Pi?ces choisies
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LUI. (Apr`es avoir gard'e le silence.). Oui, notre rencontre n’a pas 'et'e des plus faciles. Tu avais raison. (Il prend la cl'e.) Allons.
ELLE. (Sans bouger de sa place.). Tu pars quand m^eme?
LUI. Et toi aussi tu pars. (Il fait tourner sa cl'e accroch'ee `a un porte-cl'e.) Je dois fermer la porte `a cl'e.
ELLE. Tu veux me mettre `a la rue sous la pluie?
LUI. Tu ne peux pas rester ici. Je dois rendre la cl'e.
ELLE. Ne t’en fais pas pour moi. Va. Je vais ranger, puis je fermerai la porte et je rapporterai ta cl'e.
LUI. Et pour aller o`u en pleine nuit?
ELLE. Ca te tracasse? J’occupe la chambre contigu"e avec la tienne, mais tu ne l’avais m^eme pas remarqu'e. Et moi, je voulais tellement que tu m’adresses la parole!
LUI. Tous ces quatre jours, nous 'etions `a c^ot'e l’un de l’autre?
ELLE. Oui, et maintenant la conf'erence est achev'ee et demain soir, moi aussi, je prends l’avion. Plus exactement, aujourd’hui d'ej`a.
LUI. Alors… (Apr`es h'esitation.) Et puis, non… Au revoir.
ELLE. Un moment!
LUI. (S’arr^etant.). Quoi encore?
ELLE. (D’un ton lib'er'e.). Rien de particulier. Je veux simplement te raconter une anecdote en guise d’adieux. Puisqu’il faut te distraire, allons jusqu’au bout. Un homme, 'epuis'e et p^ale, arrive chez son m'edecin :
– Et vous comprenez l’italien?
– demande le m'edecin.
– Justement, non, - r'epond le patient.
– Alors, la seule chose que je puisse vous conseiller, - dit le m'edecin, c’est d’apprendre l’italien. Alors vous comprendrez ce que vous dit la voix et, peut-^etre, serez-vous rassur'e. Deux mois ont pass'e et le m'edecin rencontre son patient, par hasard, dans la rue, joyeux, resplendissant et le teint color'e.
– Alors, vous avez appris l’italien?
– demande le docteur. Le patient r'epond : - Non, je dors avec une interpr`ete.
LUI. Pourquoi est-ce que tu me racontes ca? pour me relancer?
ELLE. (Moqueuse.). Pour que tu saches que tu es pass'e `a c^ot'e d’une rare possibilit'e de te d'efaire de ta d'epression. (Avec cruaut'e :) Et maintenant, va-t’en, va-t’en au plus vite. Je suis tr`es fatigu'ee.
L’homme marche lentement vers la sortie et s’arr^ete `a la porte.
LUI. Probable, qu’on ne se verra plus. Mais ca ne peut pas ^etre autrement… Tu dois me comprendre…
La femme ne r'epond pas.
LUI. Adieu. (Il sort.)
La femme, seule, reste longtemps assise et immobile. Puis, lentement, elle 'eteint les deux bougies, l’une d’abord, puis l’autre. `A travers la fen^etre p'en`etrent les premi`eres clart'es d’un matin d’automne maussade. Elle se l`eve, s’assoit, se rel`eve, puis machinalement d'ebarrasse la table.
`A l’embrasure de la porte appara^it l’homme.
LUI. C’est encore moi.
ELLE. (Pas encore revenue de ses m'editations, sur un ton distant :). Vous avez oubli'e quelque chose?
LUI. Oui. Heu… non. Dis-moi, tout ce que tu as dit sur toi, tu l’as invent'e?
ELLE. Et si je r'eponds non?
LUI. Tu as raison, ce n’est pas important… Tu sais, `a peine 'etais-je sorti que j’avais compris tout de suite… si je laissais passer cette occasion, je le regretterais toute ma vie… Il y a en toi… J’ai du mal `a expliquer…
ELLE. Je ne vous comprends pas bien.
LUI. Moi-m^eme je ne comprends pas. Ca fait si longtemps que je n’ai pas 'eprouv'e ca. Je pensais que jamais plus je ne l’'eprouverais… C’est pourquoi j’ai eu peur. Toi et moi, c’est comme deux papillons attir'es par un feu… Bien que nous sachions comment cela peut se terminer. Mais ca m’est 'egal. S’il faut aller au feu, eh bien, soit!
ELLE. (Avec douceur.). Tout doux. Assieds-toi.
Il s’assoit.
ELLE. Et maintenant, dis-moi, pourquoi tu es quand m^eme revenu.
LUI. Tu ne comprends pas? (Il prend en souriant la bouteille de champagne.) Il nous reste `a finir le champagne.
FIN
Aimer a perdre la m'emoire
Любовь
до потери памятиCom'edie en deux actes
`A PROPOS
Un homme souffrant d’amn'esie se pr'esente dans le cabinet d’un m'edecin pour avoir son aide. Le m'edecin essaie de d'eceler les sympt^omes et les causes de la maladie, mais en vain : les r'eponses du patient sont tellement contradictoires qu’il est impossible d’obtenir quelque chose de sens'e. Heureusement, il r'eussit `a faire venir la femme du malade. Elle r'epond `a toutes les questions avec clart'e et assurance, mais il ressort de ses affirmations que le docteur aussi souffre d’amn'esie. La situation s’embrouille davantage encore lorsqu’appara^it une autre femme d'eclarant aussi qu’elle est l’'epouse du patient. La situation tourne `a l’absurdit'e totale. Le docteur devient presque fou. Cette com'edie dynamique et burlesque, vive et sans temps mort, conna^it un d'enouement inattendu. La pi`ece est mise en sc`ene dans de nombreux th'e^atres de Russie et d’autres pays. 3 hommes, 2 femmes. Int'erieur.
Personnages
LE DOCTEUR
MICHEL
JEANNE
IR`ENE
L’HOMME
L’^age des personnages n’est pas d’une importance d'ecisive. Il est fort probable qu’ils aient la quarantaine, le Docteur et l’Homme 'etant un peu plus (ou beaucoup plus) ^ag'es.
ACTE I
Le cabinet d’un Docteur richement meubl'e, rappelant un salon 'el'egant plut^ot qu’une salle m'edicale st'erile. Dans un confortable fauteuil, derri`ere son bureau, s’est install'e le Docteur en personne, un homme dans la fleur de l’^age bien habill'e, qui en impose et tr`es s^ur de lui. Entre un Visiteur.
LE VISITEUR. Docteur, je souffre d’amn'esie.
LE DOCTEUR. Depuis quand ?
LE VISITEUR. « Depuis quand quoi » ?
LE DOCTEUR. Depuis quand souffrez-vous d’amn'esie ?
LE VISITEUR. (Mettant son esprit `a la torture.) Je ne m’en souviens pas.
LE DOCTEUR. Bien. Je veux dire : c’est tr`es mauvais. Mais rien n’est irr'eparable. L’essentiel est que vous soyez venu voir le bon m'edecin. Celui qui vous gu'erira. Des m'edecins qui soignent, on n’en trouve pas tant que ca. Et qui gu'erissent, pas du tout. 'Etablissons, comme il se doit, une fiche m'edicale. (Il commence `a entrer les donn'ees dans l’ordinateur.) Et donc, vous souffrez d’amn'esie.
LE VISITEUR. Comment le savez-vous ?
LE DOCTEUR. Vous venez juste de me le dire vous-m^eme.
LE VISITEUR. Ah, oui ? C’est tr`es regrettable. En fait, je le cache pour ne pas me cr'eer d’ennuis.
LE DOCTEUR. Ne vous inqui'etez pas, cela restera entre nous. Secret professionnel. Votre nom ?
LE VISITEUR. Mon nom ? (Mettant son esprit `a la torture.) J’ai oubli'e.
LE DOCTEUR. (Rassurant.) Ne vous inqui'etez pas, ce n’est pas catastrophique. Avez-vous sur vous votre carte d’identit'e ou un document attestant de votre identit'e ?