Le mariage de Fant?mas (Свадьба Фантомаса)
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— Au revoir, monseigneur. Je ne vous dis pas adieu, mais au revoir.
19 – CONDAMN'E `A MORT
— Mon fr`ere, je viens vous voir pour vous rappeler que la vie est peu de chose et que l’'eternit'e est tout.
— Jamais de la vie, vous venez pour m’emb^eter.
— Mon fr`ere, je viens vous supplier de songer `a la f'elicit'e 'eternelle.
— Je m’en contrefous !
— Mon fr`ere, il faut vous repentir.
— Allons donc, je suis un petit saint.
— Si vous continuez `a ^etre sacril`ege, vous br^ulerez dans les tourments de l’enfer.
— Eh bien, ca me r'echauffera. J’ai eu froid toute ma vie.
— Mon fr`ere, le remords ne vous laissera pas de r'epit tant que vous ne vous serez point confi'e `a la mis'ericorde du Seigneur.
— Ah non, je vous en prie, foutez-moi la paix ! Je ne sais pas ce que c’est que le remords et je dors sur mes deux oreilles. Aussi, la ferme, hein ? D’abord, quelle heure est-il ?
— L’heure du ch^atiment.
— J'esuite, va ! Quelle heure est-il, sacr'e bon sang ! `A quelle heure est-ce que vous servez le ch^atiment, ici ?
Secouant la t^ete, scandalis'e par les propos impies qu’il venait d’entendre, le moine qui depuis quelques minutes t^achait d’'emouvoir Fandor se retirait lentement, sans ajouter un mot.
Derri`ere lui, la porte se ferma, J'er^ome Fandor, au comble de la rage, tendit le poing.
— Dieu, qu’ils sont emb^etants, rasoirs, monteurs de coups et balanstiqueurs, ces individus !
Il se recoucha rageusement, essaya de fermer les yeux.
O`u 'etait donc J'er^ome Fandor ?
Lorsque, avec une audace incroyable, Fant^omas, d'eguis'e en don Eugenio, v^etu des habits de cour de l’infant, avait d'esign'e J'er^ome Fandor aux gardes civils qui accouraient `a son appel, le journaliste avait 'et'e si ahuri par l’extraordinaire audace du bandit qu’il n’avait pas tout d’abord song'e `a protester.
Fandor ne se rendait point compte d’ailleurs tr`es pr'ecis'ement de la gravit'e des charges qui pesaient sur lui.
— Ca va mal, se d'eclara tout bonnement Fandor au moment o`u les gardes le jetaient dans une cellule dont ils ferm`erent la lourde porte.
Quelques instants plus tard, le malheureux journaliste 'etait beaucoup moins tranquille.
Non seulement il se rendait mieux compte de ce qui s’'etait pass'e, mais encore il avait peur de trop bien deviner ce qu’il allait advenir de lui :
— Mis`ere de sort ! jurait Fandor, moins gai que pr'ec'edemment et pourtant s’efforcant de plaisanter encore, ces sacr'es imb'eciles-l`a vont avoir d'ecouvert le corps du garde civil `a moiti'e 'ecrabouill'e par l’exquise Recuerda, de plus ils vont m’accuser d’^etre entr'e avec de mauvais desseins dans leur ch^ateau, tout cela pourrait bien me jouer un vilain tour.
Qu’'etait devenue la Recuerda d’ailleurs ?
En y r'efl'echissant J'er^ome Fandor se rappelait parfaitement que la jeune femme n’'etait plus dans la pi`ece lorsque les gardes civils avaient fait leur apparition.
— La Recuerda sait jouer la fille de l’air, se dit Fandor, elle a d^u deviner que Fant^omas appuyait sur une sonnette quand il s’est recul'e, chose dont moi-m^eme je m’apercevais. La Recuerda en somme m’a jou'e un assez sale tour, car elle m’a proprement laiss'e en face de Fant^omas.
Fandor, toutefois ne pouvait gu`ere en vouloir `a la femme apache de la f^acheuse situation o`u elle l’avait mis. Si Fant^omas vivait encore en effet, c’'etait bien parce que Fandor l’avait sauv'e du poignard de la Recuerda.
— J’ai eu une jolie id'ee de prot'eger Fant^omas, bougonna Fandor. Si jamais Juve apprend cela, il m’en fera une vie.
Mais le temps n’'etait plus aux r'eflexions. Fandor, quelques instants plus tard, 'etait tir'e de sa songerie par l’apparition d’un moine v^etu de noir, l’air r'ebarbatif.
— Prisonnier, d'eclarait le religieux, recommandez votre ^ame `a Dieu.
Et comme Fandor s’appr^etait `a protester de son innocence, le moine, d’un geste, lui imposa silence.
— Prisonnier, recommenca-t-il, tais-toi ! Il n’est point n'ecessaire que tu dises un mot car tu appartiens d'esormais `a la justice, au tribunal de l’Escurial et je ne suis pas ici pour t’entendre.
Fandor fut vite renseign'e. Le moine tira de la poche de son froc un long grimoire dont il donna lecture `a Fandor. C’'etait un acte d’accusation parfaitement en r`egle. Il s’y trouvait 'enonc'e d’'etranges choses et notamment que J'er^ome Fandor 'etait un diable, un d'emon de la pire esp`ece, qu’il se livrait `a des pratiques de sorcellerie.
Le prisonnier, affirmait l’acte, s’est pr'esent'e au garde civil Pedro, retrouv'e `a moiti'e mort dans les caves de l’Escurial sous les aspects d’une exquise ballerine, il a d'eclar'e alors qu’il s’appelait la Recuerda et qu’il d'esirait accomplir une marque. C’est en invoquant ce sortil`ege, en se servant de pareils mensonges que le prisonnier s’est introduit furtivement `a l’Escurial ; une fois dans les murs du Palais, il a ligot'e le malheureux Pedro, l’a jet'e dans un soupirail et est mont'e aux appartements de l’infant don Eugenio, qu’il a voulu tuer apr`es avoir repris sa forme et son apparence d’homme.
Or, tout cela 'etait si peu clair, que J'er^ome Fandor n’y d'em^elait rien tout d’abord, `a peine eut-il le temps d’ailleurs de ponctuer la lecture de l’acte de quelques exclamations. Impassible, le moine disparut, laissant Fandor tout seul sans 'ecouter ses protestations.
Et alors, commenca pour le journaliste une aventure extraordinaire.
***
Perdu dans l’une des cellules, v'eritables oubliettes qui sont b^aties dans les caves de l’'enorme palais, Fandor recevait par un judas une cruche d’eau et une provision de pain.
— Ca, se d'eclarait-il `a lui-m^eme, c’est la preuve que d'ecid'ement on m’inculpe et que l’on ne va pas me rel^acher de sit^ot. Mais qui diable va me juger ?
Fandor devait l’apprendre le lendemain. De bonne heure en effet, et alors qu’en toute philosophie il sommeillait tranquillement sur sa couche, une mauvaise paillasse qui garnissait un angle de sa cellule, J'er^ome Fandor d'ecouvrit par un gardien l’'etrange situation o`u il se trouvait. C’'etait un moine convers qui parlait volontiers :