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ЖАНРЫ

L'?vad?e de Saint-Lazare (Побег из Сен-Лазар)
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— Ce qui a fini de m’ouvrir l’oeil, affirmait Riquet, c’est ma promenade dans le coffre de l’auto. J’ai entendu `a ce moment un des types qui 'etait dans la voiture appeler l’autre : Patron, puis Ma^itre, puis, enfin, Fant^omas. Vous pensez bien que j’en menais pas large. Si j’'etais trouv'e dans ce coffre, y avait pas de doute, le Juve-Fant^omas me zigouillait.

« M’sieu Juve, conclut Riquet, je me souviens aussi que le jour du crime, le jour o`u Didier a 'et'e assassin'e et jet'e `a la Seine, le faux Juve s’est 'eloign'e quelques instants apr`es des berges du fleuve. Moi j’'etais couch'e justement par l`a, dans les herbes du quai. Tr`es bien. D’abord, tant que j’ai cru que le faux Juve 'etait le vrai Juve, je n’y avais pas pens'e. Mais depuis que je sais que le faux Juve est Fant^omas, je comprends tr`es bien l’aventure : si Fant^omas revenait des bords de la Seine, au moment o`u l’on y jetait le corps de Didier, c’est qu’assur'ement il venait de participer `a l’assassinat et puis, il y a eu d’autres trucs tr`es louches. Mais c’est pas pour dire m’sieu Juve, le gars Fant^omas a le chic pour chiper une ressemblance, c’est vous tout crach'e. Mince alors, ce qu’il sait se maquiller, le fr`ere. Par exemple, ce que je ne sais pas, c’est ce qu’il faut faire maintenant ?

Mais `a cela, c’'etait Juve qui r'epondit, et Juve r'epondit avec un sourire tranquille et froid :

— Ce qu’il faut faire, Riquet ? C’est pincer Fant^omas, et je m’en charge.

23 – CELUI QU’ON NE TUE PAS

Fandor, au moment m^eme o`u H'el`ene nouait ses bras autour de son cou en le suppliant de ne pas se jeter `a la poursuite du Bedeau et de Fant^omas, n’avait pas autrement insist'e. Ce n’'etait pas `a coup s^ur que l’h'ero"ique jeune homme e^ut manqu'e de courage ou bien qu’il n’e^ut pas la forte envie de mettre la main au collet de l’insaisissable et monstrueux bandit. `A ce moment certes, comme `a n’importe quel autre moment de sa vie, Fandor, au contraire, aurait fait bon march'e de l’existence, pour avoir la joie d’engager avec Fant^omas une lutte directe, une lutte d’homme `a homme, au cours de laquelle il pouvait esp'erer, gr^ace `a sa jeunesse, `a sa force, `a son habilet'e, remporter la victoire.

Mais, `a vrai dire, Fandor s’'etait senti immobilis'e, encha^in'e litt'eralement par l’'etreinte d’H'el`ene. C’'etait son p`ere qu’elle pr'etendait sauvegarder en suppliant Fandor, et Fandor n’avait pu passer outre, ne s’'etait pas senti le courage sp'ecial qu’il lui aurait fallu pour repousser celle qu’il aimait et pour, devant elle, sous ses yeux, tenter d’appr'ehender le roi du Crime.

Pour une fois, l’amour avait vaincu Fandor. Pour une fois il avait c'ed'e. Il avait beau se le reprocher comme on se reproche un manquement au devoir, il ne parvenait pas `a 'eprouver de remords cuisants.

Fandor n’avait pas quitt'e H'el`ene d’ailleurs, que d'ej`a, dans son esprit, naissaient des plans de poursuite les uns apr`es les autres.

— Ils m’ont fil'e entre les doigts, se disait Fandor, n’emp^eche, je les ai identifi'es. Fant^omas, certes, est difficile `a joindre, difficile `a rencontrer et nul ne peut se vanter `a l’avance de le retrouver suivant son bon plaisir, en face de lui. En revanche, le Bedeau doit ^etre facile `a d'ecouvrir, je le repincerai.

Le lendemain m^eme, avec l’incroyable t'enacit'e qui le caract'erisait, J'er^ome Fandor se mettait en campagne. D`es quatre heures du matin, le journaliste courait les bars qui pullulent aux environs des Halles et o`u, faisant bavarder les uns et les autres, il pouvait esp'erer trouver quelque indice qui lui perm^it de d'ecouvrir le Bedeau.

Aux Halles, J'er^ome Fandor fit buisson creux. Il n’apprit rien qui f^ut de nature `a le renseigner. Si ce n’est que, depuis fort longtemps le Bedeau avait cess'e de fr'equenter ces bouges. Ses meilleurs amis m^eme ne savaient trop ce qu’il 'etait devenu.

J'er^ome Fandor d'ecida alors d’aller poursuivre ailleurs son enqu^ete. Successivement il perdit son apr`es-midi `a tra^iner dans tous les cabarets louches de la Chapelle o`u le Bedeau, apprit-il, ne venait que rarement. Vers six heures du soir il 'etait `a Vaugirard o`u le Bedeau 'etait totalement inconnu et enfin, `a huit heures, `a huit heures seulement, dans un bouge innommable de Montparnasse, en causant avec un aveugle qui voyait fort clair lorsqu’il ne demandait pas la charit'e, il obtint le renseignement apr`es lequel il courait depuis le matin :

— Le Bedeau ? ah, oui, un gars costaud et qui cr`eve un pante comme d’autres enfilent un quinquina, il doit loger quelque part `a Grenelle. Au passage des Millionnaires peut-^etre bien…

C’'etait tout ce que d'esirait savoir le journaliste. Il paya une tourn'ee, quitta le bouge tout souriant. Pour faire ses enqu^etes, bien entendu, J'er^ome Fandor s’'etait convenablement grim'e et ses meilleurs amis l’eussent rencontr'e sans pouvoir le reconna^itre. `A fr'equenter Juve, en effet, `a vivre depuis de longues ann'ees une existence extraordinaire, perp'etuellement consacr'ee aux recherches les plus difficiles, aux entreprises les plus p'erilleuses, J'er^ome Fandor 'etait devenu quelque peu policier.

— J’ai attrap'e la contagion, se disait-il, maintenant il n’y a pas un agent de la S^uret'e pour me faire la pige pour ce qui est des d'eguisements.

De fait, v^etu d’un paletot rapi'ec'e, qui avait peut-^etre 'et'e marron ou bleu, mais que des averses successives avaient fait tourner au vert, coiff'e d’un vieux chapeau de paille dont les bords s’effilochaient, ayant rev^etu un pantalon `a l’aspect crasseux dont les jambes trop longues tire-bouchonnaient sur des bottines, dont l’une 'etait `a lacet et l’autre `a boutons, J'er^ome Fandor, ce jour-l`a, ressemblait `a s’y m'eprendre `a quelque mis'ereux sans travail, ouvreur de porti`eres, distributeur de prospectus, industrie du m'egot ou encore, facteur d’occasion aux arriv'ees des grandes gares.

Fandor, toutefois, avait peu souci de sa mise, c’'etait le plus all`egrement du monde qu’il quitta Montparnasse o`u le hasard venait de lui apprendre l’adresse du Bedeau, pour se rendre `a Grenelle :

— Ma foi, songeait le journaliste, il faut convenir que, dans la vie, non seulement tout arrive, mais encore tout arrive au moment o`u on s’y attend le moins. Il y a bien peu de temps encore, j’'etais paralytique, tout r'ecemment, je me trouvais dans un tonneau, et maintenant, me voici sur le point de rendre des visites.

C’'etait une visite d’un genre sp'ecial, il est vrai, que celle que se proposait de rendre le journaliste au Bedeau.

Dans sa poche, J'er^ome Fandor, d’un mouvement involontaire, t^atait de temps `a autre la crosse de son fid`ele revolver. `A coup s^ur. Le Bedeau, s’il 'etait chez lui quand Fandor arriverait, serait peu flatt'e de l’apercevoir. Le mieux 'etait donc de pr'eparer, pour la discussion in'evitable qu’il pr'evoyait, d’excellents arguments, de convaincants discours et cela sous la forme de cartouches `a balles blind'ees.

Sans trop de peine J'er^ome Fandor s’orienta dans Grenelle et d'ecouvrit le passage des Millionnaires, ou plus exactement une sorte de ruelle infecte, inf^ame, s’ouvrant juste derri`ere le quartier de cavalerie Dupleix, et qui, ne portant pas de nom sur les registres officiels de la vicinalit'e parisienne, avait 'et'e ainsi nomm'ee par la malice des habitants de Grenelle.

Le passage des Millionnaires – puisqu’il s’appelait ainsi – est en r'ealit'e form'e par le groupement extraordinaire et pittoresque de deux maisons ouvri`eres, surpeupl'e d’escarpes et de trimardeurs momentan'ement `a l’arr^et. Les facades sont rapproch'ees au point que, d’une maison `a l’autre, par les fen^etres on peut se donner des poign'ees de main. Perp'etuellement, sur des cordes tendues, du linge s`eche, s’'egouttant sur la t^ete des passants. Enfin, dans le ruisseau, une marmaille pouilleuse, continuellement en train de se disputer, de se battre, joue sans souci des querelles qui 'eclatent `a tous moments d’'etage `a 'etage.

J'er^ome Fandor, d’un coup d’oeil, embrassa la disposition des lieux :

— Peste, fit-il, chacune de ces maisons-l`a doit bien contenir cent cinquante `a deux cents individus, o`u diable vais-je rep^echer mon Bedeau ?

Tranquillement cependant, avec une audace dont il n’ignorait pas le p'eril, Fandor entra dans cette nouvelle Cour des Miracles.

— Je vais toujours monter un 'etage, au hasard, se dit le journaliste.

Il tourna dans l’'etroit corridor de l’une des deux maisons. Les murs en 'etaient sales, recouverts d’inscriptions obsc`enes et l’humidit'e suintait en larges taches, des enfants jouaient `a la marelle ou se volaient des billes, J'er^ome Fandor n’y prit pas garde. Il passa.

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