisfaction le monde des vivants.

Et, au bout de quelques minutes, ce que les agents avaient 'et'e impuissants `a obtenir, la solennit'e tragique du voisinage de la mort le r'ealisait. Comme par enchantement, le cimeti`ere se vidait et il ne restait plus que quelques personnes assez acharn'ees, assez audacieuses, pour continuer la marche en avant, pour poursuivre les recherches.

Il y avait l`a toujours Barnab'e, les agents, le gardien du cimeti`ere qui n’'etait pas encore revenu de sa stup'efaction et s’affolait `a l’id'ee du scandale que constituait cette invasion nocturne. Il y avait aussi deux messieurs bien habill'es, quelques pierreuses au visage tragique, un homme aux allures de domestique de bonne maison, le cocher John.

Celui-ci, toutefois, ne tardait pas `a dispara^itre. Quant `a la vieille femme que l’on avait vue `a c^ot'e de Barnab'e et qui, la premi`ere, avait signal'e l’apparition du spectre, elle s’'etait depuis longtemps 'eclips'ee.

Le cimeti`ere semblait plong'e dans la tranquillit'e la plus absolue. On n’entendait plus rien et les bruits de la ville, d'ej`a lointains, n’y parvenaient que tr`es att'enu'es. Des bouff'ees d’air froid semblaient surgir du fond de la terre, s’'echapper de myst'erieuses ouvertures m'enag'ees `a l’entr'ee des caveaux.

Cependant, la petite troupe rest'ee dans le cimeti`ere s’enhardissait peu `a peu. Depuis quelque temps d'ej`a, on n’avait rien remarqu'e d’insolite, et la vision qui avait stup'efi'e tant de monde paraissait s’^etre 'evanouie d'efinitivement. On venait de passer sous le pont Caulaincourt et, machinalement, les gens quittant l’avenue de l’Ouest, s’avancaient vers le fond du cimeti`ere, lorsque soudain ceux qui marchaient les premiers, pouss`erent une exclamation et s’arr^et`erent brusquement :

— Le voil`a, murmur`erent-ils. Encore le fant^ome.

Il y eut un mouvement de d'esordre, on h'esitait. Allait-on fuir ou continuer `a s’avancer ?

Le gardien du cimeti`ere, plus aguerri peut-^etre que les autres, eu 'egard `a sa profession et `a l’accoutumance qu’il avait contract'ee de vivre comme chez lui parmi les morts, s’'etait mis au premier rang et, prenant le bras de Barnab'e, il l’entra^inait avec lui.

— Viens voir, dit-il, c’est pas possible, il faut tirer cette affaire au clair.

Поделиться с друзьями: