La fille de Fant?mas (Дочь Фантомаса)
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Il ouvrit alors les yeux, il distingua dans la p'enombre trois ^etres noirs qui sautaient, dont l’un bondissait sur sa table, dont l’autre tr'epignait sur son lit, dont le dernier, dans une course circulaire sur le plancher, renversait les chaises, dispersait les v^etements, le tout en poussant des grognements 'epouvantables.
Et c’est alors que Jupiter sauta hors de son lit.
Il cria au secours.
Comme si sa voix avait excit'e les myst'erieux visiteurs, ceux-ci s’'etaient pr'ecipit'es vers lui en poussant des cris atroces.
Jupiter, bouscul'e, chancela, renversa le lit. Et ce fut le signal d’une sc`ene horrible.
Le point d’appui qu’il cherchait lui avait fait d'efaut, Jupiter s’'etala de tout son long sur le plancher en poussant des cris :
— Li ^etre des diables…
Il criait et les chiens s’'enervaient, se disputaient, sautaient, bondissaient. Jupiter s’'etant d'ep^etr'e tant bien que mal de sa paillasse et des couvertures qui l’avaient `a moiti'e enseveli dans leur 'ecroulement, se trouva soudain nez `a nez avec ses agresseurs :
— Li ^etre pas des diables, fit-il, en soufflant un peu, li ^etre des chiens.
C’'etaient en effet les trois grands chiens du myst'erieux cavalier – qui avaient bondi `a l’int'erieur de la case et r'eveill'e le bon Jupiter. Par bonheur ces chiens n’'etaient pas f'eroces. Jupiter qui venait d’enfiler un pantalon, constata qu’ils avaient l’air de se disputer quelque chose. Et soudain sa face s’'eclaira : un farceur lui avait jou'e un mauvais tour. Mais qui pouvait ^etre ce farceur ? Jupiter acheva de s’habiller, puis courut `a la porte de sa case.
— Hello, cria-t-il, qui ^etre l`a ? qui s’avoir moqu'e de Jupiter ?…
Une voix avait r'epondu :
— Par ici, Jupiter, par le sentier creux.
— Toi, ^etre un farceur, mais moi attraperai toi et moi te tirer les oreilles ensuite.
Et il 'etait beaucoup plus pr`es de rire que de se f^acher. Jupiter d’ailleurs, `a un rayon de lune, apercevait le sol du sentier. Il avait plu peu avant et des traces fra^iches y apparaissaient. Des traces de fers de cheval…
Jupiter en concut une violente col`ere…
— Toi ^etre `a cheval et moi `a pied.
Mais il n’en continua pas moins `a courir. Jupiter, quelques instants apr`es courait m^eme `a perdre haleine, coudes au corps, t^ete basse, comme pris d’une terreur subite. Le noir, en effet, n’'etait pas rassur'e. L’aventure se compliquait. Voil`a qu’un nouveau coup de sifflet avait retenti dans la nuit, un coup de sifflet, auquel des aboiements avaient r'epondu. Jupiter qui tout d’abord n’avait imagin'e qu’une tr`es anodine plaisanterie, avait 'et'e fort effray'e de voir arriver, galopant vers lui et suivant le sentier creux, les trois chiens qu’il avait laiss'es dans sa case, en train de massacrer son mobilier.
Or, Jupiter, sans qu’il e^ut besoin de r'efl'echir longtemps, avait imm'ediatement compris la situation. Il 'etait entre les chiens et leur ma^itre. Il 'etait dans un sentier encaiss'e o`u il avait juste la place de passer par endroits. Si les chiens voulaient le devancer, ils allaient infailliblement le renverser, le pi'etiner, le mordre peut-^etre.
Pour 'eviter semblable aventure, il d'etalait de toute la vitesse dont il 'etait capable. Le noir par bonheur, avait une certaine avance sur ses poursuivants. Il atteignit bient^ot la sortie du sentier, il d'eboucha sur la plateforme constituant le promontoire entour'e par la mer…
— Ouf, fit-il.
Mais sentant les chiens sur ses talons, il n’en continua pas moins d’avancer.
Or, comme le noir avait parcouru une centaine de m`etres, voil`a qu’une d'ecouverte ahurissante le laissait immobile, muet de stup'efaction, clou'e sur le sol, e^ut-on dit… De l’endroit o`u il 'etait arriv'e, Jupiter pouvait apercevoir la totalit'e ou presque du petit cap…
Jupiter 'etait persuad'e que l`a enfin il allait rejoindre celui qui lui avait jou'e la sotte plaisanterie dont il 'etait victime, mais un coup d’oeil lui avait permis de se rendre compte qu’aucun ^etre humain ne se trouvait sur le promontoire. En revanche, quelque chose s’y voyait qu’`a coup s^ur le noir ne s’attendait pas `a trouver.
— Qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire ?
Et c’est `a pas pr'ecautionneux que Jupiter s’approcha d’une lanterne. Oui, d’une lanterne toute allum'ee, pos'ee sur le sol et qu’il venait de d'ecouvrir. Jupiter n’'etait plus qu’`a quelques m`etres de la myst'erieuse lumi`ere, quand soudain il s’arr^eta, se retourna :
— Et les chiens, fit-il, o`u li ^etre ?
Les chiens d'ebouchaient du sentier. Jupiter pensa fuir plus loin, mais `a ce moment un nouveau coup de sifflet retentit et apr`es avoir marqu'e un temps d’h'esitation, les braves b^etes, d’un seul mouvement, abandonnaient la poursuite du noir, pour bondir `a travers les rochers et dispara^itre dans la nuit.
— Moi, pas comprendre. Pas comprendre du tout, murmura Jupiter qui, haletant encore, essouffl'e par sa course rapide, sentait ses jambes vaciller sous lui…
Et, d'ebarrass'e des chiens, il recommenca de s’avancer vers la lanterne. Le brave noir fit quelques pas, puis, soudain lanca un v'eritable gloussement de joie…
Jupiter venait d’apercevoir, pos'e sur le sol, pr`es d’elle, dans la lueur jaune de ses rayons un portefeuille, un portefeuille rouge. Que contenait-il ? Jupiter avidement ramassa la pochette, l’ouvrit et roula des yeux joyeux et effar'es. De ce portefeuille il venait de tirer toute une liasse de billets de banque.
De longues minutes durant, Jupiter demeura immobile, ahuri, cherchant `a rassembler ses id'ees. Les chiens… le cavalier… les sifflets… la lanterne… les billets de banque… tout cela lui tourbillonnait dans l’esprit. Et puis il comprit…
Et pris d’une envie imp'erieuse de manifester son contentement devant ce coup du sort qui lui permettait de rentrer ainsi, `a une heure o`u il ne s’y attendait certes pas, en possession de la petite fortune dont il avait 'et'e d'epouill'e, Jupiter dansa une gigue effr'en'ee.
***
— On ne passe pas.
— Moi, pas pouvoir passer ?
— Non, je vous dis qu’on ne passe pas.
— Mais pourquoi ? Moi ^etre Jupiter, le noir…
— Oui, oui, ca va bien. Vous ^etes l’homme qui s’est sauv'e du bateau.
— Moi, m’^etre sauv'e du bateau ?
— Allons, allons, fais pas l’imb'ecile. Si tu avances d’un pas, mes hommes tirent sur toi, c’est compris ?… vous autres en joue…
Il 'etait d'ecid'ement 'ecrit, sur les tables que le malheureux Jupiter n’aurait pas une minute de paix.