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ЖАНРЫ

Les souliers du mort (Ботинки мертвеца)
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— Moi, fit le notaire.

M. de Larquenais soupira profond'ement :

— Eh bien, j’aime mieux ca ! fit-il. Au moins, la chose ne s’'ebruitera pas.

— Oui, monsieur le procureur, mon fils, mon enfant ch'eri, mon Th'eodore a fractur'e un tiroir et pris dix-huit cents francs dans la caisse. Ah, c’est 'evidemment un coup de folie, une histoire de femme ; mais je suis malheureux, bien malheureux.

Le procureur jouait machinalement avec un coupe-papier, ne sachant trop quel conseil donner `a ce p`ere d'esesp'er'e :

— Que voulez-vous de moi ? demanda-t-il. Je ne pense pas que vous songiez `a poursuivre votre fils, et d’ailleurs, la loi ne le permet point. Le vol d’un p`ere par son enfant ne saurait ^etre objet de poursuite. Tout au plus pourriez-vous si vous le d'esiriez, faire enfermer votre fils dans une maison de correction. Mais enfin…

— Je sais, monsieur, je sais, interrompit le notaire, et si je suis venu tout `a l’heure parler au procureur, c’est `a l’ami que je m’adresse d'esormais. 'Ecoutez, rendez-moi un service. Quoi qu’il m’en co^ute, je veux donner `a Th'eodore une lecon, lecon dont il se souvienne. Il faut lui faire peur… voil`a ! Th'eodore, par une d'ep^eche cynique, m’annonce qu’il revient de Paris, par le train qui passe `a Vernon `a midi treize, aujourd’hui m^eme. Eh bien, je viens vous demander d’envoyer `a la gare deux agents pour l’arr^eter. On le conduira devant vous, discr`etement bien entendu, afin que nul ne le sache en ville, sauf vous et moi, vous lui administrerez un bon savon, vous lui laverez la t^ete et, lorsqu’il se sera repenti, je lui pardonnerai `a mon tour.

Le procureur souriait.

— C’est une affaire entendue, ma^itre Gauvin. Vous avez raison, en effet, et je m’en vais donner imm'ediatement des ordres.

Le procureur regardait sa montre.

— Il est midi moins dix. Nous avons le temps. Restez `a mon cabinet, ma^itre Gauvin, nous y attendrons ensemble l’arriv'ee du coupable.

***

Lorsque le train venant de Paris entra en gare de Vernon, un jeune homme au visage p^ale et d'efait descendit d’un compartiment de premi`ere classe. C’'etait Th'eodore.

Le jeune homme, si soign'e `a son ordinaire, tir'e `a quatre 'epingles, l’adolescent qui incarnait l’'el'egance, `a Vernon tout au moins, n’'etait pas ras'e, ses cheveux 'etaient d'epeign'es, ses v^etements couverts de poussi`ere, son faux col compl`etement froiss'e, sale, et sa cravate desserr'ee.

Th'eodore se m^elait `a la foule des voyageurs pour gagner la sortie. Machinalement, d’un air 'egar'e, ses yeux se fixaient sur l’employ'e `a casquette galonn'ee qui recueillait les billets. Il le connaissait de vue ; mais `a c^ot'e de cet homme, se trouvaient deux personnages que Th'eodore connaissait de vue 'egalement, pour les avoir, `a maintes reprises, apercus dans les endroits les plus divers `a Vernon, au caf'e, au th'e^atre, pr`es des casernes, dans les magasins.

Il s’imaginait que c’'etait l`a deux retrait'es qui vivaient en rentiers ; parfois, il 'echangeait m^eme avec eux de petits bonjours discrets, `a la mani`ere de gens qui, bien que n’ayant jamais 'et'e pr'esent'es les uns aux autres, se croient oblig'es `a des politesses par ce fait qu’ils se rencontrent fr'equemment.

Th'eodore venait de donner son billet, il s’appr^etait `a prendre une voiture pour se faire conduire chez son p`ere.

Le jeune homme 'etait tr`es ennuy'e, et son bel enthousiasme de la veille 'etait compl`etement tomb'e. Il avait pass'e par de cruelles d'eceptions, et, de plus, la lumi`ere s’'etait faite dans son esprit ; il s’'etait rendu compte de l’effroyable incorrection de sa conduite et 'etait d'ecid'e `a tout avouer `a son p`ere. C’'etait dans ce but et pour pr'eparer le malheureux notaire `a la sc`ene qui 'evidemment allait avoir lieu que Th'eodore lui avait t'el'egraphi'e :

« J’arrive de Paris par le train de midi treize.

»

Au moment o`u il montait en voiture, Th'eodore poussa un cri et devint tout p^ale. Les deux messieurs qu’il connaissait de vue, les deux hommes aux fortes moustaches, se trouvaient de part et d’autre des porti`eres. Ils les ouvraient simultan'ement et montaient dans le fiacre o`u Th'eodore se trouvait d'ej`a.

Stup'efait, interdit, le jeune homme allait les interroger, il n’en eut pas le temps.

L’un d’eux lui d'eclarait :

— Vous ^etes bien monsieur Th'eodore Gauvin, n’est-ce pas ?

— Mais… r'epliqua le jeune homme.

L’autre personnage intervenait et d'eclarait :

— Nous vous connaissons d’ailleurs, et nous allons vous accompagner.

— Ah ca, balbutia Th'eodore, devenu livide, qui ^etes-vous, messieurs ? O`u m’accompagnez-vous ?

Et d`es lors, le jeune homme crut sa derni`ere heure venue, il crut qu’il allait s’'evanouir, lorsque l’un de ses interlocuteur eut r'epliqu'e :

— Nous sommes agents de la S^uret'e, et nous vous emmenons `a M. le Procureur de la R'epublique, sur sa requ^ete.

***

L’interrogatoire de Th'eodore se poursuivait dans le cabinet de M. de Larquenais. Le jeune homme 'etait absolument d'efait, abruti par les 'ev'enements qui venaient de se produire. Ainsi, il 'etait d'ecouvert, arr^et'e, interrog'e comme voleur. Il se trouvait en face, non point de M. de Larquenais, homme aimable et jovial, avec qui il avait souvent plaisant'e, d'ejeun'e, fait des parties de chasse et de p^eche, mais en face du procureur de la R'epublique.

— Monsieur Th'eodore Gauvin, insistait le magistrat qui affectait un air s'ev`ere, poursuivez vos aveux, et dites-nous le but de votre venue `a Paris.

— Monsieur, s’'ecriait Th'eodore, j’ai reconnu le vol que j’ai commis et je le d'eplore, ne m’en demandez pas plus. Je vous l’ai dit tout `a l’heure et je vous le r'ep`ete, j’aime une femme, une femme du monde, une femme mari'ee ; mais je ne puis vous la nommer, sans la compromettre.

— Pourquoi ^etes-vous all'e `a Paris ?

— Pour suivre cette femme.

— D`es lors que s’est-il pass'e ?

— Je l’ai suivie, et j’ai acquis la triste conviction qu’elle trompait son mari.

M. de Larquenais dissimula un sourire, et il interrogea finement :

— Elle trompait son mari ? Pas avec vous ?

— H'elas non, fit na"ivement Th'eodore, pas avec moi, mais avec un autre. Je l’ai vue entrer chez cet amant, rester chez lui.

— Ensuite ? interrogea le procureur, qu’avez-vous fait ?

— Je vous l’ai d'ej`a dit, monsieur. Fou de douleur et de d'esespoir, j’ai err'e toute la nuit dans Paris, j’ai parcouru la ville jusqu’`a l’aube. J’ai dormi quelque part, je ne sais o`u, sous des ponts. Puis enfin, j’ai repris courage, et je suis revenu. Me voici maintenant d'eshonor'e, perdu, aux mains de la justice.

Th'eodore avait l’air si troubl'e, si d'esol'e, que le procureur r'esolut de lui apporter quelque consolation :

— Heureusement, fit-il, que c’est M. votre p`ere seulement que vous avez vol'e, et que, dans une certaine mesure, votre faute est att'enu'ee par votre repentir. Cet argent qu’en avez-vous fait ?

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