Le mariage de Fant?mas (Свадьба Фантомаса)
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— J'er^ome Fandor, hurla-t-il, avec une ironie terrible, vous m’avez sauv'e la vie et je vous en remercie.
Il avait bondi en arri`ere. La lumi`ere 'electrique s’'eteignit et Fandor, une chaise recue en pleine poitrine, s’'ecroula. Des bruits de pas retentissaient. Fandor se relevait `a peine que la lumi`ere soudain se ralluma.
Fandor n’'etait plus seul dans la pi`ece avec Fant^omas et la Recuerda. Autour de lui, devant lui, se trouvaient maintenant une dizaine de gardes civils. La Recuerda avait disparu. Fant^omas, v^etu de ses habits de cour, calme et digne comme un v'eritable infant, d'eclarait en pur castillan et d’une voix qui ne tremblait pas :
— Hol`a gardes, emparez-vous de cet homme, je vous ai appel'es au secours, car il 'etait l`a pour m’assassiner.
Fandor n’'etait pas encore revenu de sa stup'efaction que les gardes l’emmenaient.
18 – MYST`ERE AU PONT CAULAINCOURT
— Les tramways sont en panne. Les tramways sont en panne.
Le petit chasseur de la Brasserie Walter, place Clichy, venait de p'en'etrer dans l’'etablissement `a une allure de boulet de canon. Le gosse, habill'e de rouge, semblait affol'e. M. Walter, le patron, courut `a lui, le saisit par le bras :
— Eh bien, quoi, petit imb'ecile, grommela-t-il, qu’est-ce qui te prend ? Je vais te fiche `a la porte. En voil`a des histoires. Qu’est-ce que ca peut bien te faire qu’ils soient en panne, les tramways ?
Mais le gamin jeta un regard terrifi'e vers son patron :
— Ce sont les tramways d’Enghien, s’'ecria-t-il.
— Et alors ? fit M. Walter qui ne comprenait pas.
— Il y en a un d’arr^et'e sur le pont Caulaincourt.
Un bourdonnement s’'etait 'elev'e dans la salle. Encore le pont Caulaincourt, quelle 'emotion ! La caissi`ere s’agitait derri`ere son comptoir, appelait les ma^itres d’h^otel, stimulait les garcons :
— M'efiance, leur disait-elle, avec tout ce remue-m'enage il y a des gens qui vont s’en aller sans r'egler.
Descendant des hauteurs de la rue Caulaincourt, une cinquantaine de personnes arrivaient en courant et se m^elaient `a la foule qui circulait place Clichy. Que se passait-il donc ?
Le boulevard de Clichy 'etait d’ailleurs encombr'e par une demi-douzaine de ces v'ehicules qui assurent le service entre Enghien et la place de la Trinit'e. Le courant manquait. La lumi`ere s’'etait 'eteinte, mais alors que la client`ele, habitu'ee `a ces sortes d’arr^ets, demeurait `a l’ordinaire paisible et patiente, ce jour-l`a, des gens s’'etaient avanc'es hors de la voiture, comme gagn'ees par une inqui'etude qui semblait leur ^etre transmise par les voyageurs de la voiture pr'ec'edente qui se trouvait arr^et'ee sur le pont Caulaincourt.
La panique 'etait n'ee du fait que le courant, cessant brusquement sur la ligne, un des tramways s’'etait immobilis'e net au milieu du pont. Ah, ca n’avait pas 'et'e long ! En d'epit des objurgations du conducteur, tout le monde 'etait descendu, on avait fui au galop, en direction de la place Clichy.
Et soudain, cris joyeux. L’'electricit'e s’'etait rallum'ee.
Le calme 'etait revenu 'egalement dans la vaste salle de la Brasserie Waltero`u les consommateurs continuaient, les uns `a vider leur bock, les autres `a souper.
On ne parlait que du Pont Caulaincourt et de ses fant^omes. Deux messieurs causaient `a l’entr'ee de la salle de billard. Un monsieur d’un certain ^age d'ej`a, `a l’apparence cossue, aux allures communes, et un homme jeune, 'el'egant, bien b^ati, rac'e. Cependant que ce dernier observait curieusement son interlocuteur et ne prononcait que de vagues monosyllabes, le vieux monsieur, fort bavard, paraissait tout heureux de trouver quelqu’un `a qui causer. Et il plaisantait sur les myst`eres, il racontait des histoires invraisemblables qui avaient toutes plus ou moins trait aux 'ev'enements bizarres et dramatiques qui, depuis quelque temps survenaient aux abords du pont Caulaincourt et pr'eoccupaient tout Paris.
Au vieil homme, le monsieur distingu'e, r'epondait aimablement.
Celui-ci en veine de confidence, d'eclarait :
— Je suis M. Person, entrepreneur de maconnerie, `a Saint-Ouen. J’ai l`a une tr`es grosse affaire qui me rapporte bien et cependant le m'etier est dur, il faut tout le temps aller et venir, se coucher tard, se lever de bonne heure.
— Ah ! fit son jeune interlocuteur, qui paraissait m'ediocrement int'eress'e. Cependant, il r'epondit, lorsque le vieux monsieur lui demanda, par politesse :
— Et vous, monsieur, vous ^etes sans doute aussi dans les affaires ?
— Oui, comme cela. Par moments. Il y a une chose dont je m’occupe beaucoup et qui m’int'eresse 'enorm'ement, c’est l’automobile.
— Cette voiture qui est `a l’entr'ee du caf'e serait-elle `a vous ?
— Pr'ecis'ement, monsieur.
— Elle est superbe, c’est au moins une quarante-chevaux.
— Oh non, monsieur, simplement une vingt-cinq et je vous assure que c’est bien suffisant. J’en suis d’ailleurs enchant'e, elle a une conduite int'erieure ce qui permet de sortir par tous les temps sans ^etre oblig'e de se d'eguiser en ours polaire.
L’entrepreneur de maconnerie murmura, le regard vague :
— J’aimerais joliment une machine comme cela. Voil`a qui serait commode pour faire mes courses, pour aller voir mes chantiers.
L’automobiliste proposa gracieusement :
— Si cela vous int'eresse, je pourrais vous la faire essayer un jour.
— Vraiment, monsieur, r'epliqua Person, dont le regard s’illumina, ce serait joliment aimable `a vous. Vous en vendez peut-^etre des automobiles ?
— Non, monsieur, mais au besoin, vous savez, tout propri'etaire d’auto est marchand `a l’occasion.
L’entrepreneur de maconnerie se rapprocha de son interlocuteur :
— 'Ecoutez, monsieur, je m’en vais vous faire une proposition. D’abord vous allez me permettre de vous offrir un bock, puis ensuite je vous demanderai si ce n’est pas indiscret de savoir o`u vous allez ?
— Quand cela, monsieur ?
— Ce soir m^eme.
— Mais, je ne sais pas. Nulle part. Je rentre chez moi tout `a l’heure.
— 'Ecoutez, fit M. Person, qui parlait de plus en plus bas, je m’en vais vous dire : je ne suis pas superstitieux, loin de l`a, mais enfin ces histoires de spectre… Je suis comme tout le monde. Et puis, je n’h'esite pas `a vous le dire, j’ai pr'ecis'ement de l’argent sur moi, beaucoup d’argent. Peut-^etre une vingtaine de mille francs. Alors vous comprenez, comme le dernier tramway est parti, il va falloir que je rentre `a pied. Que je traverse le pont Caulaincourt, et franchement, je l’avoue sans fausse honte, cela m’inqui`ete, m’ennuie. Eh bien, ne pourriez-vous pas, pour me faire essayer votre voiture, me conduire de l’autre c^ot'e du pont ? Cela ne vous d'etournerait pas beaucoup avec une auto, c’est l’affaire de deux minutes.