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ЖАНРЫ

L'agent secret (Секретный агент)
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— Ou alors, peut-^etre, monsieur Fandor, c’est-y que vous avez l’intention de changer de femme de m'enage `a votre retour ? pourtant…

— Vous ^etes folle, madame Ang'elique ! voil`a au moins vingt fois que je vous r'ep`ete : je pars en vacances pour une quinzaine de jours. Un point c’est tout. Jamais il ne m’est venu `a l’id'ee de me s'eparer de vous, bien au contraire, je suis enchant'e de vos services… Tenez… je passerai par Monaco… je m’engage `a mettre cinq francs pour vous sur la rouge :

— Sur la rouge ?

— Sur la rouge… oui, c’est un jeu et si cela gagne je vous ferai cadeau du b'en'efice…, madame Ang'elique, d'ep^echez-vous d’aller me chercher ma culotte…

Le journaliste s’arr^eta, rit d’un large rire satisfait. L’avait-il d'esir'e ce cong'e qu’il allait enfin prendre apr`es vingt-deux mois de labeur ininterrompu. Vingt-deux mois pendant lesquels, en sa qualit'e de reporter charg'e de la grande information `a La Capitale, il n’avait pour ainsi dire, pas pass'e une journ'ee, sans avoir quelque d'eplacement `a faire, quelque aventure `a d'ebrouiller, voire m^eme quelque criminel `a poursuivre. Au surplus, sa profession l’int'eressait prodigieusement… Son apprentissage de reporter 'etait `a peine commenc'e qu’il se trouvait, par suite des circonstances, m^el'e `a diverses affaires myst'erieuses qui avaient eu le plus grand retentissement dans le public. Il avait b'en'efici'e, `a son entr'ee dans la carri`ere d'elicate du journalisme, de l’appui pr'ecieux du policier Juve. Et ainsi J'er^ome Fandor dans beaucoup de circonstances ne s’'etait pas content'e d’^etre le t'emoin impassible des 'ev'enements plus ou moins dramatiques dont il avait `a faire l’histoire. Fandor, volontairement ou non, avait 'et'e m^el'e – ces derni`eres ann'ees surtout – aux crimes les plus sensationnels, aux affaires les plus myst'erieuses, y jouant, par suite du hasard ou de sa volont'e, un v'eritable r^ole.

Et puis enfin, et puis surtout, il y avait que J'er^ome Fandor, comme d’ailleurs l’inspecteur Juve, s’'etait `a la fois, glorifi'e ou rendu ridicule, mais en tout cas signal'e `a l’attention publique, par ses combats 'epiques avec la personnalit'e la plus angoissante du si`ecle, l’insaisissable Fant^omas.

Mais J'er^ome Fandor, tout en sifflant le dernier air `a la mode, ne songeait plus `a tout cela :

Son esprit 'etait ailleurs, sa pens'ee, toute joyeuse `a l’id'ee que d’ici quelques heures, profitant enfin d’une permission bien gagn'ee, il s’installerait dans un confortable sleeping et se r'eveillerait le lendemain sur la c^ote d’Azur, parfum'ee, radieuse d’un 'eternel 'et'e. Alors huit cents kilom`etres le s'epareraient des bureaux de La Capitale, des commissariats de police, des bouges aux relents pestilentiels, des perp'etuels mauvais temps, du froid, de l’humidit'e, attributs ordinaires de son existence quotidienne. Au diable tout cela, plus de copie `a faire, plus de gens `a interviewer ; c’'etaient les vacances, les cong'es, la libert'e. Soudain la sonnerie du t'el'ephone… Un instant, J'er^ome Fandor h'esita : allait-il r'epondre ?

En principe, le journaliste

« 'etait parti » depuis la veille au soir.

Mais on ne laisse jamais sonner en vain le t'el'ephone, lorsqu’on est `a m^eme de r'epondre… et puis enfin, c’'etait peut-^etre une erreur ou un ami ? J'er^ome Fandor d'ecrocha le r'ecepteur. Ayant 'ecout'e une seconde, il prit instinctivement une attitude respectueuse comme si son interlocuteur, `a l’autre bout du fil, pouvait le voir.

J'er^ome Fandor, par brefs monosyllabes, r'epondit :

— Oui !… non !.. probablement ! soyez sans crainte !…

Il acheva la conversation par ces mots :

— C’est entendu, `a tout `a l’heure, patron…

Le journaliste en reposant l’appareil changeait de physionomie.

Son visage avait perdu la gaiet'e de l’instant pr'ec'edent : le jeune homme froncait les sourcils, il tirailla nerveusement sa moustache.

— Zut ! vraiment il ne manquait plus que cela !

J'er^ome Fandor venait d’^etre appel'e au t'el'ephone par M. Dupont (de l’Aube), le d'eput'e opportuniste bien connu qui 'etait, en outre, le directeur de La Capitale.

M. Dupont (de l’Aube), adonn'e depuis de longues ann'ees `a la politique et que l’on pr'evoyait comme devant faire un ministre au premier remaniement du Cabinet, s’occupait assez rarement du d'etail de l’information dont il fallait alimenter son journal. Il 'etait directeur de nom et se contentait le plus souvent de r'ediger son 'editorial sans m^eme aller lui-m^eme le porter au journal, laissant la direction de fait et son importante publication `a son gendre qui remplissait les fonctions de r'edacteur en chef.

J'er^ome Fandor avait donc 'et'e fort 'etonn'e, fort surpris, de recevoir un coup de t'el'ephone de celui que, dans la salle de r'edaction, on d'esignait sous le qualificatif de

« Grand Patron ».

Fandor 'etait convoqu'e par lui `a la Chambre, pour trois heures de l’apr`es-midi : le patron voulait lui donner des indications au sujet d’un reportage qui l’int'eressait particuli`erement…

Fandor 'etait intrigu'e, anxieux…

De quoi pouvait-il bien s’agir et comment se faisait-il que M. Dupont (de l’Aube) s’occup^at d'esormais des articles `a faire ?

Et puis Fandor se regimbait, il 'etait en vacances, apr`es tout.

— Bah ! se dit le journaliste, Dupont ignore 'evidemment ces d'etails, je vais aller `a son rendez-vous, je lui expliquerai mon prochain d'epart et c’est bien le diable s’il ne repasse pas son reportage `a un autre de mes coll`egues…

— Madame Ang'elique, dit Fandor, faites-moi vite `a d'ejeuner, puis vous bouclerez ma valise, ce soir je fiche mon camp, co^ute que co^ute.

***

Depuis deux heures, qui lui avaient paru interminables, J'er^ome Fandor, dans la salle des Pas Perdus du Palais-Bourbon, attendait M. Dupont (de l’Aube).

Le d'eput'e 'etait en s'eance. Aux dires des huissiers accoutum'es aux proc'ed'es parlementaires, la discussion menacait de s’'eterniser. J'er^ome Fandor s’'enervait. `A plusieurs reprises il avait eu l’id'ee de filer purement et simplement `a l’anglaise, quitte `a s’excuser ensuite, `a invoquer un malentendu, lorsque huit cents kilom`etres le s'epareraient des foudres directoriales… Mais il 'etait trop scrupuleux journaliste, trop professionnellement honn^ete pour mettre un semblable projet `a ex'ecution. Rongeant son frein, Fandor 'etait rest'e.

Comme pour la cent cinquanti`eme fois, il regardait sa montre, le journaliste se leva soudain et s’empressa vers deux personnes qui d'ebouchaient d’un couloir : c’'etait M. Dupont (de l’Aube) qu’accompagnait un personnage que Fandor reconnut aussit^ot. Le journaliste s’inclina respectueusement devant l’un et l’autre, serra la main cordiale que lui tendait M. Dupont (de l’Aube) qui disait `a son compagnon :

— Mon cher ministre, je vous pr'esente mon jeune collaborateur, J'er^ome Fandor…

— C’est un nom qui ne m’est pas inconnu, avait r'epondu le ministre.

Mais, sollicit'e par d’innombrables occupations, il s’'eclipsa aussit^ot.

Quelques instants apr`es, dans un des petits salons r'eserv'es aux commissions parlementaires, le directeur de La Capitales’entretenait avec son r'edacteur.

— Ce n’est pas, je suppose, mon cher patron, Interrogeait Fandor, pour me pr'esenter au ministre que vous m’avez fait venir ici. `A moins que vous n’ayez l’intention de me faire nommer sous-pr'efet, auquel cas…

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