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ЖАНРЫ

La mort de Juve (Смерть Жюва)
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— Qui donc ?

— Les Pieds-Crott'es.

— Ils sont encore l`a ?

— Mais oui, monsieur.

— Et qu’est-ce qu’ils font ?

— Ils sont couch'es sur le tapis de monsieur, ils salissent le plus qu’ils peuvent et ils fouinent partout.

— Passez-moi mon pyjama, Baptiste, je vais aller leur dire deux mots.

Ceux que Baptiste avait qualifi'es irrespectueusement de « Pieds-Crott'es » 'etaient en r'ealit'e deux hommes assez correctement habill'es, sinon 'el'egants, qui se trouvaient dans la pi`ece, `a plat ventre sur le tapis, l’oreille coll'ee au sol et semblant 'ecouter.

— Encore vous, messieurs ? dit Martel.

Les deux hommes s’'etaient relev'es en faisant de grands gestes pour lui recommander le silence.

— Venez dans le corridor.

— Chut.

— Eh bien, avez-vous trouv'e quelque chose ?

— Peut-^etre.

— Car je vous pr'eviens que si vous n’avez rien trouv'e ce matin, j’aime mieux ne rien apprendre du tout et ^etre tranquille.

Les deux hommes 'echang`erent un regard navr'e, semblaient se consulter du regard, puis, le plus ^ag'e d’entre eux prit la parole, comme `a contrecoeur.

— Monsieur, nous vous demanderons encore trois jours de patience. Diable. Cela vaut la peine. Vous avez perdu dix mille francs de titres. On a tout boulevers'e chez vous. Puis on vous a encore vol'e cent billets de mille francs. Vous ne pouvez pas nous refuser encore trois jours ?

— Messieurs, commenca le courtier, lorsqu’il y a huit jours, en d'esespoir de cause, je me suis adress'e `a la Pr'efecture pour demander deux inspecteurs, M. Havard m’a assur'e qu’on chercherait le voleur avec tact, discr'etion et c'el'erit'e. Je ne dis pas que vous ayez commis une grosse gaffe. Je constate n'eanmoins que voici huit jours sans r'esultats, huit jours entiers que vous passez `a vous tra^iner sur mon tapis, `a regarder mes meubles par en dessous, et cela sans que l’enqu^ete ait progress'e d’un pas.

— Nous nous trouvons, monsieur, en pr'esence d’un ph'enom`ene extraordinaire.

— Je ne dis pas le contraire. Je le crois m^eme si extraordinaire que je suis persuad'e que vous n’y comprendrez jamais rien. Vous me demandez trois jours de patience ? Soit. Mais que dans trois jours, cette com'edie soit finie, ou alors, bonsoir ! J’aime mieux d'em'enager et renoncer `a conna^itre le myst`ere de mon appartement.

Il dit, et laissa les policiers.

Rest'es seuls, les deux hommes sourirent.

— Je crois, monsieur L'eon, dit le premier, que les choses vont se g^ater.

— Qu’est-ce que cela peut faire, Michel, lui r'epondit son compagnon, avant trois jours nous serons renseign'es.

Et les deux inspecteurs regagn`erent le cabinet de travail o`u ils recommenc`erent `a faire la planche sur la carpette, et `a se tra^iner comme le font les pinsons de pierre en pierre, d’un meuble `a l’autre.

Il serait d'eloyal de dissimuler que l’avant-veille seulement, L'eon et Michel avaient rendu visite `a l’excellent Juve. Au Roi des Policiers, ils avaient confi'e leur extr^eme embarras, et c’est, semble-t-il en vertu des conseils, de leur ancien chef, qu’`a pr'esent, ils se livraient aux bizarres manoeuvres qui indisposaient le ma^itre de maison et son personnel.

Toutefois, alors que jusqu’ici, les deux inspecteurs avaient travaill'e dans le doute, `a pr'esent ils 'echangeaient des regards radieux.

Au moment o`u on les saisit, L'eon est `a plat ventre, la t^ete engag'ee sous le canap'e du coin. Quant `a Michel, sur le dos, il dispara^it sous la biblioth`eque. Suit un 'echange de signes de sourds-muets, et ils finissent par sortir encore une fois :

— Vous avez entendu, L'eon, ca ne va pas tra^iner.

— Oui, Michel, ca ronfle, ca ronfle. Quand m^eme, ce Juve quel homme, faut-il qu’il soit fort pour avoir tout compris, sans rien voir, de son lit.

Ils causaient encore quand Herv'e Martel apparut, habill'e cette fois :

— Alors, messieurs, nous nous livrons `a la m^eme com'edie que chaque matin ? Quelles paroles ridicules dois-je prononcer ?

L'eon sourit. Michel protesta :

— Croyez bien, monsieur Martel, que ce ne sont pas des paroles si ridicules que ca. D’ailleurs, mon coll`egue et moi, nous sommes maintenant persuad'es que d’ici quelques heures, nous vous expliquerons tout ce qui peut vous intriguer.

— J’en accepte l’augure. Que dois-je dire ?

— Exactement la m^eme chose qu’hier.

Herv'e Martel, l’air r'esign'e, pr'ec'eda les deux inspecteurs dans son cabinet de travail. Il alla s’asseoir `a son bureau. Il parla, feignant de s’adresser `a sa dactylographe, M lle H'el`ene absente d’ailleurs.

— Bonjour, mademoiselle. Oui, je vais bien. Ah, nous ne travaillerons pas ce matin. Je vais tout bonnement vous donner des exp'editions `a faire. Faites-y bien attention, par exemple. Je ne tiens pas `a perdre encore de l’argent. Depuis quelque temps, j’ai vraiment trop de malheur.

Herv'e Martel s’interrompit, haussa les 'epaules, et regarda dans les yeux L'eon, qui, tr`es calme, montre en main, chronom'etrait la dur'ee.

L'eon fit un signe. Le courtier recommencait :

— Vous affranchirez ces lettres, mademoiselle. Les voil`a sign'ees. Bien. Autre chose, maintenant. Je vais vous donner dix billets de mille francs que vous porterez cet apr`es-midi, au bureau, place de la Bourse. Attendez une seconde.

Gardant toujours un air r'esign'e, un air de contrainte, Herv'e Martel tirait de sa poche son trousseau de clefs, ouvrait, `a grands fracas, le tiroir-caisse de son bureau et il y prenait, li'es ensemble par une 'epingle, dix morceaux de papier blanc de la grandeur et de l’'epaisseur d’un billet de banque :

— Voici ces dix billets de mille, mademoiselle, je les pose sur l’'etag`ere, vous les prendrez tout `a l’heure. Venez s’il vous pla^it au salon avec moi, je vais vous montrer les gravures qu’il faudra remettre `a l’encadreur car je vais sortir et vous resterez seule ici.

Herv'e Martel se leva, sortit encore une fois du cabinet de travail, L'eon et Michel le rejoignirent dans la galerie.

— Vous ^etes satisfaits, messieurs ? Vous n’avez plus besoin de moi ? J’ai bien fait le pitre. Oui ? Alors tout est pour le mieux. Et maintenant bonne chance. Je souhaite que les dix billets de mille francs vous mettent sur la piste. Mais je vous avoue que j’en doute. J’ai comme une id'ee que c’est un homme intelligent, et que votre pi`ege est un peu grossier.

Herv'e Martel, apr`es un petit salut, abandonna les deux inspecteurs, prit son chapeau et sortit.

Depuis qu’ils enqu^etaient au sujet des vols incompr'ehensibles, L'eon et Michel contraignaient Herv'e Martel chaque matin, `a jouer la m^eme com'edie. Instruit par eux, Herv'e Martel prononcait des phrases caract'eristiques :

— Mademoiselle, voici dix mille francs que je mets sur cette table.

— Mademoiselle, vous exp'edierez ces titres de rente, que je pose sur la chemin'ee `a l’adresse de mon agent de change.

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