L'?vad?e de Saint-Lazare (Побег из Сен-Лазар)
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Fandor n’avait pas pens'e `a cela !
Tromp'e par des renseignements inexacts, il avait cru que la prise d’air descendait jusqu’au sol, il n’en 'etait rien, et d`es lors, il se demandait comment lui et H'el`ene allaient pouvoir se hisser dans ce conduit dont l’orifice 'etait ironiquement dress'e `a plus de cinq m`etres au-dessus de leur t^ete.
Le jeune homme et la jeune fille, perplexes, r'efl'echissaient encore, lorsqu’ils eurent une surprise absolument extraordinaire. Devant eux, en effet, quelque chose descendait lentement qui raclait les parois de la fameuse prise d’air. Et J'er^ome Fandor et H'el`ene qui, d’abord, avaient cru `a quelque 'eboulement de terrain, `a une pierre d'egringolant `a la suite d’une pluie quelconque, demeuraient muets d’effroi et de joie `a la fois en reconnaissant qu’il s’agissait d’une 'echelle, d’une 'echelle qui, miraculeusement, semblait venir s’offrir `a eux pour faciliter leur escalade.
J'er^ome Fandor n’h'esita pas.
— Mordieu, murmura-t-il, quand j’ai eu besoin d’une 'echelle pour sortir de Saint-Lazare, il s’est trouv'e une vieille femme extraordinaire pour m’en apporter une juste `a point. Tout `a l’heure, quand, dans votre wagon, je faisais trop de bruit en sciant le plafond, une autre vieille femme ou la m^eme, je n’en sais rien, s’est trouv'ee chanter juste au bon moment. Et voici que maintenant, comme nous ne savons de quelle facon nous en aller, une 'echelle nous arrive, c’est peut-^etre une troisi`eme vieille femme qui nous l’envoie, car enfin, ce ne peut pas ^etre la m^eme que celle qui chantait dans le wagon ?
Ce n’'etait pas le moment d’'epiloguer.
— Montez, conseillait Fandor `a H'el`ene, cette 'echelle est fragile et pourrait se rompre sous notre poids. Montez seule, une fois hors de danger et au sommet du puits, vous m’appeliez et je vous rejoins.
H'el`ene s’empressa d’ob'eir au jeune homme et gravit quelques 'echelons. Mais, elle n’en gravit que trois ou quatre. `A peine avait-elle commenc'e `a monter, en effet, qu’elle poussait un cri terrible, un cri auquel r'epondait une exclamation de J'er^ome Fandor.
L’'echelle `a laquelle se cramponnait la jeune fille, venait de bouger en effet. On la hissait. Elle remontait vers l’ouverture. Et, tandis qu’H'el`ene instinctivement, s’accrochait `a l’'echelle, sans penser `a sauter en arri`ere, Fandor avait beau, lui, jurer, hurler, faire un vacarme de tous les diables, il ne parvenait pas `a rattraper le dernier 'echelon. On lui enlevait H'el`ene sous les yeux.
***
Vingt minutes plus tard, n’entendant rien, perdu dans la nuit du tunnel, comprenant bien qu’H'el`ene, puisqu’elle ne lui donnait pas signe de vie, avait 'et'e victime de quelque aventure extraordinaire, J'er^ome Fandor se d'ecidait `a abandonner l’orifice de la chemin'ee d’a'eration.
Un train de marchandises traversait `a ce moment le tunnel. J'er^ome Fandor, la mort dans l’^ame, y monta. Il se faufila dans un wagon, un wagon qu’occupaient d’'enormes vaches, qui, de leur mufle roux, le flair`erent m'elancoliques, et l`a, `a bout de forces, bris'e de fatigue, accabl'e, il se laissa tomber sur leur liti`ere, et s’endormit d’un sommeil de plomb.
14 – NUIT DE TERREUR
— Qui va l`a ?
— Qui est l`a ?
Deux voix retentissaient dans la nuit, troublaient le silence de cette maison d'eserte o`u les rares bruits r'esonnaient, se r'ep'etaient lugubrement.
Il semblait que ces deux cris avaient 'et'e pouss'es par deux voix de femmes, l’une atterr'ee, l’autre un peu plus grave mais gouailleuse. Les interrogations avec un peu plus de nervosit'e dans le ton reprirent :
— Qui va l`a ?
— Qui est l`a ?
Soudain, la lumi`ere qui filtrait sous le pas d’une porte soigneusement close s’'eteignit brusquement, puis ce fut le silence qui dura un instant. Enfin la premi`ere voix reprit :
— R'epondez, c’est moi qui ai march'e. N’ayez pas peur.
— Non, non je ne veux pas.
Puis, plus rien, le silence.
Vingt minutes environ pass`erent sans que le moindre appel e^ut 'et'e formul'e, sans qu’aucune des objurgations faites n’e^ut 'et'e reprise. Et cependant, quelqu’un de l’autre c^ot'e de la porte, non pas dans la pi`ece qui la fermait, mais dans l’antichambre, attendait anxieusement :
Cette personne n’'etait autre qu’H'el`ene. La jeune fille, abasourdie, semblait stup'efaite, affol'ee. Apr`es ^etre demeur'ee comme prostr'ee dans cette antichambre o`u il faisait froid, o`u l’on n’entendait plus rien, lasse 'evidemment, d’insister pour se faire ouvrir la porte `a laquelle elle frappait, la jeune fille en poussant un profond soupir, recula lentement. Elle parvint au fa^ite d’un escalier, en prit la rampe, comme si elle e^ut craint d’^etre trahie par ses forces, puis elle descendit les marches une `a une, en tapinois.
Arriv'ee au bas de l’escalier, dans le grand hall de la maison o`u elle se trouvait et qu’'eclairait m'ediocrement une petite ampoule 'electrique, la jeune fille s’arr^eta et avisant une berg`ere, s’y laissa tomber ext'enu'ee. O`u se trouvait H'el`ene ? que lui 'etait-il donc arriv'e ?
La jeune fille, comme dans un r^eve, revit les derniers 'ev'enements.
`A peine 'etait-elle sortie du wagon p'enitentiaire, qu’en arrivant au sommet de l’'echelle, tir'ee par le haut, elle s’'etait trouv'ee soudain en pr'esence d’hommes masqu'es, envelopp'es de grands manteaux et qui s’'etaient jet'es sur elle, l’avaient ligot'ee, b^aillonn'ee, puis install'ee de force dans une automobile qui avait roul'e pendant la moiti'e de la nuit.
Le trajet avait dur'e trois heures environ, et il devait ^etre deux heures du matin, lorsque le v'ehicule enfin s’'etait arr^et'e. On avait alors fait descendre H'el`ene, on lui avait ^ot'e les liens qui la maintenaient prisonni`ere et, lorsqu’elle avait repris l’usage de ses membres, elle s’'etait rendu compte qu’elle se trouvait `a l’int'erieur d’une maison inconnue, au rez-de-chauss'ee d’une propri'et'e d'eserte.
L’automobile qui l’avait amen'ee avait disparu. H'el`ene, rebroussant chemin, avait d’abord essay'e de sortir du myst'erieux immeuble, mais la porte du rez-de-chauss'ee, par laquelle on l’avait fait entrer 'etait maintenant ferm'ee `a cl'e.
La jeune fille alors, surmontant son 'emotion et sa fatigue, avait eu l’audace de vouloir se rendre compte, d’une facon aussi nette que possible, de l’endroit o`u elle se trouvait. Elle avait ouvert une porte, puis une autre et successivement elle avait parcouru des pi`eces nombreuses, toutes d'esertes, mis'erablement meubl'ees de quelques chaises, H'el`ene avait cri'e, appel'e, nul ne lui avait r'epondu. La jeune fille cependant, ne s’'etait pas d'ecourag'ee. Voulant `a toutes forces savoir, elle 'etait mont'ee au premier 'etage, et l`a, toute palpitante d’'emotion, elle avait entendu de l'eg`eres rumeurs qui d'eterminaient chez elle un cri de d'efiance et d’angoisse. Croyant que quelqu’un s’approchait d’elle, elle avait cri'e : Qui va l`a ? Puis, elle avait vu filtrer de la lumi`ere sous une porte, elle s’'etait rapproch'ee, un bref dialogue s’'etait engag'e alors avec une personne qu’elle imaginait ^etre une femme. De nouveau la nuit et le silence.
Lasse d’attendre et terrass'ee par la fatigue, H'el`ene 'etait alors descendue, revenue au hall du rez-de-chauss'ee dans lequel ses myst'erieux ravisseurs l’avaient fait p'en'etrer tout d’abord, elle s’'etait endormie au fond d’une berg`ere.
H'el`ene dormit longtemps sans doute, car le cr'epuscule tombait d'ej`a lorsque la jeune fille avait ouvert les yeux. Elle avait regard'e autour d’elle stup'efaite, sans m^eme avoir bien conscience de ce qui se passait.
`A ses c^ot'es, la consid'erant avec douceur, s’'etait pench'e un visage tout souriant. Or, la fille de Fant^omas, stup'efaite de cette apparition, ne songeait qu’`a la regarder sans mot dire, lorsqu’elle entendit qu’on lui disait :