L'Arrestation de Fant?mas (Арест Фантомаса)
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Un agent `a la solde de l’Angleterre, puis une disparition myst'erieuse. Et quelques minutes plus tard, comme Nikita, tr`es 'emu, se demandait qui pouvait bien ^etre cet 'etranger qui lui avait pr^et'e une 'ep'ee si fragile, il entendit au milieu de la foule une voix qui lui soufflait `a l’oreille.
— Prince, m'efiez-vous de Fant^omas.
***
— Croyez-vous r'eellement qu’il y ait eu tentative d’assassinat ? lui demandait le comte Vladimir Saratov, une heure plus tard. Croyez-vous r'eellement…
— Mon cher comte, je sais parfaitement qu’il s’agit l`a de choses si graves qu’il n’en faut point parler au hasard. Toutefois, ma conviction est absolue : l’homme qui m’a propos'e de recommencer le coup que je discutais avec le pr'ev^ot, qui a incit'e Ellis Marshall `a me servir d’adversaire, qui nous a pr^et'e les deux 'ep'ees, dont l’une s’est cass'ee, comme je vous l’ai dit, et qui ensuite a disparu, que nul ne conna^it `a la salle d’armes en fin de compte, avait pr'epar'e toute l’affaire, avait voulu que je tue Ellis Marshall.
— Mais pourquoi ?
— Mais n’avez-vous pas compris ce que je vous disais tout `a l’heure ? Ellis Marshall avait dans la poche un portefeuille rouge, le portefeuille rouge.
— Et alors ?
— Et alors, comte Vladimir, poursuivait tranquillement le prince Nikita, vous devinez bien que, si par hasard, j’avais atteint ce malheureux Ellis Marshall, il en serait r'esult'e une telle confusion qu’`a coup s^ur l’individu en question aurait pu facilement d'erober ce portefeuille.
— Qui est-ce donc, d’apr`es vous ?
Le lieutenant n’osa r'epondre :
— Je voudrais bien le savoir, se contenta-t-il de r'epondre `a l’ambassadeur extraordinaire.
24 – `A COUPS DE RASOIR
Certains se vantent d’avoir le caract`ere po'etique, de m'epriser les contingences de la vie ordinaire, de s’accommoder de tout, de pouvoir se faire aux pires situations. D’autres, au contraire, passent, impassibles dans la vie, sachant non pas se plier aux circonstances, mais les plier `a leurs besoins. Ellis Marshall 'etait de ces derniers. Le flegmatique Anglais qui, par pur patriotisme et par d'esoeuvrement aussi, 'etait entr'e dans le corps des agents diplomatiques charg'es de s’occuper d’une foule de missions secr`etes propres `a augmenter la gloire intangible de la vieille Angleterre, poss'edait `a un rare degr'e la qualit'e pr'edominante de tous ses compatriotes et qui n’est autre que le sang-froid.
Rien ne le d'erangeait, rien ne l’'emouvait, il 'etait toujours sup'erieur aux 'ev'enements, jamais 'etonn'e. Aussi bien, gr^ace `a ce flegme imperturbable, l`a o`u d’autres se fussent affol'es, l`a o`u ils auraient perdu la t^ete, Ellis Marshall, tout bonnement r'efl'echissait, trouvait une solution.
C'elibataire, Ellis Marshall professait cette th'eorie qu’avant tout l’homme intelligent ne doit jamais s’embarrasser d’un domicile fixe.
Ellis Marshall, cependant, n’habitait pas `a l’h^otel. Partout il se logeait, en vertu d’un principe bien arr^et'e, dans un appartement qu’il meublait `a peu de frais, avec des meubles sommaires et qu’il choisissait dans le voisinage imm'ediat d’un grand h^otel. Il lui suffisait alors de s’entendre avec la direction de l’'etablissement voisin, moyennant une somme qu’il pouvait librement d'ebattre, pour que les domestiques de l’h^otel vinssent `a heure fixe faire son m'enage, entretenir ses affaires et m^eme lui monter ses repas. Il 'etait chez lui et il jouissait de l’organisation commune de l’h^otel. C’'etait, `a son point de vue, la meilleure mani`ere d’^etre compl`etement ind'ependant.
Domptant son 'emotion, il avait rapidement quitt'e la salle d’armes et, pendant que le prince Nikita courait chez le comte Vladimir Saratov pour le mettre au courant de la d'ecouverte qu’il avait faite relativement au portefeuille rouge, l’Anglais, ne se doutant aucunement des remarques du jeune Russe, rentrait chez lui pour changer de veston, et, ainsi qu’il l’avait annonc'e, achever sa toilette, passer un smoking et s’en aller user la soir'ee le plus agr'eablement qu’il le pourrait.
Or, Ellis Marshall, en remontant l’escalier conduisant `a son appartement, entendit grelotter la sonnette de son t'el'ephone.
— Oh, pensa-t-il, sans d’ailleurs se h^ater le moins du monde, car il avait horreur de se presser, voici que quelqu’un voudrait me causer. C’est grand dommage, la communication va ^etre certainement coup'ee avant que je ne sois chez moi.
Il continua `a gravir les 'etages, introduisit la cl'e dans sa serrure, ouvrit sa porte, posa d’un geste qui n’avait rien de pr'ecipit'e son chapeau `a un porte-parapluie, puis enfin se dirigea vers l’appareil t'el'ephonique.
— Allo, s’informa l’Anglais. Que demande-t-on ?…
Au bout de la ligne, une voix d’homme, r'epondit :
— Allo, c’est bien `a M. Ellis Marshall que j’ai l’honneur de parler ?
— `A moi en effet et `a qui ai-je l’avantage ?
— C’est le coiffeur, monsieur Marshall.
Ellis Marshall ouvrit de grands yeux, fort 'etonn'es, ne comprenant gu`ere ce que
« le coiffeur » pouvait lui vouloir.— Que d'esirez-vous ?
— Allo monsieur Marshall, je voulais vous informer que mon garcon Louis, mon garcon ordinaire, est tomb'e malade. Ce qui fait que demain je ne pourrai vous envoyer personne. Voulez-vous m’autoriser `a vous envoyer aujourd’hui un nouveau garcon ? Auriez-vous le temps de le recevoir ce soir ?
Ellis Marshall r'efl'echissait. Il avait coutume, deux fois par semaine, de faire venir chez lui un garcon du perruquier voisin, qui rafra^ichissait sa chevelure, le gratifiait d’une bonne friction et enfin le rasait.
— Aoh, dites `a votre garcon qu’il vienne tout de suite ; justement, je ne serai pas f^ach'e d’^etre ras'e ce soir m^eme.
L’Anglais raccrocha le t'el'ephone, se d'ebarrassa de son col, puis passant `a son cabinet de toilette, commenca `a pr'eparer le smoking qu’il comptait rev^etir quelque temps apr`es le d'epart du garcon coiffeur.
Il y avait quelques minutes d'ej`a qu’Ellis Marshall avait termin'e tous ces pr'eparatifs et qu’il venait de s’'etendre dans un confortable fauteuil, lorsqu’on sonnait `a sa porte :
Ce perruquier avait bien la t^ete la plus « perruqui`ere » qui soit. C’'etait un jeune garcon de vingt-cinq `a trente ans, exag'er'ement chevelu, sentant d’une lieue le parfum `a la rose, pommad'e et peign'e avec un soin extr^eme, la barbe en pointe du plus beau noir et une fine moustache retrouss'ee `a la mousquetaire.
— Isidore Lubin, pour vous servir, monsieur. Isidore Lubin, le garcon coiffeur dont on vous annoncait l’arriv'ee il y a quelques minutes. Oh, oh, vous avez de beaux cheveux.
`A l’exclamation flatteuse d’Isidore Lubin, l’Anglais r'epondit par un haussement d’'epaule :
— Ah oui, dit Marshall, entrez. Vous allez, n’est-ce pas, me tailler les cheveux l'eg`erement, me les rafra^ichir, et apr`es vous me ferez la barbe ?
Tout en parlant, Ellis Marshall, pr'ec'edant le garcon coiffeur, venait de regagner sa chambre `a coucher. Il s’'etait assis sur un fauteuil apr`es s’^etre lui-m^eme envelopp'e d’un grand peignoir. `A sa droite se trouvait une table recouverte d’un linge blanc sur laquelle il avait dispos'e ses peignes, ses brosses, ses rasoirs, tout l’attirail n'ecessaire.