Le Cadavre G?ant (Гигантский кадавр)
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C’'etait, en effet, un cadavre que Juve relevait, un cadavre d'ej`a froid, d'ej`a roide…
Chapitre VIII
`A
110 `a l’heur
e
Que s’'etait-il pass'e ? Quel effroyable drame s’'etait donc accompli en gare d’Anvers ? Comment Fant^omas avait-il triomph'e de J'er^ome Fandor, sinistrement triomph'e, puisque, aussi bien, c’'etait le cadavre du journaliste que le policier, quelques instants plus tard, pensait relever dans le wagon ?
`A la v'erit'e, si Juve avait connu dans leur exactitude les 'ev'enements qui venaient d’avoir lieu, s’il avait su v'eritablement ce qui s’'etait pass'e, il e^ut 'et'e certes fort inquiet, mais il n’aurait tout de m^eme point connu le terrible d'esespoir qu’il 'eprouvait en ce moment !
Juve, en effet, n’e^ut pas 'et'e d'esesp'er'e par la mort de Fandor, tout simplement parce qu’il aurait su que J'er^ome Fandor n’'etait pas mort, et qu’en r'ealit'e, s’il courait de tr`es certains dangers, s’il affrontait des risques terribles, il n’avait tout de m^eme nullement l’intention, nullement la crainte m^eme, de perdre la vie.
Juve, relevant le cadavre de J'er^ome Fandor dans le train qui l’emportait vers Bruxelles, 'etait donc tout simplement victime d’une aventure effroyable, dont il ne devait conna^itre qu’ult'erieurement la v'eritable et d'efinitive explication.
Mais, s’il n’'etait pas mort, qu’'etait devenu J'er^ome Fandor ?
J'er^ome Fandor avait bel et bien manqu'e le train. Il l’avait manqu'e non point par 'etourderie, car, si 'etourdi qu’il f^ut, sa distraction n’allait point jusqu’`a oublier qu’il devait regagner le rapide, mais bien parce que des ph'enom`enes, fort ind'ependants de sa volont'e et d’une importance primordiale, l’avaient contraint `a laisser de c^ot'e le souci de rejoindre Juve pour s’occuper d’affaires beaucoup plus pressantes.
Avec une audace inou"ie, un toupet infernal, une invraisemblable insolence, Fant^omas s’'etait soudain dress'e devant J'er^ome Fandor, `a l’instant o`u celui-ci grillait une cigarette, et lui avait demand'e du feu.
Fant^omas avait-il reconnu le journaliste, et s’amusait-il `a le provoquer volontairement ? C’'etait sinon certain, du moins probable, car Fant^omas n’'etait pas homme `a agir `a la l'eg`ere, `a commettre, en un mot, sans s’en apercevoir, une b'evue d’aussi grande importance.
Fandor, d’ailleurs, ne r'efl'echissait point `a cela. Il ne r'efl'echissait m^eme `a rien du tout, car, c'edant `a un mouvement tout instinctif, `a peine avait-il vu Fant^omas qu’il se pr'ecipitait sur le bandit, pensant enfin pouvoir engager la lutte supr^eme, et triompher de celui qu’il poursuivait avec Juve depuis de si longues ann'ees.
Fant^omas avait tourn'e derri`ere un amoncellement de bagages, 'evitant J'er^ome Fandor, toujours avec son merveilleux sang-froid, et ricanant comme amus'e par les 'ev'enements qui cependant, d’une minute `a l’autre, pouvaient se conclure pour lui de la plus sinistre facon.
Fant^omas disparut derri`ere les bagages et apparut au bout de quelques secondes un peu plus loin sur le quai, de sorte que J'er^ome Fandor, sans perdre le moins du monde sa piste, pouvait ais'ement se jeter sur ses traces et continuer la poursuite.
J'er^ome Fandor, par malheur, devait avoir `a lutter contre une suite d’'ev'enements qui, s’ils servaient merveilleusement les int'er^ets du bandit, paralysaient dans la m^eme mesure les efforts du journaliste.
`A cet instant, en effet, une cloche r'esonnait dans la gare d’Anvers, annoncant qu’il 'etait temps pour les voyageurs du rapide de regagner leur place, et cela naturellement avait pour effet d’augmenter encore l’encombrement des quais.
Devant J'er^ome Fandor, une foule de gens s’agitaient, courant en tout sens pour retrouver leurs wagons et ne faisant nullement attention aux impr'ecations du jeune homme qui, peu soucieux d’^etre poli, jouait des coudes, et distribuait des coups de poing sans la moindre vergogne.
— Place ! place ! criait Fandor.
Et il se pr'ecipitait toujours en avant.
Cette poursuite `a la gare ne pouvait 'evidemment s’'eterniser bien longuement. Il 'etait certain qu’on allait `a la fin remarquer les clameurs d'esesp'er'ees de Fandor, qu’on se pr'ecipiterait `a son aide, qu’au seul nom de Fant^omas on se grouperait sous ses ordres, et qu’en cons'equence le bandit serait vivement accul'e dans un coin, appr'ehend'e, mis hors d’'etat de nuire.
Fandor esp'erait bien tout cela, mais, h'elas ! Fant^omas ne s’illusionnait pas plus `a ce sujet que lui-m^eme, et Fant^omas, pour 'eviter cette extr'emit'e f^acheuse, d'eployait en cons'equence les tr'esors d’habilet'e dont il 'etait coutumier.
Loin de courir, ainsi que le faisait J'er^ome Fandor, Fant^omas se contentait de marcher tr`es vite. Il faisait de brusques d'etours, pivotait sur lui-m^eme, revenait sur ses pas, et se dirigeait le plus possible dans la direction des salles d’attente s'eparant les quais d’embarquement de la sorte d’esplanade qui s’'etend devant la gare d’Anvers.
J'er^ome Fandor s’apercut rapidement de sa manoeuvre, comprit son but et son int'er^et, et pesta de toute son ^ame.
— S’il quitte la gare, il m’'echappe, songea le journaliste.
Et J'er^ome Fandor, `a son tour, avait cess'e de crier. Dans le remue-m'enage du train voisin, on n’entendait pas ses appels ; il fallait r'eserver sa voix pour donner l’alarme un peu plus tard.
Et, serrant les poings, furieux de ne pas m^eme avoir le moyen de pr'evenir Juve dont il entendait brusquement les appels, J'er^ome Fandor se h^ata encore pour rejoindre Fant^omas.
Par malheur, le bandit devait conna^itre la gare d’Anvers beaucoup mieux que ne la connaissait J'er^ome Fandor lui-m^eme. Il s’orientait donc `a merveille, trouvait moyen de se glisser derri`ere un encombrement de chariots qui retardait Fandor, et se pr'ecipitait dans la salle d’attente.
Il avait encore une dizaine de pas `a faire et il arrivait dans la cour de la gare o`u, sans le moindre doute, il lui serait relativement facile de dispara^itre et de s’enfuir.
— Nom de Dieu ! tonna Fandor, je suis fichu !
Il avait vu le geste de Fant^omas, il l’avait vu ouvrir la porte de la salle d’attente, l’instant 'etait d'ecisif.
Alors, brusquement, J'er^ome Fandor concut une nouvelle id'ee.
Loin de se pr'ecipiter en avant, il rebroussa chemin en toute h^ate.
La route derri`ere lui 'etait libre car les voyageurs avaient tous repris place dans le train de Bruxelles, et les employ'es s’empressaient `a fermer les porti`eres et les verrous de s^uret'e du convoi ; J'er^ome Fandor en profita pour courir librement et sortir du hall.