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ЖАНРЫ

Les souliers du mort (Ботинки мертвеца)
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— Eh bien, Sulpice, je suis enchant'e de vous avoir vu, mais je ne vous retiens pas, il faut que je sorte.

— Comme ca se trouve, s’'ecria Juve, j’ai justement apport'e des affaires `a monsieur, ses bottines. Monsieur sait bien, celles qu’il avait dit de ressemeler.

Juve d'efit en h^ate un paquet de lustrine qu’il avait sous le bras et il d'eposa aux pieds de Baraban une paire de chaussures que celui-ci contempla, sinc`erement surpris :

— Ah, c’est tr`es bien, dit-il, mais pour le moment, je n’ai besoin de rien.

Avec une pr'ecipitation extraordinaire le vieil homme, `a l’allure si bizarre, enfila une paire de bottines `a peine propres, qu’il choisit de pr'ef'erence `a celle apport'ee par ce domestique empress'e.

Juve, tout en affectant un air enjou'e et soumis, ne perdait pas des yeux Baraban. Et, instinctivement, le policier ramenait sans cesse la main droite `a la poche du pantalon dans laquelle se trouvait son browning tout arm'e.

Le coeur lui battait. L’exp'erience qu’il venait de tenter r'eussissait, 'etait 'eminemment concluante `a ses yeux.

Depuis la veille, Juve avait r'efl'echi, longuement, minutieusement, et il s’'etait dit :

— L’individu que je viens de suivre, que je prenais pour l’oncle de Ricard, n’est pas Baraban. C’est un imposteur, quelqu’un qui, pour une raison que j’ignore encore, s’est attribu'e cette personnalit'e, pour en tirer un b'en'efice.

Mais pourquoi Juve, subitement, ne croyait-il plus `a la personnalit'e de Baraban ? Pourquoi le policier, qui, cependant, avait vu triompher sa th`ese de la fugue par l’arriv'ee inopin'ee `a Vernon du vieillard, brusquement, avait-il chang'e d’avis ? Oh, la chose 'etait facile `a comprendre !

Lorsque la veille, en venant au 22 rue Richer, `a seule fin de questionner Baraban au sujet de la disparition sensationnelle, Juve avait eu l`a, bien en face de lui, l’extraordinaire vieillard, lorsqu’il l’avait enfin perdu de vue au moment de leur arriv'ee `a tous deux rue Duperr'e, le c'el`ebre policier, malgr'e lui, avait eu l’intuition subite, puis bient^ot la certitude que ce vieillard 'etait un imposteur et qu’il jouait un r^ole en se faisant passer pour l’oncle des Ricard. Et, `a certains indices, `a certains d'etails relev'es au cours de sa promenade dans Paris avec le bizarre personnage, Juve s’'etait dit :

« Il n’y a qu’un homme au monde assez habile et assez audacieux pour agir de la sorte et cet homme ne peut ^etre que… Lui. »

Juve, alors, avait song'e `a son 'eternel ennemi.

Malgr'e tout, la chose lui paraissait tellement extraordinaire, qu’il voulait, avant d’agir, avant de sauter `a la gorge du bandit, s’assurer qu’il ne s’agissait pas d’un autre.

Il fallait d’abord acqu'erir la certitude que l’individu, r'eapparu sous le nom de Baraban, n’'etait pas le v'eritable Baraban.

Juve avait donc imagin'e de venir chez lui, grim'e en domestique. Pour s’assurer qu’il 'etait m'econnaissable, en m^eme temps que pour donner des instructions `a Fandor, il 'etait arriv'e sans se faire conna^itre. Or, Fandor ne l’avait pas d'emasqu'e. C’'etait l`a une exp'erience concluante, qui lui permettait de se pr'esenter hardiment devant ce Baraban myst'erieux sans risquer d’^etre reconnu de lui, m^eme si Juve se trouvait en pr'esence de Fant^omas. Juve savait pertinemment que jamais le v'eritable Baraban n’avait eu de domestique du nom de Sulpice, n’avait jamais employ'e de domestique m^ale m^eme. Juve avait fait mieux encore.

`A cause de ses enqu^etes, alors que l’on recherchait s’il y avait eu crime ou fugue, il s’'etait procur'e la pointure du v'eritable Baraban. Il avait alors achet'e des chaussures de m^emes dimensions, Juve les avait apport'ees, pour les faire mettre `a son interlocuteur. Celui-ci s’y 'etait refus'e.

Il avait suffi d’ailleurs d’un coup d’oeil `a Juve, pour s’apercevoir que le Baraban, qui s’agitait en face de lui, avait les pieds plus grands que le v'eritable Baraban, bel et bien disparu `a coup s^ur. Oui, si l’imposteur avait voulu chausser les souliers du mort, il n’aurait pas pu le faire. D`es lors, Juve ne quitta plus des yeux le myst'erieux personnage en qui il sentait de plus en plus, un redoutable adversaire. Il avait la main sur son browning, et il lui semblait qu’au moment o`u, de ses doigts robustes, il caressait la crosse de l’arme, son interlocuteur devait faire de m^eme, et pr'eparer lui aussi un revolver. Cependant, en l’espace de quelques secondes, M. Baraban, ou le soi-disant tel, avait achev'e de se v^etir, et tout en plaisantant d’une voix mal assur'ee avec celui qu’il continuait `a bien vouloir appeler Sulpice, il se dirigeait vers la porte :

— Mon garcon, ordonna le soi-disant Baraban, je sors, passez devant.

Mais Juve avait bondi en arri`ere.

— Je ne me permettrai jamais. Monsieur, de passer devant Monsieur. C’est contraire `a toutes les r`egles, et un bon domestique comme moi, qui se respecte, ne commet jamais une pareille incorrection.

L’instant n’'etait d’ailleurs plus `a la com'edie, et les deux hommes semblaient se mesurer du regard. Juve s’imaginait qu’il allait peut-^etre avoir `a soutenir une lutte terrible dans un instant, dans une seconde, mais il n’en 'etait rien.

Comme s’il se rangeait soudain `a l’argument du pseudo-domestique, le faux Baraban, car Juve avait d'esormais acquis la certitude qu’il avait un imposteur en face de lui, s’'elancait dans l’escalier qu’il descendait `a vive allure.

« Ca y est, pensa Juve, je te tiens, nous le tenons.

»

Et il songeait que, pris entre lui et les deux hommes qui gardaient l’entr'ee, le mis'erable n’allait pas pouvoir s’enfuir.

Juve se pr'ecipita donc `a la poursuite de celui qu’il avait d'esormais identifi'e dans sa pens'ee, presque effectivement, pour ^etre Fant^omas.

Et, comme il tournait au milieu de l’escalier, Juve brusquement, poussa un cri et tomba `a la renverse.

Il eut l’impression que les marches lui manquaient sous les pas. Le policier, pendant quelques secondes, perdit conscience de ce qui lui 'etait arriv'e, le choc avait 'et'e violent, la t^ete de Juve avait port'e contre le mur, ce qui le laissa 'etourdi.

Mais l’inspecteur de la S^uret'e r'eagit sur le coup et, faisant un effort surhumain, il retrouva ses sens, se remit debout. Un grand brouhaha retentissait au-dessous de lui. Juve se pr'ecipita.

Comme il parvenait au bas de l’escalier, deux hommes s’'elancaient vers lui : c’'etaient les agents qu’il avait post'es une demi-heure auparavant devant la porte : L'eon et Michel.

Il faisait assez obscur dans le couloir, les deux hommes se jet`erent sur le policier.

— Eh bien ? hurla Juve, o`u est-il ? Vous l’avez arr^et'e ? Je parie que vous l’avez encore laiss'e 'echapper ?

— L’homme n’est pas sorti, dit Michel.

— Mais il me quitte `a l’instant, dit Juve. Il me pr'ec'edait il y a deux secondes !

— Nous avons vu sortir un homme, dit L'eon, il nous a cri'e : « On se bat dans l’escalier, allons vite voir. » Il a fait mine de rebrousser chemin, nous l’avons pr'ec'ed'e, C’est `a ce moment que vous nous ^etes tomb'e dans les bras.

— Et cet homme, interrogea Juve, vous ne l’avez pas reconnu ?

— Vous nous aviez dit d’arr^eter Baraban, l’homme aux longs cheveux blancs, `a la barbe blanche.

— Et, poursuivit L'eon, l’homme qui sort d’ici 'etait brun, ras'e.

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