L'assassin de lady Beltham (Убийца леди Бельтам)
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— Qu’est-ce que cette mascarade ? commenca l’un des agents.
Dick, cependant, ayant ramass'e ses autres v^etements et les ayant enfourn'es dans son sac, sortait du taxi-auto et se rendait compte que l’accident venait d’avoir lieu place Clichy.
— Au poste, au poste ! cria le jeune homme. Ne perdons pas de temps, je suis un acteur.
L’agent, `a ce moment, revenait de ses premi`eres suppositions :
— Ma foi, disait-il `a son coll`egue, ca n’est peut-^etre pas un d'ego^utant, c’est un 'echapp'e de Charenton.
Dick, cependant, avait, d’un geste imp'erieux, arr^et'e un taxi-auto :
— Il faut aller au poste, disait-il.
— Parbleu !
— Eh bien, allons-y, et vite !
Au poste de police, par bonheur, Dick tomba sur un secr'etaire r'eellement intelligent et vif.
En deux mots, le jeune homme raconta son aventure, expliqua comment il se faisait qu’au moment o`u sa premi`ere voiture avait 'et'e culbut'ee, il 'etait `a moiti'e nu `a l’int'erieur de son fiacre :
— Monsieur le commissaire, disait Dick, vos agent m’ont trait'e de satyre, mais je ne leur en veux pas. Vous voyez dans quel embarras je me trouve. Tout ce que je vous demande, c’est de me remettre en libert'e le plus vite possible. Je me tiendrai demain apr`es-midi `a votre disposition si cela est n'ecessaire.
Dick avait des pi`eces d’identit'e, le secr'etaire les examina, puis s’inclina :
— Vous ^etes libre, monsieur. Vous ^etes libre. D'ep^echez-vous donc de partir `a votre th'e^atre. Qu’est-ce qu’on joue donc `a Ornano ?
— On joue : Les Amours du Bourreau ou L’Enfant de la Guillotine et je tiens le r^ole de Sanson. Le vous enverrai des places.
Sur cette bonne promesse, une promesse que les acteurs font toujours sans y attacher la moindre importance, car ils n’en tiennent jamais compte, Dick sortit du poste et remonta dans un taxi-auto.
— Au Th'e^atre Ornano, hurla-t-il, `a toute allure.
Et la voiture d'emarra, Dick, enfin, respira.
— Quelle soir'ee, jurait le jeune homme, bon Dieu, c’est `a devenir fou…
Puis, il murmura soudain d’une voix tr`es pr'eoccup'ee, un peu anxieuse :
— Mais tout cela est 'etrange, vraiment, tout cela est bizarre. Ce serait `a croire que…
Il n’acheva pas sa phrase.
Au Th'e^atre Ornano, `a la porte de l’entr'ee des artistes, un figurant accueillit Dick d’une raillerie :
— Eh bien, monsieur Sanson, dit-il, vous voil`a tout de m^eme ? Ne vous pressez pas, vous savez. Non, ne vous pressez pas. Ca pourrait vous faire mal.
Dick ne r'epondit pas. Il monta l’'etroit escalier qui conduisait au plateau, il le monta quatre `a quatre.
24 – LE DERNIER TABLEAU
Cependant, une foule houleuse r'eclamait le lever du rideau. La salle de spectacle 'etait bond'ee. C’'etait un samedi soir, et du rez-de-chauss'ee aux derni`eres galeries, les spectateurs 'etaient press'es les uns contre les autres, car le th'e^atre n’'etait pas tr`es grand et devait contenir beaucoup de monde.
Toutes les places, m^eme les meilleures, 'etaient fort 'etroites.
Tout ce monde-l`a, d’ailleurs, vocif'erait avec un bel ensemble. Depuis vingt minutes d'ej`a la seconde partie du spectacle aurait d^u ^etre commenc'ee, on attendait toujours. Que se passait-il donc ?
Du haut des galeries tombaient des exclamations ironiques, des ordres brutaux.
— Grouillez-vous ! De quoi qu’y retourne ? Au rideau ! Quand c’est qu’on commence ?
Quelques-uns, plus hardis que les autres, et fort au courant sans doute du personnel du th'e^atre, interpellaient directement le personnage qu’ils croyaient responsable de ce retard. Et comme on savait que c’'etait Beaum^ome qui avait pour mission de lever le rideau, des amis connus ou inconnus l’apostrophaient des galeries, en disant :
— C’est-y qu’il a la cosse ? faudrait voir, Beaum^ome, `a en mettre un coup ! Probable qu’il a encore des bras neufs, ce soir !
Ces interjections semaient un peu de gaiet'e dans la salle. Le public bon enfant, comprenant qu’il devait se passer quelque chose d’anormal dans les coulisses, fit quelques instants de silence, puis le tapage reprit de plus belle.
La client`ele du Th'e^atre Ornano 'etait tr`es m^el'ee. `A c^ot'e de petits commercants, on apercevait des figures farouches d’apaches et de pierreuses. Et tout ce monde-l`a, qui cependant ne frayait jamais ensemble dans la vie courante, au th'e^atre liait connaissance, se faisait des amabilit'es.
Quelques personnages qui, au d'ebut de la soir'ee 'etaient pass'es les uns `a c^ot'e des autres sans avoir l’air de se conna^itre, paraissaient peu `a peu s’enhardir. On les entendait s’interpeller, ils se faisaient d’abord de petits signes h'esitants et discrets, puis, peu `a peu, s’accoutumant, voyant que l’'enonc'e de leurs noms ne provoquait aucun scandale, ils se parlaient `a haute voix `a travers la salle.
Et c’est ainsi que lorsqu’une voix cria d’une galerie :
— Ca va toujours, Bec-de-Gaz ?
On en entendit une autre r'epondre de la galerie d’en face :
— Eh oui, ca colle, OEil-de-Boeuf.
Quelques jeunes apprentis apaches se d'esignaient avec admiration et respect la silhouette massive du Bedeau venu tout seul au th'e^atre, et qui affectait plus que jamais un air sinistre et pr'eoccup'e.
— C’est vraiment un mec costaud. Il en a une d'egaine 'epatante !
— Oui, j’crois ben que depuis que sa gonzesse a claqu'e, y n’en a jamais reluqu'e une autre.
Depuis les aventures de l’autobus et de la Banque de France, tous les complices de Fant^omas s’'etaient tenus tranquilles, ne se terrant pas dans un repaire ignor'e, d'eroutant la police en ne se cachant pas.
Certes, les agents avaient arr^et'e quelques r^odeurs, et d'ecouvert dans les bouges des r'ecidivistes, que bon gr'e mal gr'e on avait impliqu'e dans les affaires de la place Clichy et du quai de l’H^otel-de-Ville. Mais en r'ealit'e, les v'eritables acteurs de ces deux drames tragiques n’avaient pas 'et'e d'ecouverts, et depuis que l’opinion publique s’'etait calm'ee, la police, impuissante `a intervenir, rel^achait sa surveillance. Les secrets d’ailleurs, 'etaient fort bien gard'es dans la bande. Et si d’aventure des haines naissaient entre ceux qui la constituaient, les uns et les autres s’arrangeaient pour vider entre eux les querelles, mais nul n’aurait os'e moucharder les camarades, d'enoncer des faits aussi graves, sachant par exp'erience que si la justice d'ecidait d’'epargner l’indicateur, celui-ci serait certainement ch^ati'e par ceux qu’il aurait d'enonc'es.
Cependant, OEil-de-Boeuf qui s’ennuyait `a sa place 'etait venu rejoindre son ins'eparable ami Bec-de-Gaz.
Il le vit avec une femme et il interrogea en la d'esignant :
— C’est donc que tu te mets en m'enage, Bec-de-Gaz ?
Mais le grand apache haussa les 'epaules :
— Tu l’as pas regard'ee la gonzesse, fit-il. C’est Ad`ele.
C’'etait Ad`ele en effet, et l’apache qui posait la question savait que l’ancienne bonne vivait avec Beaum^ome.
Ad`ele avait un visage courrouc'e et, volontiers, elle profita de l’occasion pour faire conna^itre ses sentiments :