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ЖАНРЫ

L'?vad?e de Saint-Lazare (Побег из Сен-Лазар)
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Fandor, risquant le tout pour le tout, trouva moyen de prendre dans sa poche, une petite lampe 'electrique qu’il avait emport'ee par acquit de conscience. Les timides rayons 'eclairaient un instant le dessous du wagon, le journaliste poussa un soupir de soulagement :

— Allons, le diable est avec moi.

Il laissa tomber la lampe. Il tendit le bras, il r'eussit un tour de force, et sans m^eme savoir comment il pouvait y r'eussir, il attrapa une nouvelle tuyauterie, la tuyauterie du lavabo qui, par bonheur, au milieu du wagon rejoignait la timone du frein. Cinq minutes plus tard, J'er^ome Fandor `a moiti'e mort, mais sauf, se trouvait `a cheval sur les tampons qui s'eparaient le wagon p'enitentiaire des autres wagons.

Le long du wagon, pour la facilit'e des manoeuvres, des crampons de fer saillaient, destin'es `a permettre aux hommes d’'equipes de monter sur la toiture. J'er^ome Fandor les franchit, sans plus s’occuper des cahots qui cependant menacaient `a chaque instant de lui faire l^acher prise. On e^ut jur'e qu’un homme, dans les conditions o`u il se trouvait, ne pouvait parvenir sur le toit du wagon p'enitentiaire. Fandor lui, s’y hissa en un rien de temps.

Restait le plus difficile. Le toit du wagon, en effet, apparaissait redoutablement lisse. S’y maintenir semblait quasi impossible. Mais `a coup s^ur, J'er^ome Fandor avait pr'evu la difficult'e. De sa poche, il tirait encore une s'erie de cordes, l’une d’elles se terminait par un noeud coulant, il l’envoyait autour du chapiteau form'e au centre du wagon par le support de la lanterne.

`A plat ventre alors, les bras 'ecart'es, les jambes 'etendues, il avanca sur le toit du wagon. Bient^ot il eut rejoint le chapiteau de la lanterne. Il l’'etreignit de ses jambes nerveuses, puis, tranquillement, ayant atteint le terme de sa course, 'evidemment renseign'e et document'e, il tira de son sac, qu’il parvint `a faire glisser le long de son corps, un petit vilebrequin, une scie et il se mit en devoir de d'ecouper le toit du wagon.

 ***

Les gardiens dormaient. En tout, vingt-quatre prisonniers et trois prisonni`eres `a convoyer jusqu’`a Cherbourg. Les prisonniers 'etaient pour la plupart des matelots arr^et'es `a Paris alors qu’ils tiraient une

« bord'ee ». L’autorit'e civile devait les remettre aux mains des autorit'es militaires.

Les prisonni`eres 'etaient deux femmes arr^et'ees pour un meurtre commis aux environs de Cherbourg, outre H'el`ene, H'el`ene que, pour les besoins de l’instruction, on transf'erait de Saint-Lazare `a la prison de Cherbourg.

H'el`ene avait 'eprouv'e une joie folle en apprenant son d'epart.

— Quand on vous transf'erera, avait dit Fandor, je vous ferai 'evader, H'el`ene. Co^ute que co^ute, je vous ferai 'evader.

Depuis elle vivait dans cet espoir, avec cette pens'ee qui ne l’abandonnait pas une seconde. Elle ne voyait pas comment Fandor pouvait r'eellement la tirer de sa terrible situation, mais du moment qu’il avait promis, il tiendrait parole. Or, jusqu’alors, et il 'etait bient^ot minuit, rien n’'etait venu apprendre `a H'el`ene que Fandor f^ut r'eellement en train de pr'eparer son 'evasion. Mont'ee dans le wagon p'enitentiaire en m^eme temps que les deux autres prisonni`eres, dont l’une n’'etait autre que la vieille paralytique, H'el`ene avait 'et'e enferm'ee dans son 'etroit compartiment et l`a, elle attendait, presque sans espoir. Et puis soudain, au-dessous de sa t^ete, juste au sommet de son 'etroit compartiment, un bruit r'egulier, continuel, extraordinaire. H'el`ene se redressa. En un instant, toute son attention se concentra sur ce bruit.

— Qu’est-ce que cela signifie ? Qu’est-ce qui se passe ? se demanda la jeune fille.

En d'epit du bruit de la marche du train, elle entendait nettement le va-et-vient, elle ne pouvait s’y tromper, le va-et-vient d’un outil qui, sans doute, entamait le plafond de sa cellule. Et, dans la p'enombre, H'el`ene se redressa. Elle r'eussit `a s’extraire en quelque sorte de son cachot, s’'ecorchant les genoux, elle trouva le moyen de se d'esembo^iter de son banc, elle monta dessus, elle passa sa main sur le plafond. H'el`ene fut sur le point de hurler de douleur. T^atonnant, sa main avait rencontr'e un mince outil qui avait transperc'e le plafond : la lame d’une scie, et cette scie l’avait coup'ee.

— Mis'ericorde, pensa la jeune fille, c’est Fandor, ce ne peut ^etre que Fandor.

`A la joie de la d'elivrance proche succ'edait pourtant une horrible inqui'etude. Fandor, en sciant le plafond, faisait en r'ealit'e un bruit croissant. H'el`ene l’avait entendu, les gardiens allaient l’entendre ! On viendrait, on trouverait le plafond `a moiti'e ouvert. L’'evasion serait manqu'ee. Or, `a ce moment, comme le bruit redoublait, comme il y avait r'eellement danger que les gardiens ne fussent attir'es par les manoeuvres de Fandor, dans la cellule contigu"e `a la cellule d’H'el`ene, quelqu’un se mit `a chanter `a plein gosier.

Et, sans comprendre, ravie pourtant, H'el`ene pensa :

— Mais c’est la vieille paralytique qui hurle de la sorte. Ah Dieu soit lou'e ! Si elle continue `a faire cette vie, on n’entendra plus Fandor.

***

— Tenez-vous bien, n’ayez pas peur, l`a, laissez-vous glisser dans mes bras, vous sentez les crampons de fer ? Parfait, le train va tout doucement `a cause des travaux, vous allez sauter. Quand je vous le dirai.

C’'etait chose faite. L’'evasion avait r'eussi.

H'el`ene, gr^ace `a lui, avait pu se hisser de son wagon. Parvenue sur le toit, les deux amoureux avaient 'echang'e un long, un ardent baiser, puis, sans mot dire, car les minutes pressaient, l’un et l’autre s’'etaient remis `a fuir.

Fandor avait guid'e la jeune fille, il l’avait fait sortir de son compartiment, alors que le train s’engageait dans un long tunnel o`u les travaux effectu'es obligeaient le convoi `a ralentir. Sans trop de difficult'es, H'el`ene, qui, d’ailleurs, au Natal, avait pris l’habitude des exercices physiques, se laissait glisser comme le lui recommandait Fandor, sur les tampons d’attelage. Fandor, maintenant, examinait autant qu’il le pouvait les dispositions du tunnel.

— Il est tr`es long, expliqua-t-il `a la jeune fille, il se termine par une gare, mais nous t^acherons de sortir par la prise d’air qu’il y a au milieu, car, `a l’autre extr'emit'e, je sais qu’il y a des ouvriers qui pr'eviennent les trains des travaux. Et maintenant, attention, nous allons sauter.

Il prenait la jeune fille sous le bras, il la maintenait solidement.

— Vous vous pencherez dans le sens contraire `a la marche. Vous n’avez pas peur ?

— Je n’ai pas peur, r'epondit H'el`ene.

— Vous ^etes vaillante, ma ch'erie. Eh bien, nous sauterons `a trois. Je compte : un, deux…

`A trois, ils s’'elanc`erent dans le vide.

Heureusement, Fandor avait merveilleusement choisi son moment. Le train, en effet, ainsi qu’il l’avait pr'evu, marchait `a toute petite allure en raison des r'eparations effectu'ees sur la voie. J'er^ome Fandor et H'el`ene 'evit`erent heureusement d’^etre jet'es sous les roues du convoi. Ils roul`erent bien sur le sol, mais leur chute ne fut pas trop terrible :

— Vous n’avez rien ? cria Fandor.

— Rien du tout, r'epondit H'el`ene.

Et, en m^eme temps, avec une gaminerie d'elicieuse, elle se redressa, elle jeta dans le noir du tunnel o`u les lumi`eres rouges du train s’'eloignaient, un grand cri, un cri de d'elivrance :

— Vive la libert'e !

***

Vingt minutes plus tard, apr`es avoir 'eprouv'e la joie la plus folle au moment o`u il faisait 'evader H'el`ene, J'er^ome Fandor 'etait en proie au plus stupide 'etonnement, et `a la plus morne inqui'etude.

Il se trouvait toujours dans le tunnel o`u l’'evasion s’'etait produite, mais il s’y trouvait seul. H'el`ene n’'etait plus l`a. H'el`ene, en quelque sorte, avait myst'erieusement disparu sous ses yeux, sans qu’il p^ut rien faire pour la rejoindre.

Ayant repris leur marche, en effet, le journaliste et la jeune fille avaient rapidement atteint la prise d’air sur laquelle Fandor comptait pour sortir du tunnel sans ^etre oblig'e de passer par l’une de ses extr'emit'es, qui 'etait dangereusement gard'ee, l’une par la gare, l’autre par les ouvriers charg'es d’avertir les trains. Malheureusement, la prise d’air qui devait permettre au journaliste et `a sa fianc'ee, de s’'evader d'efinitivement, 'etait constitu'ee par une sorte de chemin'ee d'ebouchant probablement en pleine montagne, et creus'ee dans la vo^ute du tunnel qu’elle percait presque `a son sommet.

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