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ЖАНРЫ

L'agent secret (Секретный агент)
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Il s’'eveilla tout `a fait cependant. Il ne pouvait plus se faire illusion sur la n'ecessit'e prochaine qui l’obligerait `a se lever.

Fandor s’assit, puis soudain se recoucha, fermant les yeux, mais cette fois non plus par sommeil, mais afin de se recueillir…

— Caporal Vinson, avait appel'e l’adjudant deux jours avant, vous avez une permission de huit jours… Vous pourrez quitter la caserne demain `a midi…

Tant de fois d'ej`a, Fandor avait recu d’une facon aussi impr'evue des permissions qu’il n’avait nullement sollicit'ees qu’il n’en 'etait plus `a s’'etonner de la chose.

— Merci, mon lieutenant !…

Fandor avait r'epondu d’un ton machinal, puis attendait impatiemment l’arriv'ee du vaguemestre qui, sans aucun doute, lui apporterait une carte postale lui donnant un myst'erieux rendez-vous avec les espions pour le compte desquels il 'etait cens'e d’agir.

Or, ce n’'etait point une carte postale, mais bel et bien une lettre que lui avait remis le sergent faisant office de vaguemestre.

Fandor avait ouvert l’enveloppe f'ebrilement et tout d’abord n’avait pu s’emp^echer de tressaillir en constatant le style, pour le moins inf'erieur, de cette 'ep^itre.

La lettre commencait par ces mots :

« Mon bon ch'eri

».

— Ah ca ! pensait le jeune homme, voil`a que je deviens tout `a fait « Pitou », puisque je recois des lettres d’amour…

C’'etait, en effet, un billet doux que l’on venait de lui remettre.

La correspondante myst'erieuse disait :

« Il y a longtemps que je ne t’ai vu, mais puisque tu vas avoir une permission de huit jours, je pourrai `a loisir me d'edommager de ton absence. Veux-tu que nous prenions rendez-vous pour la premi`ere matin'ee de ton arriv'ee `a Paris ? Je pense que tu descendras, comme d’habitude, boulevard Barb`es, `a l’H^otel de l’Arm'ee et de la Marine ? Moi, tu me trouveras `a onze heures et demie tr`es exactement rue de Rivoli, au coin de la rue Castiglione. Nous pourrons d'ejeuner ensemble. `A bient^ot. Je t’envoie tous mes baisers. »

Et Fandor ayant lu cette lettre `a la signature illisible, en comprenait le sens cach'e :

Les chefs espions lui annoncaient qu’il allait avoir une permission de huit jours – parbleu, l’adjudant le lui avait dit la veille au soir —, qu’il lui fallait descendre `a Paris, boulevard Barb`es, `a l’ H^otel de l’arm'ee et de la Marine, et qu’enfin on lui donnait rendez-vous rue de Rivoli ! Il s’agissait 'evidemment de remettre le plan du d'ebouchoir qu’il avait promis… sans la moindre h'esitation, 'etant bien d'ecid'e `a ne fournir qu’un dessin fantaisiste.

— Allons-y ! avait murmur'e le faux caporal Vinson, peut-^etre, `a Paris, vais-je enfin me trouver devant des t^etes de connaissance ?

Et Vinson-Fandor avait fid`element suivi le programme qu’on lui tracait.

L’excellent journaliste J'er^ome Fandor, qui avait dans son esprit repass'e tous ces d'etails, qui, de plus, avait en quelque sorte 'etudi'e, pr'epar'e d’avance le r^ole qu’il comptait jouer ce matin-l`a, se levait, s’habillait en h^ate.

— Vais-je me mettre en uniforme ? Non ! laissons cela, c’est dangereux et sans int'er^et. Apr`es tout, je ne sais pas en face de qui je vais me trouver ce matin, et je dois toujours me m'efier d’un pi`ege de contre-espionnage… Une id'ee, m^eme : non seulement je vais aller `a ce rendez-vous en civil, mais encore je vais m’y rendre en Fandor d'egrim'e… 'Evidemment, cela me fera rater mon rendez-vous, mais mes individus ne se d'ecourageront pas pour si peu. Il ont mon adresse `a cet h^otel, ils m’'ecriront un nouveau rendez-vous, o`u j’irai cette fois en caporal Vinson, si la chose me semble convenable…

Il prit un fiacre qui le conduisit au pied de la colonne Vend^ome.

Fandor venait de quitter son cocher et s’engageait sous les arcades de la rue de Rivoli lorsqu’il remarqua au loin une passante qui marchait dans sa direction, et dont la silhouette ne lui 'etait pas inconnue.

— Ma parole, fit le jeune homme ; elle est bien bonne ! je ne me trompe pas ?

La passante approchait de plus en plus ; Fandor ne r'esistait point `a la curiosit'e de la rencontre ; il se laissait voir, saluait d’un grand coup de chapeau :

— Mademoiselle Berthe !… mademoiselle Berthe !…

Toute saisie, la jeune femme s’arr^etait :

— Ah ! monsieur Fandor ! Comment allez-vous ?…

— Fort bien… mais moi, je ne vous demande pas de vos nouvelles, mademoiselle, la fra^icheur de votre teint me r'epond d’avance !…

Bobinette esquissait un petit sourire, puis s’informait :

— Comment donc ^etes-vous l`a ?

J'er^ome Fandor n’avait garde d’h'esiter.

— Dame ! mademoiselle, comme vous y ^etes vous-m^eme… je passais sous les arcades…

C’'etait `a Bobinette de s’excuser :

— Oh ! ce n’est point ce que je voulais dire, monsieur ! Je vous demande comment il se faisait qu’'etant `a Paris, vous ne soyez jamais revenu voir M. de Naarboveck, qui cependant vous avait invit'e `a passer de temps en temps prendre le th'e `a la maison ?

— Je viens en effet de rentrer `a Paris, mademoiselle… Tout le monde va bien chez M. de Naarboveck ?… M lleWilhelmine est remise de ses 'emotions ?

— Oh ! oui, monsieur.

Fandor e^ut bien voulu poser d’autres questions et tout sp'ecialement savoir si elle, la jolie Bobinette, pensait encore au capitaine Brocq, il e^ut bien voulu 'eclaircir l’exacte intimit'e que la jeune femme avait eue avec l’officier disparu, l’amour qu’il lui supposait pour Loubersac, mais il 'etait 'evident que la jeune fille 'etait g^en'ee par cette conversation en plein vent.

Il n’'etait d’ailleurs point correct de l’'eterniser, et bon gr'e mal gr'e, apr`es quelques paroles, Fandor se r'esigna `a dire adieu `a la jolie fille.

Tandis que celle-ci s’'eloignait, le journaliste, recommencant `a faire les cent pas, v'erifia l’heure. Il 'etait maintenant midi moins le quart, les passants se faisaient rares ; Fandor ne croisait personne qui lui par^ut digne d’attention… Impatiemment, le jeune homme attendit encore cinq minutes, dix minutes, mais, `a une heure, il se d'ecida `a regagner son h^otel…

— Qu’est-ce que cela veut dire ? pensa-t-il. Dois-je croire que personne n’est venu attendre le caporal Vinson, ou tout bonnement que, devant avoir affaire `a de nouvelles t^etes, je n’ai point identifi'e mes individus tandis qu’eux, bien entendu, sont repartis, n’apercevant pas plus de caporal que de beurre en branche…

En arrivant boulevard Barb`es, Fandor trouvait un pneumatique adress'e au caporal Vinson. Il l’ouvrit : ce pneumatique n’'etait pas sign'e, il imitait toujours l’'ecriture et le style d’une amoureuse.

On lui disait :

« Mon bon ch'eri, mon amour, excuse-moi de ne pas ^etre venu te prendre ce matin rue de Rivoli, comme il 'etait convenu. Cela m’a 'et'e impossible. Reviens `a deux heures au m^eme endroit, je te promets que je serai exacte… Bien entendu, viens en uniforme, je veux voir comme tu es beau sous l’habit militaire…

»

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