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ЖАНРЫ

L'agent secret (Секретный агент)
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La chose lui semblait d’autant plus facile que Bobinette avait, avec elle, une assez lourde valise.

Avec un grand bruit de ferraille, le convoi s’immobilisa gare Saint-Lazare.

— Je vous dis adieu, mademoiselle Bobinette. Comme je vous l’ai annonc'e, il faut que je me h^ate de regagner le minist`ere, je suis attendu de minute en minute… vous m’excuserez ?…

Le jeune homme sauta sur le quai, bouscula les voyageurs qui se pressaient devant lui pour atteindre plus vite la sortie.

Mais comme il allait donner son billet `a l’employ'e, un brouhaha s’'eleva derri`ere lui, des voyageurs s’arr^etaient, d’autres rebroussaient chemin… des gens couraient, 'evidemment, il se passait quelque chose.

Trop pr'eoccup'e pour s’inqui'eter d’un incident 'etranger `a ses craintes, Henri de Loubersac qui, instinctivement, s’'etait arr^et'e lui aussi, allait continuer son chemin, lorsqu’il entendit un homme d’'equipe lui souffler `a voix basse :

— Ne vous arr^etez pas, monsieur Henri, vous seriez peut-^etre remarqu'e !…

Le lieutenant reconnut l’homme qui venait de lui parler. Ce facteur 'etait employ'e `a titre d’indicateur par la police du Deuxi`eme Bureau…

`A tout hasard, Henri de Loubersac, tendait `a l’agent son paquet de couvertures, feignant, aux yeux des passants, de s’adresser `a un homme d’'equipe ordinaire. Il demandait :

— Qu’est-ce qui se passe donc ?

— Je ne sais pas au juste, r'epondait l’indicateur… mais c’est une arrestation demand'ee par le Deuxi`eme Bureau… il y avait un bonhomme ou une bonne femme dans le train dont vous descendez qui 'etait signal'e…

Henri de Loubersac poussait un large soupir de satisfaction…

— 'Evidemment, se dit-il, Bobinette aura 'et'e reconnue et identifi'ee `a Rouen quand elle est mont'ee dans le train… les policiers de Juve ont t'el'egraphi'e.

Rassur'e sur le sort de celle qu’il ha"issait si profond'ement, maintenant, pour le tort qu’elle pouvait causer `a Wilhelmine, il remercia l’homme d’'equipe et s’appr^eta `a quitter la gare.

Mais, comme il descendait l’escalier menant `a la cour du Havre, le lieutenant Henri de Loubersac s’arr^eta.

Derri`ere lui, entre deux hommes qu’il connaissait fort bien pour ^etre deux agents de la S^uret'e, s’avancait un soldat en uniforme, le caporal Vinson `a n’en pas douter. On l’emmenait tr`es vraisemblablement `a la prison du Cherche-Midi… En un instant, Henri de Loubersac comprit ce qui s’'etait pass'e… Parbleu, la d'ep^eche que Juve avait recue `a Dieppe devait ^etre fausse ! Vinson et Bobinette, s’'etant probablement apercus qu’ils 'etaient 'epi'es, avaient trouv'e moyen de faire adresser `a Juve un t'el'egramme apocryphe, annoncant que Vinson avait 'et'e rencontr'e `a Londres. Ayant attir'e de la sorte Juve en Angleterre, ils 'etaient revenus `a Paris. Bobinette et Vinson avaient d^u se s'eparer pour avoir moins de chances d’^etre reconnus… c’'etait Vinson que l’on arr^etait tout `a l’heure, au moment o`u lui-m^eme descendait du train… Bobinette, devenue m'econnaissable pour la police apr`es avoir d'epouill'e sa soutane, devait s’^etre 'echapp'ee…

Le lieutenant de Loubersac rebroussa chemin en courant comme un fou. Il fouilla la gare Saint-Lazare, sauta dans un taxi, parcourut `a toute allure les rues avoisinantes…

Mais ses recherches demeur`erent vaines. Il avait devin'e : Bobinette n’'etait plus l`a, Bobinette avait eu le temps de dispara^itre…

24 – L’AP'ERITIF AU ROBERT’S BAR

— Encore un petit whiskey, ma vieille branche ?

— Oh ! non ! je n’oserais pas, nous avons d'ej`a tellement bu !…

— Mais si, mais si… `a travers l’or du vieux scotch, la vie semble plus belle et les barmaids plus jolies !

Juch'es sur leurs hauts tabourets, les deux buveurs qui venaient d’'echanger ces propos trinqu`erent solennellement. Toutefois, tandis que l’un d’eux, un jeune homme maigre et brun vidait d’un trait son grand verre, son compagnon, un gros homme blond, maladroitement laissa 'echapper le sien, dont le contenu se r'epandit sur le plancher. Il convenait de r'eparer cet accident au plus vite et le personnage qui, `a coup s^ur, ne regardait pas `a la d'epense, commanda aussit^ot une nouvelle tourn'ee.

Les verres 'etaient remplis de nouveau, si rapidement que c’est `a peine si le jeune homme brun s’en apercevait. Machinalement, il buvait encore, cependant que son compagnon, peut-^etre int'eress'e `a le griser, tandis que lui-m^eme voulait conserver son enti`ere lucidit'e d’esprit, trempait `a peine ses l`evres dans le breuvage enivrant.

Il 'etait six heures du soir, et par ce mauvais jour de d'ecembre, une grande animation r'egnait au Robert’s o`u se trouvait r'eunie pour l’ap'eritif la foule la plus bizarre et la plus cosmopolite.

Le Robert’s est `a Londres l’'equivalent du Maxim’s de Paris : c’est le grand 'etablissement de f^etes et de luxe qui ouvre ses portes d`es le cr'epuscule pour ne les clore qu’`a une heure avanc'ee de la nuit, le plus tard possible. Le Robert’s occupe un grand immeuble `a plusieurs 'etages, o`u l’on peut se livrer aux d'ebauches les plus diverses, aux orgies de nourritures et de boissons les plus vari'ees. L’'etablissement comporte au rez-de-chauss'ee une assez vaste salle commune, sorte de grill room, o`u l’on sert `a toute heure des repas l'egers.

Un escalier int'erieur conduit au premier 'etage o`u se trouve le bar proprement dit. Derri`ere un comptoir surcharg'e de bouteilles multicolores se tiennent en permanence de jolies barmaids qui n’arr^etent pas un instant de fabriquer et de servir des boissons glac'ees ou chaudes

« long » ou « short drinks » `a volont'e. Toutes les dix minutes un boy, crieur de journaux, s’introduit furtivement dans la salle et offre les derni`eres feuilles du soir.

Vif, il exerce son petit n'egoce, puis soudain dispara^it, pourchass'e par les g'erants aux habits noirs frip'es et qui, Autrichiens d’origine la plupart du temps, baragouinent un langage invraisemblable m^el'e de francais et d’anglais.

C’est dans cette salle encombr'ee, 'etourdissante, que les deux buveurs s’entretenaient famili`erement.

Le jeune homme brun, apr`es avoir 'ecout'e les confidences de son compagnon qui devaient ^etre extraordinaires, `a en juger, par la surprise qu’elles provoquaient, se hasarda `a demander :

— Mais quelle est donc ta profession, Tommy ?

— Mais je te l’ai d'ej`a racont'e : je suis clown de mon m'etier, clown musical. Je chante, je danse., j’interpr`ete les romances comiques, je m’habille en n`egre, je joue du banjo… et il se mit `a chanter : Lou a lou a lou

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