Le mariage de Fant?mas (Свадьба Фантомаса)
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Fant^omas, en outre, avait commis une autre imprudence. Il avait dit tr`es haut son adresse au m'ecanicien de l’automobile et cette adresse, quelqu’un l’avait retenue, quelqu’un qui aussi s’'etait attach'e `a ses pas `a partir du moment o`u le bandit et sa compagne avaient pr'ecipitamment quitt'e l’attroupement du pont Caulaincourt. Cette personne-l`a, c’'etait Delphine Fargeaux. La jeune femme, au moment o`u le courtier Coquard l’entra^inait, avait eu la stup'efaction de voir s’enfuir tout d’abord la Recuerda avec le baron Stolberg, puis Delphine Fargeaux apercevait aussi quelqu’un dont elle identifiait parfaitement la personnalit'e. Quelqu’un qu’elle voyait s’agripper aux ressorts de l’automobile du baron Stolberg. Quelqu’un que Delphine reconnaissait pour ^etre Backefelder dont elle avait fait la connaissance dans de si tragiques circonstances au ch^ateau de Garros.
Delphine Fargeaux, 'etait tellement pr'eoccup'ee par tous ces myst`eres qu’elle se jura ce soir-l`a, d’avoir la clef de l’'enigme.
Bravement, apr`es avoir 'econduit Coquard qui ne comprenait rien `a son attitude, elle 'etait partie `a pied, en pleine nuit, pour le boulevard Malesherbes. Devant la maison silencieuse, la jeune femme 'etait rest'ee, plus patiente que Backefelder. Elle avait attendu et ses esp'erances n’avaient pas 'et'e d'ecues, car `a l’aube, elle voyait sortir de la demeure du baron Stolberg sa rivale : la Recuerda.
Celle-ci trouvait un fiacre, et Delphine Fargeaux en prit un autre. Les deux v'ehicules arriv`erent rue Saint-Ferdinand. Delphine arr^eta sa voiture. Elle comprenait que la Recuerda se rendait chez Backefelder.
Qu’allait-elle donc y faire ? Delphine la laissait entrer, puis, fort tranquille pour observer tout ce qu’elle voulait, car la rue `a cette heure matinale, 'etait absolument d'eserte, elle se rapprochait peu `a peu de la maison de Backefelder. Les persiennes 'etaient ferm'ees, mais `a l’int'erieur, l’Am'ericain avait oubli'e de tirer les rideaux, et ayant fait la lumi`ere lorsque la Recuerda 'etait arriv'ee, la pi`ece 'etait 'eclair'ee et de l’ext'erieur, par les interstices du volet, on pouvait parfaitement voir ce qui s’y passait.
Surprise d’abord par l’attitude des deux amants, qu’elle ne pouvait pas comprendre, Delphine Fargeaux s’'emut du ton tragique que semblait prendre la discussion ; elle voyait Backefelder parler autoritairement `a sa ma^itresse, puis, tandis qu’il s’approchait du t'el'ephone, celle-ci tirait un poignard de son corsage et coupait le fil de communication. Puis, d`es lors, devant les yeux terrifi'es de Delphine, se d'eroula le drame rapide mais effroyable. Backefelder rouge de col`ere se pr'ecipitait sur sa ma^itresse.
— Il va la tuer, pensa Delphine, qui ferma les yeux. Mais lorsqu’elle les ouvrit, elle poussait un long hurlement de terreur. Une seconde s’'etait 'ecoul'ee, elle voyait Backefelder 'etendu sur le sol, un poignard enfonc'e jusqu’`a la garde dans la poitrine, cependant que blafarde, agenouill'ee pr`es de lui, la Recuerda regardait la mort face `a face.
Affol'ee, Delphine prit la fuite. Courant comme une folle, elle alla, elle alla longtemps, sans se rendre compte du chemin qu’elle faisait, sans souci des quolibets qu’elle s’attirait au passage lorsque par hasard elle 'etait rencontr'ee par des ouvriers lev'es de bonne heure, des gens se rendant `a un travail matinal.
Delphine 'etait all'ee ainsi jusqu’au bord de la Seine, et, arr^et'ee sur le parapet d’un pont, elle consid'era distraitement les ondes glauques que roulait le fleuve.
Mais, soudain, Delphine Fargeaux, r'eagit. Elle serra les poings et son doux visage prit une expression de rude 'energie.
— Cette femme, murmura-t-elle, est un monstre, elle a tu'e, elle tuera encore.
Et Delphine songeait, 'emue, que peut-^etre l’effroyable sort de Backefelder, quelqu’un d’autre risquait de le subir, et quelqu’un dont Delphine voulait `a tout prix prot'eger l’existence, car elle l’aimait, quelqu’un qui n’'etait autre que le baron Stolberg.
22 – LE GUET-APENS
— Monsieur le ministre, je ne vous remercie pas de votre bienveillance, de la h^ate que vous avez mis `a m’accorder ce que je vous demandais, car j’imagine qu’aucun doute ne peut vous rester relativement `a l’innocence de mon prot'eg'e : J'er^ome Fandor. Toutefois, je vous prie de croire, monsieur le ministre, que je vous aurai une reconnaissance 'eternelle.
— Mais laissez donc, mon bon Dupont, laissez donc, c’est la moindre des choses.
Dupont de l’Aube s’inclina en une r'ev'erence protocolaire et sortit du cabinet du ministre des Affaires 'Etrang`eres.
L’ambassadeur officieux de France en Espagne 'etait rayonnant. Il respirait profond'ement, `a deux reprises diff'erentes et semblait 'eprouver une joie profonde, puis d'elib'er'ement, il tourna sur le boulevard et se h^ata vers un bureau de poste voisin.
Dupont de l’Aube, depuis deux heures, entretenait le ministre de la terrible situation o`u se trouvait J'er^ome Fandor. Il avait eu quelque peine `a le convaincre, d’abord, des aventures du jeune homme, mais il s’'etait montr'e si bon avocat, il avait si bien plaid'e la cause de l’ami de Juve, qu’il avait emport'e la conviction de son interlocuteur.
Et alors, un entretien t'el'egraphique, suivi bient^ot d’un entretien t'el'ephonique s’'etait engag'e imm'ediatement entre le minist`ere des Affaires 'Etrang`eres de France et le minist`ere de la Justice d’Espagne.
En une demi-heure, l’extradition de Fandor avait 'et'e obtenue. Le ministre des Affaires 'Etrang`eres avait remis `a Dupont de l’Aube un brevet d^ument sign'e et paraph'e qui l’autorisait `a aller chercher `a la prison de Madrid, o`u Fandor devait ^etre transf'er'e, le condamn'e `a mort. Une fois extrad'e, on verrait `a obtenir la r'evision du proc`es et l’acquittement d'efinitif du jeune homme. C’'etait ce brevet d’extradition que Dupont de l’Aube, instinctivement presque, froissait dans sa poche avec une nervosit'e croissante.
— J’ai h^ate, se r'ep'etait le directeur de La Capitale, j’ai h^ate maintenant d’^etre `a Madrid et d’aller tirer Fandor des mains de ces m'echants moines.
Malgr'e son empressement, Dupont de l’Aube, cependant, p'en'etrait dans le premier bureau de poste qu’il rencontrait au passage :
— Donnez-moi le 2036-00.
Quelques instants plus tard, Dupont de l’Aube, entr'e dans l’une des petites cabines t'el'ephoniques, communiquait avec Juve.
— All^o, c’est Dupont de l’Aube qui vous parle. All^o, vous m’entendez, Juve ?
— Oui. Eh bien ?
La voix de Juve 'etait angoiss'ee, tremblante. Mis au courant des aventures de Fandor, par un coup de t'el'ephone de Dupont de l’Aube, arriv'e deux heures plus t^ot, Juve attendait avec une impatience extr^eme le r'esultat de la visite que l’homme politique venait de faire au minist`ere.
— Eh bien, tout est arrang'e, r'epondait Dupont de l’Aube. Ne vous faites pas de mauvais sang, j’ai le brevet d’extradition en poche, l’ambassade de Paris a 'et'e parfaite et dans quarante-huit heures, J'er^ome Fandor sera libre.