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ЖАНРЫ

Les souliers du mort (Ботинки мертвеца)
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M e Lussay savait que M e Masson 'etait fort occup'e `a son 'etude et qu’il ne faisait pas bon le d'eranger, cependant le jeune notaire arrivait, 'emu.

Oubliant m^eme les formules protocolaires, il 'etait entr'e en trombe dans le bureau de M e Masson, sans s’excuser le moindrement de son incorrection :

— Ah, mon cher pr'esident, avait-il cri'e, il y a… il y a… un effroyable malheur !

Et, sans tenir compte du saisissement o`u ses paroles jetaient le pr'esident de la Chambre des notaires, M e Lussay avait continu'e :

— Figurez-vous que ce matin, des huissiers de la Chambre se sont amus'es `a jouer entre eux au tirage de la loterie. Par plaisanterie ils ont fait tourner la roue. Ils ont choisi des num'eros.

— Eh bien ? interrogea M e Masson, alors ?

— Alors, reprenait d’une voix haletante le jeune notaire, alors, c’est abominable, mon cher pr'esident, mais ils se sont apercus que toujours, invariablement, ils tiraient le m^eme num'ero, le num'ero qui a gagn'e voici deux jours le gros lot de 200 000 francs, le num'ero 6 666.

La d'eclaration 'etait extraordinaire. M e Masson s’'epongea le front et confessa :

— Voyons, qu’est-ce que vous me chantez l`a ? Qu’est-ce que c’est que cette histoire ?

Il en oubliait, dans son 'emoi, les formules compass'ees, et M e Lussay, de son c^ot'e, ne songeait pas `a employer d’expressions choisies :

— H'elas, les huissiers n’ont pas 'et'e longs `a comprendre le myst`ere. Ils n’ont pas 'et'e longs `a deviner comment il se faisait qu’ils amenaient toujours le m^eme num'ero, le 6 666.

— Vous dites ?

— Je dis, mon cher Pr'esident, qu’ils ont d'ecouvert une horreur : il n’y avait dans la roue, avant-hier, au moment du tirage, que des num'eros identiques, des num'eros portant des 6, c’est-`a-dire que, fatalement, le num'ero 6 666 devait gagner, que la loterie a 'et'e truqu'ee, que nous sommes vol'es.

— Mon Dieu, g'emit M e Masson, c’est un scandale 'epouvantable, cela d'eshonore la Chambre des notaires. La loterie a 'et'e truqu'ee ? Il n’y avait que des six dans la roue ? C’est `a devenir fou !

M e Masson perdait la t^ete, et le correct pr'esident de la Chambre arrivait une heure plus tard dans les locaux de son administration, avec un chapeau de travers, une tenue des plus anormales.

Mais il s’agissait bien de cela !

Dans le court trajet qui s'eparait son 'etude de la chambre, M e Masson avait press'e de questions M e Lussay. Celui-ci n’avait pu que confirmer ses premiers renseignements, sans les accompagner d’aucun d'etail.

Il savait tout juste ce qu’il avait dit, l’ayant appris lui-m^eme par un coup de t'el'ephone du chef des huissiers, qui avait voulu le pr'evenir le premier, n’osant pas d'eranger M e Masson.

Les deux hommes trouv`erent naturellement tout le personnel de la Chambre, boulevers'e.

On commentait l’'ev'enement, on examinait les num'eros, tous identiques. On se demandait comment ils avaient pu ^etre substitu'es aux num'eros, `a coup s^ur r'eguliers, qu’avait envoy'es le Comptoir National.

Et c’est `a ce moment pr'ecis, alors que l’affolement 'etait extr^eme, qu’une terrifiante nouvelle vint encore bouleverser tous ceux qui assistaient `a l’enqu^ete rapide que commencait M- Masson, aid'e de M e Lussay.

Brusquement, une porte s’ouvrit. Le concierge de l’immeuble entra en courant, il hurla :

— Au secours, `a l’assassin ! Il y a deux hommes 'etouff'es dans la cave. Il y a deux cadavres en bas !

***

Lorsque Juve arriva enfin, au bureau du Comptoir National, il trouva dans le cabinet du directeur g'en'eral, M e Masson, plus 'ecroul'e qu’assis sur une chaise, et M. de Parcelac p^ale, angoiss'e.

— Qu’est-ce qu’il y a ?

En trois mots, M. de Parcelac, qui avait heureusement l’esprit net et pr'ecis, lui r'esuma l’affaire :

— La loterie tir'ee il y a deux jours `a la Chambre des notaires pour l’oeuvre des enfants orphelins des officiers minist'eriels, disait-il, a 'et'e truqu'ee. On a mis des num'eros semblables dans la roue, rien que des 6. C’est pour cela que le billet 6 666 a gagn'e et, ce billet appartenait `a ce Baraban dont tous les journaux parlent depuis quinze jours.

Juve, `a cette d'eclaration stup'efiante, se mordit les l`evres :

— Fichtre, dit-il simplement.

Puis, apr`es avoir r'efl'echi quelques secondes, il interrogea :

— On n’a aucun soupcon ?

— Non, mais on conna^itra facilement le coupable. Voyez-vous, Juve, c’est un crime inou"i, une aventure fantastique. On a retrouv'e dans la cave de la Chambre des notaires, ligot'es, b^aillonn'es, `a demi morts – on les a m^eme crus morts tout d’abord –, les garcons de banque que nous avions envoy'es d’ici, du Comptoir National, avant-hier soir, porter par la voiture, les num'eros, ceux qu’on a remplac'es avant le tirage.

Or, Juve 'etait debout, s’'etait empar'e de son chapeau.

— Ces deux hommes, demandait-il, o`u sont-ils ?

— On les a port'es `a l’H^otel-Dieu, c’est l`a qu’il faut les voir.

— Vous avez raison. Tout de suite.

Suivi de M. Parcelac et de M e Masson, qui ne disait mot, 'etant r'eellement an'eanti par l’'emotion, Juve se pr'ecipitait sur les boulevards, h'elait un taxi-auto :

— `A l’H^otel-Dieu, vite.

En voiture, il questionnait encore :

— Monsieur de Parcelac, les instants sont pr'ecieux, donc renseignez-moi en peu de mots. Comment dites-vous que l’on a envoy'e les num'eros `a la Chambre des notaires ?

— Mais comme d’ordinaire, ils ont 'et'e mis dans un sac scell'e, ce sac a 'et'e confi'e `a deux de nos employ'es. Ces employ'es ont 'et'e transport'es par notre voiture qui les a d'epos'es `a la porte, vingt minutes avant le tirage.

Juve approuva :

— Parfaitement, dit-il songeur, c’est donc vingt minutes avant le tirage que les num'eros ont 'et'e vol'es, 'etant donn'e qu’on ne s’en est pas empar'e `a l’int'erieur de la voiture. (Juve continuait, r'efl'echissant tout haut pour ainsi dire). En vingt minutes, on n’a pas eu le temps d’imiter le sac et le cachet du Comptoir National. De plus, les num'eros ont 'et'e certainement remis par deux hommes habill'es en garcons de banque, sans quoi les huissiers s’en seraient apercus. Oh oh, cela 'etablit la pr'em'editation.

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