L'Arrestation de Fant?mas (Арест Фантомаса)
Шрифт:
— Tra^itre. Bandit. Canaille. Je te cr`everai toi aussi.
Jean-Marie mordit au bras l’officier qui poussa un cri de douleur. Mais voyant rouge, Nikita, cette fois, 'etrangla `a moiti'e Jean-Marie, puis le rejeta inerte, 'evanoui, hors de la pi`ece, dans le couloir d’o`u ils venaient.
Le poussant du pied, comme une charogne, Nikita laissa le vaincu sur les dalles de pierre puis, pour emp^echer un retour offensif de sa part, il referma `a double tour la porte communiquant avec le couloir et se trouva seul `a seul avec la jeune femme qu’il venait d’arracher `a un si terrible danger.
La malheureuse, plus belle encore dans l’expression sinc`ere de sa frayeur, avec ses grands yeux bruns qui brillaient 'etrangement, s’'etait empar'ee d’un revolver et sa main blanche et d'elicate braquait sans trembler le canon de l’arme sur l’officier.
Machinalement, Nikita r'etablit le d'esordre de sa toilette puis, immobile en face de l’inconnue, il courba la t^ete dans un profond salut, et attendit.
D’une voix 'etouff'ee, la jeune femme lui demanda :
— Qui ^etes-vous ? Que voulez-vous ?
— Madame, balbutia le lieutenant prince Nikita, excusez-moi, je n’y comprends rien moi-m^eme, je suis victime d’un quiproquo, je le b'enis toutefois, car il m’a permis de vous arracher `a l’agression de ce bandit.
— Vous n’^etes pas son complice ? Vous ^etes donc pas tous les deux des assassins ? interrogea la superbe cr'eature.
Bl^emissant sous l’outrage, Nikita dressa la t^ete et spontan'ement d'eclara :
— Madame, vous avez devant vous un honn^ete homme, je m’appelle le prince Nikita, je suis lieutenant de l’arm'ee russe.
— Que veniez-vous faire ici ?
Nikita rougit comme un 'ecolier pris en d'efaut :
— Je ne peux pas vous le dire, madame.
Mais la magnifique cr'eature insistait :
— Vous ^etes peut-^etre un imposteur. Je veux vous croire. Vous avez un visage qui m’inspire confiance.
L’officier balbutiait maintenant :
— Je ne peux pas vous le dire, madame, je ne le peux pas, il s’agit d’un secret d’'Etat.
— Vous venez de la c^ote, monsieur, dit la dame, vos v^etements sont souill'es de boue, vous avez err'e cette nuit dans mon voisinage, qu’y faisiez-vous ?
— Vous avez raison, madame, h'elas je cherchais quelqu’un, quelque chose.
Mais, soudain, l’extraordinaire personne parut comprendre et deviner ce que l’officier voulait taire.
Au m'epris de toute prudence, elle quitta l’angle de la pi`ece dans laquelle elle se tenait jusqu’alors, traversant l’intervalle qui la s'eparait de l’officier avec une allure souple et majestueuse, elle vint aupr`es de lui, si pr`es, que son parfum captivant monta aux narines de Nikita, et le grisait.
— Prince, dit-elle, je sais ce que vous ^etes venu faire ici, vous cherchez un document, et pr'etendez vous emparer du portefeuille ?
— Ah, madame, madame, s’'ecria Nikita, taisez-vous, je ne peux rien dire !
La grande dame se tut. Elle semblait avoir compris. D'esormais certaine de ce qu’elle soupconnait, elle n’'eprouvait plus la moindre crainte.
Un sourire triste erra sur ses l`evres qui p^alirent un peu.
D’un geste de la main, d’un geste 'el'egant de vraie femme du monde, elle d'esignait un si`ege `a l’officier :
— Asseyez-vous, prince, fit-elle, nous avons `a causer.
La myst'erieuse inconnue s’'etendit `a demi sur une berg`ere, et d`es lors Nikita, qui jusqu’alors avait 'et'e trop troubl'e pour se rendre compte de l’endroit o`u il se trouvait, s’apercevait qu’il 'etait avec son interlocutrice dans un petit salon meubl'e avec un go^ut parfait.
Quittant son air hautain, la grande dame parut prendre l’officier en piti'e.
— Prince, dit-elle, vous ^etes jeune, vous ^etes encore au seuil de la vie, peut-^etre que vous nourrissez quelque espoir. Eh bien, croyez-en une femme qui a connu les malheurs les plus terribles, quand elle vous dit : Fuyez.
— Pourquoi, madame ?
Une frayeur subite se peignit sur le visage de la superbe cr'eature.
— Parce que quiconque pr'etend retrouver ce document courra les plus grands risques. Celui qui voudra se l’approprier est vou'e `a la mort certaine.
Nikita, fr'emissant, s’'etait lev'e :
— Je m’en doutais, madame, je me doutais que vous saviez quelque chose. Peut-^etre est-ce vous qui d'etenez ce document ? Dans ce cas, madame, quoi qu’il doive m’en co^uter, je connais mon devoir, je sais ce que je dois faire.
— Quoi donc, mon garcon ?
— Je ne ferai rien, que vous ne m’autorisiez `a faire, mais je vous en supplie, madame, dites-moi la v'erit'e, aidez-moi `a rester un homme d’honneur.
— `A la bonne heure. 'Ecoutez, prince, peut-^etre pourrais-je vous aider un jour, mais pour le moment je ne puis rien faire et, d’ailleurs, je tiens `a rassurer votre conscience en vous donnant ma parole que ce portefeuille n’est pas ici et que je ne puis rien pour vous le restituer. Vous allez partir, monsieur, et tout de suite.
— Pas encore, madame, pas avant d’avoir tu'e tout `a fait ce mis'erable qui vous voulait du mal.
— Vous ne tuerez pas Jean-Marie.
— Mais…
— Vous ne le tuerez pas.
— Au moins, madame, souffrez que je le remette `a la police, que je le fasse emprisonner, il faut que ce bandit soit puni, voyons.
— Non. Je ne veux pas. Vous allez au contraire l’emmener avec vous. Il faut que jusqu’au matin vous ne le quittiez pas, c’est la meilleure mani`ere de me prot'eger. `A l’aube, vous vous s'eparerez de Jean-Marie, et vous pourrez le faire sans inqui'etude pour moi, car moi je serai loin.
— Vous serez loin.
— Que vous importe ?
— Madame, ne me torturez pas. Je n’ai pas beaucoup d’usage de la vie, je ferai ce que vous voudrez, mais accordez-moi une gr^ace. C’est un homme `a genoux qui vous supplie, un homme qui vous aime. Votre nom Madame ?
Et il baisait le bas de sa robe.
La ch^atelaine du manoir tendit au prince Nikita sa main aux doigts fusel'es, pour l’inviter `a se relever, mais elle retira brusquement cette main que l’ardent officier voulait couvrir de baisers. Il insistait, humble et pressant.