Les souliers du mort (Ботинки мертвеца)
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— Fant^omas, hurla Juve au comble du d'esespoir, vous avez laiss'e 'echapper Fant^omas.
L'eon et Michel, abasourdis, allaient poser une question `a leur chef. Ils recul`erent terrifi'es, un geste 'energique et brusque les repoussait.
— Imb'eciles, avait dit Juve.
C’est tout. Il n’ajouta pas d’autres commentaires, mais le ton de ses paroles 'etait si m'eprisant, que des larmes en vinrent aux yeux du brave L'eon et de l’excellent Michel.
Juve, cependant, lentement, remontait l’escalier. Il lui restait quelque chose `a 'eclaircir. Il voulait `a toute force savoir pour quelle raison il 'etait tomb'e par terre, et comment il se faisait que Fant^omas avait pass'e devant ses deux agents, non pas grim'e en Baraban, mais avec sa v'eritable physionomie. Il ne devait pas tarder `a avoir la cl'e de l’'enigme.
Sur le palier du premier 'etage, il retrouvait la perruque et les favoris blancs qui faisaient ressembler Fant^omas `a l’oncle Baraban.
Et, montant plus haut, atteignant l’endroit o`u il 'etait tomb'e, Juve constatait que le tapis 'etait tendu, au lieu d’^etre fix'e le long des marches par les tringles de cuivre dispos'ees `a cet effet.
Il comprit aussit^ot ce qui s’'etait pass'e. Ces tringles de cuivre avaient 'et'e enlev'ees, et pos'ees `a c^ot'e des oeillets qui les tenaient. Il suffisait d`es lors `a quelqu’un se trouvant plus bas que Juve ne l’avait 'et'e, de tirer vigoureusement sur le tapis pour tendre celui-ci et d'eterminer la chute de la personne marchant `a ce moment sur ce tapis.
Juve haussa les 'epaules, serra les poings.
— Ca n’est pas fini, murmura-t-il. Fant^omas triomphe cette fois-ci encore, mais il est oblig'e, malgr'e tout, d’abandonner la partie. Mais quel myst`ere ! Et qu’est-ce que tout cela dissimule ?…
22 – LE BEAU TRUQUAGE
Le lendemain, Juve, 'etendu dans son lit, r'efl'echissait une fois de plus.
Le policier 'etait `a peu pr`es certain que l’homme qui se dissimulait sous la personnalit'e de l’oncle Baraban n’'etait autre que son plus mortel ennemi, que le Roi du Crime, que Fant^omas.
Juve ignorait encore exactement le mobile qui avait pu guider le Roi du Crime `a jouer cette sinistre com'edie. Il ne savait pas si les Ricard 'etaient complices ou dupes de l’infernal bandit, mais Fandor, qu’il avait envoy'e `a Vernon, lui rapporterait sans aucun doute des 'eclaircissements `a ce sujet. Car, en surveillant attentivement les faits et gestes des 'epoux Ricard, il paraissait probable que l’on arriverait `a conna^itre la v'erit'e sur ce myst'erieux couple.
Juve, ce matin-l`a, 'etait de d'etestable humeur, il monologuait :
« Apr`es tout, je commence `a en avoir assez de toutes ces histoires, je ne me l`eve pas de la journ'ee. Ca me reposera toujours. Apr`es on verra.
Le c'el`ebre inspecteur, cependant, changea vite d’id'ee. L’homme qui poursuivait Fant^omas depuis si longtemps 'etait dans l’impossibilit'e mat'erielle de prendre le moindre repos lorsqu’il avait quelque indice sur la personnalit'e sous laquelle le sinistre Ma^itre de l’Effroi se dissimulait actuellement.
Juve, brusquement, appela :
— Jean ! Donnez-moi mon petit d'ejeuner, et vite !
Le fid`ele domestique apparaissait une seconde plus tard, portant sur un plateau une grande tasse de caf'e noir que Juve buvait rapidement.
— Monsieur d'ejeunera ici ? demanda Jean.
— Non, je file `a Vernon. Si Fandor t'el'ephonait…
Mais Juve n’acheva pas.
Au moment m^eme o`u il parlait, l’appareil pos'e sur le coin du bureau avait grelott'e.
— Tiens, je parie que c’est lui, fit Juve.
Il d'ecrocha :
— All^o, qui est l`a ?
Mais aussit^ot la voix de Juve avait pris un ton respectueux.
— Parfaitement, monsieur, c’est bien le policier Juve qui vous r'epond.
Puis, Juve, silencieux, avait 'ecout'e. Ce n’'etait pas Fandor en effet qui t'el'ephonait au roi des policiers.
— All^o, avait dit le policier, c’est moi, c’est bien moi, moi, Juve ! `A qui ai-je le plaisir de parler ?
— `A M. de Parcelac.
Juve, `a ce nom, fronca les sourcils :
— Au directeur du Comptoir National ? pr'ecisa-t-il.
— `A lui-m^eme.
— Que puis-je pour vous, monsieur ? s’informa Juve.
— Monsieur, je serais tr`es d'esireux de vous voir d’urgence. Je me trouve avec M e Masson, pr'esident de la Chambre des notaires, et nous avons besoin de vous entretenir imm'ediatement. Pouvez-vous vous rendre `a mon bureau ?
— `A mon grand regret, monsieur de Parcelac, je ne puis venir. Je suis charg'e par M. Havard d’une enqu^ete difficile et je dois partir ce matin m^eme.
— All^o, c’est pr'ecis'ement M. Havard que je viens moi-m^eme de joindre par t'el'ephone, qui m’a dit de communiquer directement avec vous. C’est M. Havard qui m’a conseill'e de vous prier de passer d’urgence.
— Si M. Havard m’enjoint de me mettre `a votre disposition, monsieur de Parcelac, je n’ai aucun motif pour ne point passer vous voir, mais de quoi s’agit-il ?
— D’une affaire grave, tr`es grave !
— Vraiment ? Laquelle ?
— Je ne puis vous la dire par t'el'ephone, monsieur Juve, mais un nom vous renseignera. Il s’agit de M. Baraban.
— Eh bien, c’est entendu, je saute dans un taxi-auto, monsieur de Parcelac, et je vous rejoins.
***
Deux jours auparavant, alors que le jeune et innocent Claude Villars, pupille de l’oeuvre des orphelins d’officiers minist'eriels, avait tir'e de la roue le num'ero 6 666, on avait remarqu'e, dans l’assistance, combien le sort 'etait aveugle qui favorisait ainsi d’un gros lot de deux cent mille francs ce fameux personnage d'esormais l'egendaire qu’'etait l’oncle Baraban.
M e Gauvin, d'epositaire du billet appartenant `a Baraban, s’'etait 'etonn'e de la chose, en avait dit quelques mots. De bouche en bouche, la nouvelle avait circul'e et M e Masson, pr'esident de la Chambre des notaires, n’avait pas 'et'e le dernier `a faire remarquer la co"incidence. M e Masson, toutefois, savait trop combien les op'erations des loteries 'etaient r'eguli`erement faites pour s’y attarder.
Quarante-huit heures apr`es le tirage de la loterie, alors que M e Masson, qui avait bien d’autres occupations en t^ete, ne se souciait plus du tout, ni du gros lot de deux cent mille francs, ni de son b'en'eficiaire, un jeune notaire qui remplissait la fonction de secr'etaire `a la Chambre des notaires entrait `a l’'etude de M e Masson.