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ЖАНРЫ

Le Voleur d'Or (Золотой вор)
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— Trois ? interrompit Juve. Je croyais qu’il n’en 'etait venu que deux ?

— Ma foi, fit la petite bonne, je me trompe peut-^etre !…

Elle r'efl'echit une seconde, avala un grand verre d’eau, puis, ayant pass'e la main sur sa poitrine pour justifier que cette absorption lui faisait du bien, elle reprit :

— Non, je ne me fiche pas dedans, c’est bien trois hommes qui sont venus. L’premier ce d’vait ^etre un assez dr^ole de type : il 'etait pas mal habill'e `a c’qui m’a sembl'e, pas tr`es vieux mais pas tr`es jeune, car ses cheveux grisonnaient. J’ai gu`ere remarqu'e sa figure, mais j’crois bien qu’il n’avait pas de barbe ! Peut-^etre que c’est un domestique aussi, lui, ou alors un acteur. Il est ben rest'e vingt minutes avec la patronne, puis il s’est d'ebin'e sans faire de tapage.

Juve dissimula un sourire, il se reconnaissait `a ce signalement ; il questionna d’un air indiff'erent :

— Y en a donc qui font du tapage, chez votre patronne ?

— C’est probable ! r'etorqua la bonne, vous pensez bien que dans son commerce, ca ne va pas toujours tout seul !… Y en a qui trouvent qu’elle demande trop cher… Y en a qui sont plus exigeants que les autres… J’ai r’marqu'e ca bien souvent, quand c’est pas eux qui la disputent, c’est elle qui fait des chichis…

— Ah ! ah ! d'eclara Juve, et alors qu’est-ce que vous faites, vous, pendant ce temps-l`a ?

— Oh moi ! fit la bonne en se carrant dans le fauteuil que lui avait aimablement offert l`a concierge, moi je ne m’en occupe pas ! Je m’enferme dans la cuisine, et je surveille le fricot. D’ailleurs, j’aime pas m’occuper des affaires des autres !… J’ai 'et'e bien contente tout `a l’heure, lorsque le vieux birbe de la police s’est amen'e dans l’appartement et m’a dit :

« Vous, la bonne, foutez le camp ! »

`A cette d'eclaration, Juve comprenait que M. Havard 'etait, `a l’heure actuelle, dans l’appartement de la demi-mondaine. Il reconnaissait son chef et ses habitudes, et Juve ne pouvait s’emp^echer de hausser les 'epaules.

M. Havard proc'edait tout `a fait `a l’inverse de lui.

Lorsqu’il faisait une enqu^ete, il commencait par 'ecarter tous les gens susceptibles de lui fournir des renseignements. Ceci, disait-il, afin de ne pas se laisser influencer.

Juve, au contraire, aimait `a bavarder avec tout le monde, et n’arrivait d’ordinaire sur le lieu m^eme du drame qu’apr`es s’^etre document'e de toutes les facons possibles et imaginables.

Juve avait recommenc'e `a faire parler la petite Normande.

— Alors, demanda-t-il, il en est venu un autre apr`es ce monsieur `a la figure ras'ee ?

— Un autre, oui, fit la Normande, deux autres m^eme ! Tout d’abord, le premier homme, je ne l’connaissais pas. Il n’'etait jamais venu chez nous, et pourtant il avait l’air de tr`es bien conna^itre la maison. Mais, pour un mal poli, c’est un mal poli ! Il avait son chapeau sur la t^ete, enfonc'e sur ses yeux. C’est un frileux aussi ; bien qu’il ne fasse pas froid, le col de son paletot 'etait relev'e jusqu’`a son nez ! Maintenant encore, p’t’^et’ben que c’'etait un homme mari'e !… Tout le monde sait que les hommes mari'es, ca se cache pour entrer chez les cocottes… C’t’homme-l`a, j’l’ai mis dans l’boudoir, et j’ai bien fait, car, dix minutes apr`es peut-^etre, c’'etait l’ami de madame qui s’amenait. C’'etait l’ami s'erieux, celui qui paie le terme, et que conna^it madame la concierge, L'eon Drapier, comme on dit qu’il s’appelle. C’est alors qu’il s’est pass'e quelque chose que j’ai pas pu comprendre !…

La petite bonne s’interrompit pour avaler une gorg'ee et reprit :

— On s’est disput'e, la patronne et l’homme… ou les hommes… mais j’crois ben qu’elle s’est surtout engueul'ee, sauf votre respect, avec son amant L'eon Drapier. C’est d’ailleurs lui qui criait le plus fort !… Tout d’un coup, silence… puis, pan ! un coup de revolver !… J’'etais en train de r'ecurer les casseroles, je m’dis : c’est pas possible ! On dirait un coup de fusil !…

« J’entends plus rien, je continue `a m’occuper de ma cuisine. `A un moment donn'e, je r’commence `a entendre un bruit de pas pr'ecipit'es dans l’entr'ee, j’vais voir, et j’apercois L'eon Drapier qui se sauve de l’appartement… Alors j’m’am`ene en douce, histoire d’aller bavarder avec la patronne ; c’est l`a que je l’ai trouv'ee par terre, tremp'ee dans son sang.

— Mais, l’autre homme ? fit Juve.

— Lequel ? demanda la bonne.

— Celui qui est entr'e en second lieu ! pr'ecisa le policier, le mal poli, comme vous dites, qui avait son chapeau sur la t^ete et le col de son pardessus relev'e. Qu’est-il donc devenu ?

La Normande demeurait interdite.

— C’est rigolo tout de m^eme ! fit-elle. Eh bien, pour tout vous dire, j’avais compl`etement oubli'e celui-l`a. J’ai plus pens'e du tout `a ce qu’il a pu devenir !…

Juve questionna :

— N’est-il pas sorti de l’appartement avant l’arriv'ee de L'eon Drapier ?

— Oh pour ca, non ! fit la bonne, car j’ai quitt'e l’entr'ee…

— Ensuite, l’avez-vous vu ?

— Mais non, je ne l’ai point vu ! Et c’est ca le plus extraordinaire, car, j’en jurerais sur la t^ete de ma m`ere, lorsque ma pauvre patronne a 'et'e retrouv'ee par moi, elle 'etait seule dans son appartement, et, `a moins que je n’aie la berlue, je croirais plut^ot alors que ce type-l`a s’est d'ebin'e par la fen^etre ou par la chemin'ee… Qu’est-ce que vous en pensez, vous ?

Na"ivement, la petite bonne normande formulait `a Juve la question que depuis quelques instants le policier se posait `a lui-m^eme.

Il 'etait assez perplexe, 'etonn'e de ce qu’il venait d’entendre ; toutefois les choses commencaient `a se pr'eciser dans son esprit. Il lui apparaissait d'esormais 'evident, certain, que trois hommes 'etaient venus successivement voir Paulette de Valmondois.

Le premier c’'etait lui, le dernier L'eon Drapier. Quand au second, le mal poli, comme disait la bonne, l’homme au visage dissimul'e par son collet de manteau et son chapeau, celui qu’on n’avait point vu sortir de l’appartement, c’'etait l’inconnu, c’'etait le myst`ere…

— Ce que j’en pense ? r'epondit Juve, mais pas grand chose, ma petite. Ce que je vous en ai dit, c’est histoire de bavarder.

La Normande 'etait enchant'ee de l’importance qu’elle prenait dans l’aventure. Elle avait encore soif, mais cette fois elle demanda `a la concierge :

— Encore du vuln'eraire !

Elle y prenait go^ut d'ecid'ement. Juve la consid'era d’un oeil de piti'e.

— Pauvre petite gamine ! pensa-t-il. Encore une qui aurait bien mieux fait de garder ses vaches dans sa campagne que de venir `a Paris o`u elle se perdra, t^ot ou tard.

Juve, cependant quittait la loge, non sans avoir, comme on dit vulgairement, graiss'e la patte `a la concierge pour la f'eliciter de la facon adroite dont elle s’'etait comport'ee pendant cet interrogatoire que Juve faisait clandestinement subir `a la Normande.

Le policier se disposait `a monter d'esormais `a l’appartement de Paulette, mais `a peine 'etait-il engag'e dans l’escalier qu’il dut reculer.

Des hommes descendaient lentement, portant une civi`ere qu’ils avaient grand-peine `a faire passer dans les tournants brusques de l’escalier.

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