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ЖАНРЫ

L'Arrestation de Fant?mas (Арест Фантомаса)
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En possession du ticket, qu’il paya d’un billet de cent francs dont il n’attendit m^eme pas la monnaie, Juve franchit en deux sauts la salle d’attente, p'en'etra sur le quai.

Le train 'etait l`a.

Mais une pancarte ironique renseignait le policier : « D'epart `a 7 h. 30. » Il 'etait 7 h. 5.

— Vingt-cinq minutes `a attendre. Je suis fichu. Vingt-cinq minutes. Fant^omas va me rattraper.

Juve, une seconde, demeura immobile.

Et soudain, comme il consid'erait la petite gare, tranquille et d'eserte, o`u nul employ'e ne se montrait – le train n’'etait pas encore en partance – une id'ee folle, une id'ee merveilleuse lui vint `a l’esprit. Juve, sans bruit cette fois, s’'elanca vers la pendule donnant l’heure officielle de la gare.

Monter sur un banc, ouvrir le cadran de cette pendule, avancer l’aiguille de vingt-cinq minutes, fut pour Juve l’affaire d’une seconde.

— Parbleu, songeait le policier, au premier aiguillage, mon train attendra. Mais, au premier aiguillage, nous serons trop loin pour que Fant^omas me rejoigne.

Juve sauta `a bas du banc, il grimpa dans un wagon ; il n’en avait pas ferm'e la porti`ere que, d'ej`a, `a la cantonade, en digne voyageur qui proteste, Juve se prenait `a crier :

— Ah ca, en voil`a une compagnie. C’est l’heure de partir, nom d’un chien. On va encore nous faire rater la correspondance.

Et le truc grossier, mais merveilleusement simple, g'enial d’enfantillage, que Juve venait d’inventer r'eussit enti`erement.

`A sa voix, un chef de gare apparut, regarda, 'ebahi, la pendule, puis se pr'ecipita vers la locomotive. Des coups de sifflet. L’apparition d’employ'es brusquement tir'es de leur l'ethargie et claquant les porti`eres. L’'enervement des m'ecaniciens sautant sur la machine.

Juve voyait tout cela, partag'e entre le fou rire et l’anxi'et'e. Et puis, brusquement, `a bout d’'energie nerveuse, le policier s’affala sur la banquette.

Le train partait. Juve en 'etait certain, nul n’avait rejoint le convoi. Juve avait d'epist'e Fant^omas. Juve serait `a Paris avant le bandit.

29 – JUVE, VOUS ^ETES UN TRA^ITRE

Litt'eralement abruti, hors de lui, fatigu'e au point de marcher comme un automate, Juve, dont la main crisp'ee serrait `a l’int'erieur de sa poche de redingote le portefeuille rouge retrouv'e dans les bois de justice, grimpa l’escalier conduisant `a son appartement de la rue Bonaparte.

Durant le long voyage de Quimper `a Paris, le policier n’avait pas ferm'e l’oeil. Encore que la chose f^ut invraisemblable, il s’'etait continuellement m'efi'e d’une arriv'ee inopin'ee de Fant^omas, d’une tentative du bandit. Tout lui avait 'et'e sujet `a pr'ecaution, il avait tout surveill'e.

Et maintenant encore, au moment o`u il introduisait sa clef dans sa serrure, il 'etait d'ecid'e `a demeurer debout, `a ne point s’accorder une seconde de repos, que quand il aurait remis, de la main `a la main, le document qu’enfin il avait rattrap'e, `a l’envoy'e du tsar.

— Morbleu, je dormirais bien, songeait le bon Juve, mais il ne sera pas dit que je succomberai `a la fatigue dans les derni`eres minutes. Il faut que je tienne bon, je tiendrai bon.

Et puis, brusquement, Juve songeait que sa t^ache e^ut 'et'e singuli`erement simplifi'ee si `a ce moment il avait pu avoir comme compagnie son ins'eparable ami Fandor, son fils, presque. Mais qu’'etait devenu Fandor ?

Juve ne le savait pas, Juve ne le savait plus, et m^eme ce n’'etait pas sans une certaine inqui'etude qu’il songeait au journaliste.

'Enerv'e, Juve ouvrit brusquement la porte d’entr'ee de son appartement, traversa le corridor obscur, sentant un peu le moisi, cette odeur de tous les appartements inhabit'es depuis quelque temps, et p'en'etra dans son cabinet.

Or, Juve n’'etait pas entr'e dans la pi`ece, il tenait encore en main le bec-de-cane de la porte, qu’abasourdi, il devait s’arr^eter, immobilis'e, les yeux dilat'es par la surprise, mais non point par la peur car Juve ne connaissait pas ce sentiment.

Juve aurait 'et'e peut-^etre fond'e cependant `a 'eprouver `a cette minute une vive crainte. Le spectacle qu’il voyait 'etait peu rassurant.

Devant lui, face `a la porte par laquelle il entrait, Juve apercevait son bureau, et, derri`ere son bureau, visiblement ayant fouill'e dans ses tiroirs, ayant boulevers'e ses papiers, mais maintenant se tenant debout, un revolver `a la main, un revolver braqu'e dans sa direction, un homme : le lieutenant prince Nikita, un homme dont l’attitude 'etait faite de col`ere et de folie, un homme hors de lui 'evidemment et qui accueillait le policier par ces mots, prononc'es d’une voix que la haine faisait trembler :

— Pas un cri, pas un geste. Je sais que vous ^etes un tra^itre. Je vous tuerai sans merci.

Certes, tout autre que Juve, mis `a cette minute en face d’un individu en apparence aussi r'esolu aux pires extr'emit'es que l’'etait le prince Nikita, e^ut 'et'e affol'e.

Juve, lui, ne tressaillit m^eme pas.

— Nom d’un chien, voil`a que le lieutenant Nikita est devenu fou, se dit-il simplement.

— Vous permettez que je pose mon chapeau ? demanda tranquillement Juve, qui savait qu’il importe avant tout de ne jamais exciter les d'ements, de ne pas raisonner avec eux. Je suis tr`es fatigu'e, cher monsieur et enchant'e de vous revoir.

Juve allait continuer `a bavarder avec le lieutenant prince, feignant de ne pas s’'etonner de sa pr'esence, mais l’officier russe ne lui en laissait pas le loisir. De sa m^eme voix vibrante de rage, il reprenait :

— Ah c`a, vous plaisantez. Vous ^etes fatigu'e, monsieur Juve ? Belle affaire. Vous serez moins fatigu'e dans quelques minutes, vous pourrez vous reposer longtemps, toute l’'eternit'e. Je vais vous tuer.

Juve resta tr`es calme.

— Ce n’est pas gentil, r'epondait-il, affectant de rire, se gardant du moindre mouvement, et commencant `a trouver l’aventure d'eplaisante. Vous voulez me tuer ? pourquoi donc ?

— Vous ^etes un tra^itre !

— Et vous, vous ^etes fou.

— Je suis fou, monsieur ? Vraiment ? Ah ca, qui de nous deux est le plus fou ? de vous, qui m’avez trahi et qui revenez beno^itement chez vous, sans vous douter que je vous y guette, que je vous y attends, ou de moi, qui vais me venger de votre trahison, et qui, apr`es, me ferai sauter la cervelle, s’il le faut ?

Juve s’assit.

— Je ne vous comprends pas du tout, d'eclara-t-il. Vous me parlez tout le temps de trahison. En quoi vous ai-je trahi ?

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