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ЖАНРЫ

La disparition de Fandor (Исчезновение Фандора)
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Le Bedeau insistait cependant :

— Le voleur, l’assassin, c’est moi que je vous dis, vous pouvez y aller, me conduire `a la Tour Pointue [1].

— S^ur, pensait P'erouzin qu’on est en train de faire une gaffe.

Nalorgne, de son air le plus maussade, questionnait encore le Bedeau :

— Si c’est pour nous avoir que tu fais tout ce boniment-l`a, autant le dire tout de suite, on y regarde pas, on paiera la cro^ute et ce sera fini.

— Vous ^etes rien gourdes, fit-il puisque je vous l’dis que je suis un assassin, que j’veux ^etre arr^et'e.

— La preuve ? grommela Nalorgne, qui d'ecid'ement 'etait sceptique.

Mais soudain le Bedeau triompha de ses h'esitations : il avait trouv'e l’argument `a fournir au policier et il le fit d’un air triomphant :

— Dites donc, vous autres, interrogea-t-il, pourriez-vous me dire ce qu’est devenue ma gonzesse, Fleur-de-Rogue ?

Les deux policiers r'efl'echirent, puis P'erouzin avoua :

— C’est vrai que voil`a bien une pi`ece de jours qu’on ne l’a pas vue sur le rade.

— Probable, fit le Bedeau en se rengorgeant, il y a une bonne raison pour ca c’est que je lui ai fait son affaire.

Rien n’'etait plus faux que cette d'eclaration, mais le Bedeau y mettait un tel aplomb, un tel accent de sinc'erit'e que Nalorgne et P'erouzin s’y tromp`erent.

— Pas possible, s’'ecri`erent-ils.

Spontan'ement tous deux se levaient, se rapproch`erent de l’apache qui ricana :

— Vous voil`a convaincus tout de m^eme, ca va bien, mais inutile de sauter sur moi comme la mis`ere sur le pauvre monde. Je n’ai pas l’intention de me d'ebiner tout au contraire.

Pourquoi le Bedeau s’accusait-il d’un crime imaginaire ? quels motifs avait-il pour demander ainsi son arrestation ? Comment se faisait-il qu’il se vendait lui-m^eme aux agents de la S^uret'e ? C’'etait simple `a comprendre, pour qui connaissait l’intelligence restreinte du sinistre apache. Le Bedeau, inquiet du sort de Fleur-de-Rogue et surtout de celui d’H'el`ene, redoutait par-dessus tout la col`ere de Fant^omas, si par malheur et comme c’'etait possible, il 'etait arriv'e malheur `a la fille. Le Bedeau par exp'erience connaissait la cruaut'e froide et l’indomptable rigueur du g'enie du Crime, du Ma^itre devant lequel on ne trouvait point gr^ace lorsqu’on l’avait trahi. Le Bedeau se disait que l’endroit le plus s^ur pour 'eviter la vengeance du bandit, c’'etait assur'ement la prison, la bonne et douce prison o`u on se laisse vivre, nourrir, blanchir, coucher, sans avoir `a penser `a rien.

Fleur-de-Rogue vivait-elle ou non ? La police la rechercherait, ce qui rendrait service au Bedeau et ce serait bien de la guigne si l’on ne finissait pas par d'emontrer qu’il avait, pour se faire arr^eter port'e, lui le Bedeau, une fausse accusation contre lui-m^eme. Alors on le condamnerait `a une peine plus ou moins grande pour le ch^atier d’avoir dup'e la police et pendant ce temps-l`a, Fant^omas, aurait tout le temps de se calmer, de penser `a autre chose.

Cependant, Nalorgne et P'erouzin, qui, apr`es quelques nouvelles interrogations, avaient d'esormais acquis la certitude que le Bedeau 'etait bien un assassin, lui passaient solennellement les menottes et entra^inaient leur paisible prisonnier hors du cabaret :

— On va pas cavaler `a pied, interrogea le Bedeau, vous pouvez bien payer une roulante, d’autant plus que je me sens les arpions en dentelle ?

Le Bedeau, d’ailleurs, l'eg`erement ivre, titubait.

Nalorgne et P'erouzin obtemp'eraient `a son d'esir, eux non plus ne tenaient pas `a s’en aller de la sorte, toutefois, avant d’arr^eter un fiacre, Nalorgne, en homme pr'ecis qu’il 'etait, faisait au Bedeau son compte :

— On te redoit soixante-quinze francs, on va te les payer.

Nalorgne d'eduisait de la somme le louis vers'e entre les mains du gargotier, pour payer son d^iner. Il retint encore deux francs.

— Pourquoi ? demanda le Bedeau.

— Mais, fit le policier, pour le sapin.

Cette d'eclaration faillit tout g^ater. L’apache se mit en col`ere :

— Nom de Dieu ! hurla-t-il, je crois que vous voulez m’avoir, vous autres, c’est-y pas malheureux d’essayer de me gratter comme ca, sur mon b'en'efice. Ca, ca rentre dans votre boulot, c’est les frais de votre commerce.

P'erouzin essaya d’expliquer :

— Nous n’avons pas de frais suppl'ementaires pour cela. Alors si tu refuses de payer le fiacre, autant aller `a pied.

La situation 'etait embarrassante, car, d’une part, le Bedeau 'etait fort ivre, et de l’autre, sur un signe de P'erouzin, gaffeur comme toujours, une voiture 'etait venue se ranger le long du trottoir et pour s’assurer des clients par intimidation, le cocher avait d'ej`a baiss'e son drapeau. Nalorgne se r'esigna `a la g'en'erosit'e.

— Soit, dit-il, voil`a les deux francs, la roulante sera `a notre compte.

Les trois hommes s’introduisirent dans le fiacre et Nalorgne y monta le dernier, jeta une adresse au cocher.

Le v'ehicule roulait lentement, le Bedeau sommeillait, lorsque soudain, ayant regard'e par la porti`ere, et vu que la voiture longeait les fortifications, il s’'ecria stup'efait :

— Mais nom de Dieu, il se goure, le collignon !

Nalorgne et P'erouzin ne r'epondaient point. Le Bedeau insista :

— Dis-lui qu’il se fout dedans. Les fortifs, c’est pas la direction de la Pr'efectance.

Mais les policiers ne r'epondirent pas et `a ce moment la voiture s’arr^eta devant une masure herm'etiquement close. Nalorgne, prestement, descendit et frappa `a la porte :

Le Bedeau s’inqui'eta.

— Qu’est-ce qu’il va faire ? demanda-t-il `a P'erouzin.

— Voir un copain, r'epliqua celui-ci. Descendons aussi.

Intrigu'e, l’esprit alourdi par les vapeurs de l’alcool, et confiant, le Bedeau consentit `a suivre P'erouzin.

`A la demande de Nalorgne, la porte close s’'etait ouverte et brusquement le Bedeau se trouva pouss'e `a l’int'erieur d’une salle, tr`es sommairement 'eclair'ee, salle garnie de tables et de banquettes o`u des hommes en train de boire 'etaient install'es. Et tout d’un coup, le Bedeau se souvint qu’il connaissait cet endroit.

C’'etait un effroyable bouge de la Glaci`ere, connu sous le nom de L’OEil Vert, et les apaches eux-m^emes ne s’y aventuraient qu’en tremblant, s^urs qu’ils 'etaient d’y rencontrer l’ennemi et d’y risquer toujours quelques mauvaises aventures. C’'etait le plus inf^ame 'etablissement que l’on p^ut imaginer, cabaret clandestin, coupe-gorge, que m^eme les plus terribles bandits n’approchaient qu’avec h'esitation. Or, le Bedeau, allait se demander pour quels motifs Nalorgne et P'erouzin le faisaient venir l`a, lorsque soudain il bl^emit, trembla sur ses jambes, poussa un cri de terreur :

— Ah, nom de Dieu, fit-il, ces vaches-l`a m’ont mouchard'e.

Ses yeux apeur'es ne pouvaient se d'etacher d’un homme qui, du fond de la salle o`u il se trouvait, d'evisagea le Bedeau avec une singuli`ere insistance, cependant que, sur ses l`evres fines et ras'ees, flottait un sourire railleur.

Le Bedeau pouvait ^etre inquiet `a juste titre, car l’homme qu’il voulait 'eviter `a tout prix, de rencontrer se trouvait l`a devant lui, et cet homme, c’'etait Fant^omas. Fant^omas, autour duquel se trouvaient des hommes d'evou'es `a sa cause et que le Bedeau connaissait bien. Il y avait l`a B'eb'e, Mort-Subite, les deux ins'eparables Bec-de-Gaz et OEil-de-Boeuf, plus copains que jamais.

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